34 ans après les événements de la place Tiananmen, la Chine continue de sombrer dans l’autoritarisme

Vous connaissez sûrement ces images d’un homme seul devant une colonne de tanks, près de la principale place publique en Chine, cœur du pouvoir du Parti communiste chinois. Ces images devenues légendaires sont le symbole d’un mouvement démocratique violemment réprimé par le régime. Or, 34 ans plus tard, comment a évolué la Chine? Nous croyions pouvoir démocratiser la Chine par le commerce, mais c’est l’inverse qui s’est produit. Retour sur un pays qui se retrouve plus que jamais être une menace pour l’Occident.

Une chose dite à de nombreuses reprises serait que le commerce et la diplomatie permettraient à la Chine d’abandonner progressivement son régime autoritaire pour devenir une démocratie. C’était la croyance qu’en développant la classe moyenne de ce pays, celle-ci réclamerait un État de droit et plus de libertés. Or, qu’est-ce qu’il s’est produit depuis 1989?

En mai 1989, un mouvement étudiant, accompagné de nombreux ouvriers victimes de mesures d’austérité de la part du gouvernement de Deng Xiaoping, a occupé ce qui représente le cœur du pouvoir chinois : la place Tiananmen. Énorme place en béton, avec autour des monuments célèbres tels que le mausolée de Mao, l’assemblée du Parti, la porte sud de la cité interdite et Zhongnanhai, le palais qui est aussi le siège du Parti communiste, c’est définitivement un des endroits les plus symboliques de l’histoire de la Chine ancienne et moderne. Ce qui était au début relativement toléré grâce à des officiels réformateurs du Parti, Deng et l’aile dure ont finalement décidé de réprimer la foule.

C’est ainsi que dans la nuit du 4 juin, des militaires provenant de régions rurales ont reçu l’ordre de tirer sur la foule. Deng avait peur que des militaires originaires de Pékin refusent d’obéir aux ordres. Entre plusieurs centaines et quelques milliers de personnes serait morte lors de la répression de l’occupation de la place. Des sanctions occidentales ont suivi, mais cela n’a pas empêché par la suite le développement du commerce en Chine.

Ainsi, en 1997, Deng Xiaoping vers la fin de sa fin a vu la rétrocession de Hong Kong par la Grande-Bretagne à la Chine. C’était le couronnement d’années d’efforts en vue de remettre la Chine sur la carte. Pays immense à la population particulièrement nombreuse, la Chine populaire a longtemps été isolée du monde occidental qui préférait à la place reconnaître le régime de Chiang Kai Shek comme détenteur légitime de l’autorité sur l’ensemble de la Chine, même s’il ne contrôlait que Taiwan dans les faits.

Nos industries qui sont parties vers la Chine ont contribué au renforcement du régime. On nous disait à l’époque que si la classe moyenne s’enrichit et qu’elle prend connaissance des normes occidentales, que celle-ci réclamerait ses droits. Et que le régime n’aurait pas le choix de réformer. Or, cela ne s’est vraiment pas passé comme prévu. En 1999, Jiang Zemin, président du pays, a ordonné la violente répression des membres du Falun Gong, une organisation religieuse menaçante à ses yeux, car elle comptait plus de membres que le PCC lui-même.

Par contre, sous le nouveau régime de Hu Jintao, certaines réformes favorables aux classes populaires et moyennes ont été décrétées. Par exemple, pour la première fois de l’histoire, les Chinois eurent droit à des vacances annuelles de leur travail. De nombreuses ONG fleuriront : droits des femmes, droits des animaux, associations de petits propriétaires face aux expropriations. Il y avait un réel espoir en effet que la Chine, à défaut de devenir une démocratie, respecterait davantage les droits de la personne.

Et puis est arrivé en 2012 Xi Jinping. Celui-ci a décidé que ça en était fini de la Chine discrète qui cache son jeu dans les relations internationales. Que la Chine passerait à l’offensive. De nombreux dissidents furent arrêtés, internet fut encore plus restreint. Ainsi, il était désormais impossible d’utiliser WhatsApp en Chine, et Instagram. Les entreprises privées furent mises au pas. Celles qui furent à l’origine d’une bonne partie de la croissance ont eu leur élan brisé par le Parti qui ne pouvait tolérer que des acteurs non étatiques soient aussi puissants. Jack Ma, l’excentrique patron d’Ali Baba a été arrêté puis forcé de démissionner. Il vit maintenant en exil au Japon.

La Chine depuis 40 ans, c’est toujours un pas en avant, deux pas en arrière. Pendant un temps, elle va tolérer certaines formes de dissidence, pour ensuite les réprimer violemment. Ou bien permettre le développement de grandes entreprises pour ensuite les nationaliser. Par contre, ce qui est inédit depuis l’époque de Deng Xiaoping, c’est que la Chine exporte sa répression à l’étranger.

On le voit avec l’intimidation des élus du monde entier, dont au Canada. Ou bien les fameux « postes de police » chinois présents ici même au Québec. Ceux-ci ayant des agents pour intimider les Chinois qui osent élever la voix contre le régime, ou bien dans certains pays comme l’Australie, même contre des personnes qui ne sont pas d’origine chinoise.

Cela doit cesser. Nous ne pouvons pas tolérer plus longtemps les intrusions du Parti communiste chinois chez nous sous prétexte que le commerce avec eux est important. Ils volent nos technologies, intimident nos élus. Et que fait Justin Trudeau? Il nomme David Johnston, ancien gouverneur général, pour produire un rapport sur l’ingérence chinoise au Canada. Pour se faire dire quoi au final par ce « vieil ami de la Chine »?

Qu’une commission d’enquête n’est pas nécessaire! Bien que tous les partis d’opposition aient voté pour son départ, Trudeau a décidé que Johnston resterait en poste. C’est ainsi que l’on pensait influencer la Chine par nos « valeurs » et nos capitaux. Or, c’est l’inverse qui s’est produit. Nos pays sont moins démocratiques justement par l’influence de la Chine dans nos chambres de commerce, nos universités, nos industries, nos gouvernements. Il est temps que ça change.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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