Dans une chronique publiée ce mardi et qui s’apparente à des milliers d’autres, Richard Martineau s’interroge sur l’attrait que peu trouver le peuple américain au controversé candidat républicain à la présidence américaine. Titrée « Trump se fout du peuple », le chroniqueur y va d’une analyse tellement périmée qu’on se croirait retournés tout droit en 2016, alors qu’on ne savait pas du tout à quoi s’attendre de l’entrée du magnat de l’immobilier en politique.

Dans cette chronique, Martineau remet en question l’intérêt qu’accorde Trump au peuple. Il affirme d’abord comprendre la frustration populaire contre les élites : « Et je comprends pourquoi plusieurs Américains ont juste envie de faire un gros «f**k you» au système qui, jugent-ils, les a abandonnés. » Or, 8 ans plus tard, après un bilan de mandat plus qu’enviable entre 2016 et 2020, limiter ce support à une simple volonté d’envoyer promener les élites est véritablement douteux. Les américains qui prévoient voter pour lui – et qui n’ont fait qu’augmenter en nombre – ne le font pas simplement par dépit : voter Trump n’a rien d’un vote de protestation.

Un bilan impeccable

Est-ce si difficile à comprendre que le seul moment dans les 23 dernières années depuis le 11 septembre 2001 où on signait des traités de paix au lieu de déclarer des guerres était durant les 4 années de sa présidence? Ukraine, Moyen-Orient, Corée du Nord… En seulement 4 ans de « retour à la normale » sous Biden, tous ces conflits ont redémarré de manière encore plus intense, au point où on craint désormais le spectre d’une troisième guerre mondiale! Et c’est Trump que les Américains devraient craindre? C’est proprement absurde. Pire, c’est immoral et dangereux.

Et la paix dans le monde, croyez-le ou non, c’est bon pour l’économie! Ça permet plus de prédictibilité aux investisseurs. Sous sa présidence, l’économie fonctionnait à plein régime : la bourse battait des records, les taux de chômage avaient baissé à des niveaux records, particulièrement chez les afro-américains et les latinos, les gens s’enrichissaient, prospéraient… Rien à voir avec le contexte inflationniste invivable d’aujourd’hui.

« Mais oui mais la pandémie… », je sais, je sais. Mais elle commence à avoir le dos large, la pandémie. Elle est déjà loin derrière nous et la reprise n’est pas du tout au rendez-vous.

Et bon, selon beaucoup de gens, on souhaite se débarrasser de Trump en raison des débats interminables, des protestations et des intrigues pour le destituer qu’il engendre. « Il est trop controversé », alors il devrait se taire. On veut le punir en raison de l’opposition qu’il suscite. Aussi bien dire que c’est donner raison aux intimidateurs professionnels de la gauche… Ce sont eux et eux-seuls qui ont brûlé des quartiers entiers dans des émeutes interminables… pointer Trump du doigt est tout à fait malhonnête.

Renier ses affinités idéologiques

Je peux bien comprendre que ses collègues obsédés comme Pierre Martin, Richard Latendresse ou Luc Laliberté, qui ne font que régurgiter les lignes de presse démocrates depuis 8 ans, puissent avoir gardé la même opinion militante, mais je dois admettre n’avoir jamais compris la fermeture de M. Martineau à l’égard de Trump. Après tout, le « controversé » chroniqueur partage beaucoup de ses idées…

Alors que l’État Islamique formait un État en Syrie et en Irak, décapitait des gens et faisait des attentats à chaque semaine partout dans le monde, Obama les qualifiait « d’équipe junior » au grand dam de tout le monde qui réalisait à quel point il ne prenait pas la situation au sérieux. Plus tard, il affirmait que le combat contre l’État Islamique serait un « combat générationnel », sous-entendant qu’on en aurait pour des décennies.

À cette époque, Martineau gesticulait sur le sujet pratiquement à tous les jours. Trump a été élu et l’État Islamique a été vaincu en un an.

Au sujet de l’immigration et du multiculturalisme, on a à peu près le même portrait ; Trump s’est toujours montré déterminé à mettre un terme à ce laxisme qui, soit dit en passant, affecte aussi le Canada, puisque de nombreux migrants à nos frontières sont d’abord passés par les États-Unis.

Et que dire du politiquement correct, du wokisme et de la cancel culture? Ce n’est pas seulement avec des tweets moqueurs que Trump a combattu ces tendances régressives, il agit avec force au niveau législatif. Par exemple, il a banni la théorie critique de la race (racisme systémique) des écoles au lieu d’en débattre éternellement comme Legault… Il promet aussi de bannir les athlètes transgenres des compétitions sportives féminines.

Trump est le politicien qui a le plus agit dans le domaine de cette « guerre culturelle »… Il n’en fait pas un fond de commerce en écrivant des chroniques à toutes les semaines comme autant de coups d’épée dans l’eau ; il agit.

L’appât du gain? Vraiment?

Mais la chose la plus ridicule de la chronique à Martineau, c’est qu’il affirme essentiellement que Trump se fout des enjeux qui touchent les américains et n’est là que pour l’argent! C’est à peine croyable de penser ça en 2024.

« Trump n’est pas antisystème, c’est le système poussé à son maximum! «Take the money and run!» » écrit-il… Mais on se demande bien de quel argent parle Martineau! Trump est l’un des seuls présidents, avec John F. Kennedy et Herbert Hoover, à avoir refusé son salaire de 400 000$ par année!

Fait-il plus d’argent avec ses entreprises à cause de sa présidence? Ça s’argumente… mais les bénéfices en termes de qualité de vie sont loin, très loin d’être évidents… Ce n’est pas comme si des millions de plus sur ses milliards pouvaient changer grand-chose pour lui.

« Le système poussé à son maximum »? Franchement! Tout l’establishment, qui l’adulait jusqu’aux années 2000, lui ont tourné le dos! Il est assailli par un tel acharnement judiciaire qu’il collecte désormais plus de condamnation que le meurtrier qu’était Al Capone! C’est une vraie farce à ce stade.

Trump recherche-t-il la gloire ; probablement. C’est en tout cas le seul incitatif réel qu’on peut voir dans tout ce bordel. Et sa figure politique prend maintenant des traits messianiques qui ont probablement de quoi l’enivrer. C’est sûr.

Mais s’il y a bien une chose qui est absolument évidente avec Trump, c’est que c’est un workaholic invétéré. L’avez-vous vu s’acheter un nouveau yacht, un voyage dans l’espace comme Jeff Bezos, un nouveau palais? Le voyez-vous faire le party avec son argent soi-disant acquis par simple appât du gain? Non. Le gars n’a même jamais bu une goutte d’alcool de sa vie! Trump ne fait que travailler, travailler, travailler… Il semble incapable d’arrêter.

Et libre à vous de ne pas le croire, mais partout où il va, lorsqu’il rencontre le peuple américain, il prend le temps de les écouter et de s’informer de leurs problèmes. Si ce n’est que « pour le show », laissez-moi vous dire une chose, c’est le meilleur acteur qui existe en ce moment sur terre, parce que contrairement à ce que dit Martineau, il semble RÉELLEMENT se soucier des États-Unis et de leur futur.

Mais tout ça, c’est à peu près impossible de le savoir lorsqu’on suit les chroniqueurs de Québécor, La Presse, Radio-Canada qui, depuis 2016, n’ont fait absolument aucun effort pour comprendre le phénomène et se limitent écrire avec leur ressenti contre le monstre orange qui est un monsieur vraiment vraiment méchant.

Philippe Sauro-Cinq-Mars

Diplômé de science politique à l'Université Laval en 2017, Philippe Sauro Cinq-Mars a concentré ses recherches sur le post-modernisme, le populisme contemporain, la culture web et la géopolitique de l'énergie. Il est l'auteur du livre "Les imposteurs de la gauche québécoise", publié aux éditions Les Intouchables en 2018.

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