Bernard Drainville chante faux et les solidaires sur TikTok : nos politiciens ont-ils pour mission de nous divertir?

Sur les réseaux sociaux, une scène étrange a circulé : on voit un Bernard Drainville complètement vidé de son énergie vitale qui demande aux journalistes de chanter Toune d’automne des Cowboys Fringants. Les gens ont dit à la blague que ça ressemblait à une scène supprimée de la série The Office. Mais si Bernard Drainville a fait parler de lui (encore une fois) pour des raisons douteuses, il n’est pas seul à entretenir le malaise dans la classe politique québécoise. Parlons également de Sol Zanetti et de son parti, Québec Solidaire. Est-ce que notre démocratie est condamnée à l’insignifiance et au mauvais goût ? C’est ce que nous allons voir.

Suite au décès prématuré du chanteur des Cowboys Fringants Karl Tremblay, les hommages se sont multipliés, incluant les plus inusités. Parmi eux, Bernard Drainville est celui qui a provoqué le plus grand malaise. Debout devant les journalistes, il annonce qu’avant de présenter sa conférence de presse, qu’il souhaite entonner – au complet – Toune d’automne des Cowboys Fringants. S’en suivent quatre longues minutes qui voient Bernard fausser accompagné de son téléphone. Les journalistes n’osent pas chanter, mais vont quand même taper des mains pour l’encourager.

Bien sûr, nous sommes tous tristes de la mort de Karl Tremblay, mais est-ce la mission d’un ministre de l’éducation de faire du divertissement alors que se profile une grève dans le secteur public qui le concerne directement? Tout au Québec de nos jours est prétexte en politique pour faire le « buzz » sur les réseaux sociaux, à tenter de rejoindre les jeunes. Même si cela est particulièrement malaisant. Au-delà de cette triste scène, Bernard Drainville semble fatigué et désemparé par son poste de ministre. Nous avons déjà parlé de ses performances comme ministre de l’Éducation par le passé en soulevant son manque d’entrain, et une impression de lassitude, voire d’indifférence.

Bernard Drainville est loin d’être seul. François Legault possède son propre podcast, et nombreuses sont les initiatives individuelles venant de députés pour tenter de percer le mur de l’indifférence sur les réseaux sociaux. Si tous les partis ont cette stratégie, incluant les libéraux, il faut dire qu’un parti se distingue tout particulièrement dans ses efforts de communication qui tombent à plat, et c’est Québec Solidaire. Le parti de gauche radicale se fie à la démographie de ses électeurs : des jeunes urbains ultra-connectés. C’est ainsi qu’on a vu Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé se mettre en scène dans des sketches douteux sur TikTok. Avant eux, c’était le duo de choc Catherine Dorion et Sol Zanetti qui se chargeait de la communication à destination des « jeunes ». Or, comme tout le monde, l’électorat de Québec Solidaire vieillit, et il est loin le temps où nous pouvions acheter une maison après avoir travaillé quelques années.

D’ailleurs, c’est ce même Sol qui a gonflé et dégonflé une balloune en plein Salon Bleu pour dénoncer l’essoufflement du nationalisme caquiste. Si la métaphore est là, il demeure néanmoins que son action a fait parler sur la forme, et non sur le fond. Les médias se sont intéressés à ce geste bizarre, sans creuser les propos de Sol ou ce qu’il tentait de dire. Et de confronter la CAQ sur l’essoufflement de son nationalisme. Sol n’est pas un député très visible ou actif, et son siège serait en danger. Est-ce le parti qui a choisi de le mettre à l’arrière-scène? C’est possible. Mais lorsqu’on fait parler de soi cette année pour cette raison, c’est en effet assez décevant.

Au risque de déplaire, la mission des politiciens n’est pas de divertir le public. Il est normal que l’on s’intéresse à sa vie personnelle, par exemple pour que l’on puisse s’identifier à lui (ou à elle). Mais de là à encourager qu’ils se mettent en scène dans des sketches, des émissions de variétés ou en chantant? Le service public, c’est quelque chose de sérieux. Et déjà si seulement ça pouvait être bien amené, par exemple en faisant des blagues ou de l’ironie. Mais non, c’est seulement malaisant de voir des élus essayer de parler à des « jeunes » qui se fichent totalement d’eux en singeant les tendances du moment sur TikTok.