Lorsque François Legault a fondé la Coalition Avenir Québec en 2011, il en faisait la promotion avec toutes sortes d’idées novatrices qui sortaient de la lassante alternance entre les souverainistes du PQ et les fédéralistes du PLQ. Il affirmait haut et fort vouloir développer le plein potentiel québécois. Par exemple, il proposait sans complexe d’exploiter nos hydrocarbures dans un modèle norvégien pour faire du Québec un État prospère libéré de la péréquation. Ayant absorbé l’ADQ, il était normal que le parti penche plus vers la droite économique, posture qu’il a continué d’adopter au moins jusqu’en 2018. Or depuis son élection et son virage vers le nationalisme de province, le parti s’est ramolli pour ne devenir qu’un amas consensuel d’opportunistes de toutes les familles politique et qui n’a qu’une seule fonction : s’accrocher au pouvoir.
Au début de son mandat, la CAQ s’est attaqué instantanément aux sujets identitaires tels que la laïcité et l’immigration afin de faire belle figure sur ses promesses nationalistes de campagne. À vrai dire, le parti impressionnait par sa détermination. Or en dehors de l’identité, le gouvernement caquiste n’a fait que peu de chose en termes de développement économique, qui était pourtant son créneau depuis 7 ans. Le parti semblait avoir trouvé une formule magique : titiller l’instinct nationalistes des québécois et leur offrir une figure paternaliste à la Duplessis pour les endormir tranquillement.
La pandémie semble aussi avoir habitué le gouvernement caquiste à diriger par décrets dans une période d’unanimisme forcé. Pour une rare fois dans l’histoire politique, le Québec devait intégralement se ranger derrière son premier ministre pour « sauver des vies ». Ce contexte aura donné l’occasion à la CAQ de faire figure de parti unique rassemblant toutes les franges de la société. De cette pandémie, la majorité des partis traditionnels Québécois en sont sortis à l’article de la mort, laissant la CAQ récolter les restes et s’établir solidement à l’extrême-centre du spectre.
De la sorte, toute posture plus audacieuse ou idéologiquement motivée est rayée du plan de match de la CAQ. Le parti est devenu l’incarnation même du « pas de chicane dans ma cabane », de l’unanimisme hypocrite, de la gestion administrative molle et de l’obsession réglementaire. La CAQ est devenu l’extrême-centre : tiède, peu goûteuse, indécise, immobiliste et liberticide.
La CAQ représente désormais la tiédeur de l’existence québécoise, une nation qui semble n’être jamais parvenue à se décider réellement sur son sort et qui s’est rabattue sur la « petite vie » de banlieue et de consumérisme vulgaire. On croyait voir un Duplessis en Legault dans la mesure où il travaillerait à parfaire l’indépendance économique et administrative du Québec, or il lui ressemble plus dans sa manière de s’accrocher au pouvoir coûte que coûte, et à faire de la petite politicaillerie de fond de rang pour s’assurer des votes.
Pas de doute qu’il y ait une ruée des politiciens de carrière vers la CAQ ; ces opportunistes quittent leurs partis comme les rats quittent le bateau qui sombre car ils savent que la CAQ ne leur demandera pas vraiment de compte quant à leur positionnement sur les grands enjeux. Ils n’ont qu’à être Québécois, être au centre, modérés mais pas trop, dynamiques mais pas trop, ambitieux mais humbles, volubiles mais posés… En sommes, ils n’ont qu’à être beige et tout ira bien dans le meilleur des mondes.
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