Préservant encore une façade rassurante face à sa situation, Northvolt était pourtant en pourparlers qualifiés de « difficiles » avec ses investisseurs dans les derniers jours. En effet, voilà quelques mois que le constructeur suédois de batteries est en difficulté et connaît une crise de liquidités ; il doit donc rapidement trouver de nouveaux investissements pour maintenir ses opérations et ses projets d’expansion qui, on le sait, concernent particulièrement le Québec. Or, la situation s’est rapidement dégradé suite à l’élection américaine, et les investisseurs se montrent beaucoup moins optimistes quant à l’avenir de ce secteur industriel.
Plus tôt cette année, l’entreprise avait enregistré de nombreux contrecoups, notamment l’annulation d’un contrat de 3 milliards avec BMW, qui n’était pas satisfait des délais de productions de Northvolt. Ce n’était cependant pas la première tuile à s’abattre sur ce qui était autrefois qualifié de « géant suédois », puisque rapidement, des projets d’expansions ont été annulés et son PDG, Peter Carlsson, a reconnu que Northvolt avait été « un peu trop audacieux dans [son] plan d’expansion ».
Cet automne, l’entreprise se résignait à licencier 1600 employés sur un total de 6500, et reconnaissait des difficultés sur le chantier de son usine géante de Skelleftea, dans le nord de la Suède. Au début du mois d’octobre, nous apprenions que la filiale responsable de ce projet faisait faillite.
C’est donc dans un contexte déjà très difficile que Northvolt entamait des discussions avec ses investisseurs pour obtenir 300 millions de dollars de financement à court terme, ainsi que 10 milliards à long terme, mais la situation depuis l’élection américaine s’est nettement dégradée.
En effet, comme je l’ai mentionné dans un article la semaine dernière, l’élection de Donald Trump, qui souhaite libérer la puissance énergétique américaine, donnera un répit aux voitures à essence pour les prochaines années, ce qui rendra le secteur des voitures électriques beaucoup moins attractif pour les investisseurs. Et c’est précisément le point qui est discuté dans cette cellule de crise entre Northvolt et ses investisseurs.
Bloomberg rapporte effectivement que l’incertitude a gagné les investisseurs, qui doutent maintenant fortement de la croissance potentielle du secteur des batteries :
« Un accord, qui semblait sur le point d’être conclu le mois dernier, a été retardé, selon une personne, en raison de la complexité des négociations entre plusieurs parties et de l’incertitude concernant le marché des voitures électriques. Les négociations sont dans une phase difficile, a déclaré une autre personne. Les investisseurs et les prêteurs n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur un plan de sauvetage malgré de nombreuses propositions, a-t-elle déclaré. Un accord sur les conditions d’un renflouement nécessiterait également un soutien suffisant pour un paquet à plus long terme, a déclaré cette personne.«
C’est une très mauvaise nouvelle pour le Québec, qui a déjà engagé des sommes monumentales dans le projet d’usine à Bécancour. En effet, le gouvernement provincial a promis d’investir un total de 1,37 milliards dans le projet, et le fédéral, 1,34 milliards. Cela dit, nous avons appris récemment que le fédéral s’était mieux préparé à l’éventualité d’un échec en se dotant de garanties, et qu’il n’avait pas encore donné un seul dollar à l’entreprise.
Ce n’est pas le cas pour Québec, qui a déjà investi 710 millions de dollars au total dans l’aventure, dont 240 millions en prêts remboursables pour l’achat du terrain, 270 millions en débentures convertibles pour les « activités préalables » à la construction, et 200 millions sous forme de dette convertible dans l’entreprise mère via la Caisse de dépôt et placement.
Tous ces investissements ne tiennent donc maintenant qu’à un fil, et leur sort sera probablement déterminé à l’issue de cette cellule de crise entre Northvolt et ses investisseurs.
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