Malgré une image encore largement associée à la tranquillité et à la vie communautaire, les régions rurales du Canada présentent un portrait de la criminalité bien plus complexe. Une étude fouillée de Statistique Canada démontre que les taux de criminalité dans ces régions dépassent significativement ceux des zones urbaines, particulièrement dans le Nord des provinces, où la situation atteint des niveaux alarmants.
En 2023, le taux de criminalité déclaré par la police était de 7 317 incidents pour 100 000 habitants dans les zones rurales, soit 34 % de plus que dans les zones urbaines (5 440). Cette tendance est observée depuis plus d’une décennie. Toutefois, l’étude montre que la distinction la plus marquée n’est pas tant entre rural et urbain qu’entre les régions nordiques et méridionales des provinces.
Le Nord rural enregistre des taux presque trois fois plus élevés que le Sud rural (17 546 contre 5 379 incidents pour 100 000 habitants), une disparité que l’on retrouve aussi dans l’indice de gravité de la criminalité (CSI), où le Nord rural atteint un score de 214 contre 77 dans le Sud rural et 76 en milieu urbain.
Les crimes violents constituent 26 % de l’ensemble des délits en milieu rural, comparativement à 22 % en milieu urbain. Le taux de criminalité violente est 1,7 fois plus élevé dans les régions rurales, atteignant 2 126 incidents pour 100 000 habitants. Le Nord rural se démarque encore une fois avec un taux trois fois plus élevé que le Sud rural et quatre fois supérieur aux zones urbaines.
Les femmes et les filles sont particulièrement vulnérables : elles représentent 56 % des victimes de violence en zone rurale, un taux près de deux fois supérieur à celui des zones urbaines. Les violences conjugales et familiales sont aussi largement surreprésentées. En 2023, 51 % des crimes violents dans les zones rurales impliquaient un partenaire intime ou un membre de la famille, comparativement à 37 % dans les villes.
Les crimes violents impliquant une arme à feu sont deux fois plus fréquents en milieu rural (47 incidents par 100 000 habitants). Contrairement aux zones urbaines, où les armes de poing dominent (59 %), les crimes ruraux impliquent davantage des fusils ou des carabines (33 %), ou encore des armes non identifiées ou de type « arme à feu » (39 %). Le Nord rural affiche un taux quatre fois supérieur à celui du Sud rural pour ce type de crime.
Certaines infractions contre les biens comme la fraude, le vol de véhicule ou le vol de moins de 5 000 $ sont plus fréquentes en milieu urbain. Le vol à l’étalage, notamment, y est presque quatre fois plus courant. À l’inverse, l’introduction par effraction est 32 % plus fréquente en milieu rural, atteignant des sommets dans les Prairies, surtout en Saskatchewan et en Alberta.
Les méfaits et troubles de la paix sont la catégorie la plus commune en milieu rural, représentant ensemble 26 % des crimes signalés, comparativement à 14 % en ville. Ces infractions, souvent mineures mais nombreuses, contribuent fortement au volume de criminalité dans les campagnes.
Le portrait des personnes accusées de crimes varie également : en milieu rural, les individus sont en moyenne plus âgés (pic d’accusations à 27 ans contre 15 ans en milieu urbain) et plus souvent connus de leurs victimes. Les femmes représentent aussi une plus grande part des personnes accusées en région rurale (29 % contre 25 % en ville).
L’étude révèle qu’un petit nombre de récidivistes est responsable d’une part disproportionnée des infractions. En 2023, 16 % des accusés en zone rurale étaient impliqués dans trois incidents ou plus, cumulant près de la moitié des contacts policiers.
Entre 2019 et 2023, le taux d’homicide dans les régions rurales était de 2,78 pour 100 000 habitants, contre 1,88 en milieu urbain. Le Nord rural affiche encore une fois le pire bilan (6,9). La majorité des victimes sont des hommes, mais les femmes et les filles y sont davantage représentées que dans les grandes villes (28 % contre 23 %).
Plus de la moitié des victimes rurales étaient autochtones, soulignant le poids des inégalités structurelles et de l’histoire coloniale dans les dynamiques criminelles du Nord. Près d’un homicide sur dix impliquait une personne portée disparue avant le décès, une réalité bien plus fréquente dans les campagnes.
Malgré ces statistiques, les Canadiens vivant en région rurale se sentent globalement plus en sécurité. Selon l’Enquête sociale générale de 2019, 85 % des répondants ruraux étaient satisfaits ou très satisfaits de leur sécurité personnelle, contre 76 % des citadins. Ce sentiment semble résister aux tendances criminelles, même s’il pourrait varier en 2025 avec de nouvelles données à venir.
L’étude conclut que la ruralité canadienne n’est pas homogène : certaines régions rurales sont parmi les plus sûres du pays, tandis que d’autres affichent des taux de criminalité comparables, voire supérieurs, aux quartiers les plus à risque des villes. Le clivage Nord-Sud demeure l’élément explicatif central de cette disparité.
En somme, les réalités policières et sociales des régions rurales exigent des stratégies adaptées, loin des clichés bucoliques. Qu’il s’agisse de violence conjugale, de crimes liés aux armes à feu ou de la criminalité chronique, les zones rurales — en particulier les régions nordiques — nécessitent une attention soutenue de la part des décideurs publics et des services de sécurité.
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