Début de la fin pour le Parti libéral du Québec?

Le Parti libéral du Québec, c’est un peu comme le Titanic. Il est en train de couler pendant que tout le monde tente de quitter le navire. Évidemment, dans un tel contexte, personne ne souhaite se sacrifier pour devenir le nouveau capitaine d’un bateau qui coule. Avec la mise à l’écart du seul candidat à la chefferie des libéraux, est-ce le début de la fin pour le plus ancien parti politique au Québec? C’est ce que nous allons voir.

20 ans nous séparent de l’arrivée au pouvoir des libéraux sous Jean Charest, et la chute brutale du parti dans les intentions de vote chez les francophones. Il s’en est passé des choses depuis une vingtaine d’années. Les libéraux sous Charest ont réussi à provoquer plusieurs crises sociales, dont le printemps 2012. Ils ont diminué le poids du Québec dans le Canada. Ils ont pillé les coffres de l’État tout en démantelant celui-ci au nom des « vraies affaires ».

Comme Paul St-Pierre Plamondon le rappelle dans son livre « Rebâtir le camp du oui », les libéraux sous le régime Charest-Couillard sont à la source de plusieurs problèmes qui secouent le Québec en ce moment. Le déclin du français, l’instabilité politique et économique chronique. Donc, les gens ont raison d’être en colère contre les libéraux. Le seul électorat qui accorde toujours sa confiance aux libéraux, c’est le vote des communautés culturelles et anglophones. Mais même avec eux, nous remarquons une baisse notable du vote en leur faveur.

Même parmi ces communautés, les libéraux n’ont « que » 45% des voix, alors que cela pouvait être plus de 95% à une certaine époque dans certaines circonscriptions du West Island. De nouveaux acteurs ont émergé. Les conservateurs d’Éric Duhaime, qui ne sont pas nationalistes, et Québec Solidaire, qui traite l’indépendance avec dédain. Même la CAQ est vue comme une option tolérable, car « le référendum n’est pas sur la table ».

Quant au PQ, il remonte progressivement dans les régions, et pourrait provoquer la surprise en 2026, car Paul St-Pierre Plamondon est vu comme l’alternative face à un François Legault fatigué qui ne sait pas où il s’en va. Donc, dans un tel contexte, qu’est-ce qu’il reste aux libéraux?

Le vote des communautés culturelles et anglophones n’est plus aussi hégémonique qu’avant, et le vote « francophone » se divise entre quatre partis qui parlent davantage à des segments de cet électorat. Québec Solidaire pour la jeunesse et les électeurs urbains. La CAQ pour la banlieue et les classes moyennes. Le PQ pour les régions et les nationalistes. Ainsi que les conservateurs qui devront tenter de survivre aux prochaines années en trouvant le bon discours en dehors de la pandémie qui a fait renaître ce parti.

Le seul candidat à la chefferie des libéraux, Frédéric Beauchemin, est mis à l’écart pour des allégations de harcèlement psychologique par le chef intérimaire Marc Tanguay. Aucun député libéral censé ne souhaite s’aventurer dans une course à la chefferie qui aboutira au résultat déjà prévisible que les libéraux perdront les prochaines élections. Personne ne se présente en politique pour perdre.

Est-ce possible qu’André Pratte se présente comme chef des libéraux? C’est quelque chose de peu probable. Ou encore le fils de Jean Charest, Antoine Dionne-Charest? Pour cela, le momentum n’est pas là. Pour un parti, un chef c’est la base. Tu ne peux pas mener de campagne électorale sans un chef bien installé. Le PQ fut longtemps victime de cette instabilité chronique. Il aura fallu plusieurs défaites humiliantes pour que les péquistes se décident à faire confiance à un chef et à simplifier la bureaucratie de leur machine politique.

Une théorie avancée par certains, c’est qu’un jour, Gabriel Nadeau-Dubois devienne le chef des libéraux. Mais pour cela, il faudrait qu’il soit contraint de quitter son poste de co-porte-parole du parti. Les résultats sont décevants pour QS. Mais aussi pour GND, le parti libéral est encore trop affairiste pour qu’ils acceptent l’ancien leader des « carrés rouges ». Donc pour le moment, cela est très peu probable. Il faudra que GND soit un vieux politicien encore plus habile qu’actuellement, et qu’il se passe un changement générationnel chez les libéraux pour qu’une telle possibilité se réalise.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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