Des combattants de l’État Islamique aux côtés des soldats ukrainiens?

Est-ce possible?

La présence de djihadistes en Ukraine est attestée. Ce sont des combattants islamistes en provenance de Tchétchénie qui veulent se venger de la Russie.

Des combattants Tchétchènes n’ont-ils pas été envoyés par Vladimir Poutine pour combattre aux côtés de l’armée russe?

Effectivement, mais ce ne sont pas les mêmes Tchétchènes. Ceux qui se battent du côté russe sont issus des forces spéciales de Ramzan Kadyrov, qui dirige la Tchétchénie d’un bras de fer depuis 2005. Il s’agit du régiment Kadyrovtsy, qui fait partie de la garde nationale russe.

Sans entrer dans le détail des guerres post-soviétiques en Tchétchénie, Kadyrov est un autonomiste pro-Russe qui appuie Poutine. Il succède à son père, qui avait renoncé à l’indépendance en échange d’un maximum d’autonomie à l’égard des lois de la fédération de Russie.

Depuis la fin de la seconde guerre de Tchétchénie en 2000, une faction indépendantiste hostile aux Kadyrov [père et fils] continue le combat sous le nom de « République Tchétchène d’Itchkérie ». À noter que les États-Unis ont désigné le groupe comme organisation terroriste en 2003, suivis par l’Union européenne en 2005. La Russie l’a évidemment également classé comme organisation terroriste.

À partir de 2006, l’islamiste tchétchène Dokou Oumarov en est devenu le président. En 2007, Ouramov a proclamé l’« Émirat du Caucase » et s’est lui-même intitulé Émir. Il a revendiqué les attentats du 29 mars 2010 dans le métro de Moscou qui ont fait 39 morts et 102 blessés, ainsi que l’attentat du 24 janvier 2011 à l’aéroport Domodiedovo, qui a fait au moins 35 morts et plus de 180 blessés. Oumarov est mort en 2013, mais ses successeurs réfugiés dans l’Union Européenne et ailleurs continuent d’opérer en exil sous le nom de la « République Tchétchène d’Itchkérie ».

Un groupe djihadiste nommé Ajnad al-Kavkaz a émané de l’ancien « Émirat du Caucase » de Dokou Oumarov. Dirigés par le commandant Rustam Azhiev, ses guerriers sont allés combattre l’armée de Bachar al-Assad et les troupes russes en Syrie après avoir prêté allégeance à l’État Islamique. Les combattants d’Ajnad al-Kavkaz avaient un double incitatif pour participer au conflit syrien: l’appui aux alliés islamistes souhaitant établir un califat et le combat contre l’ennemi domestique russe.

À l’instar du groupe Ajnad al-Kavkaz, les combattants tchétchènes se battant aux côtés des forces ukrainiennes sont sous le commandement de Rustam Azhiev. Il veulent se venger de la Russie et des forces du président tchétchène Ramzan Kadyrov, qui est un allié de Vladimir Poutine. Créé le 29 juillet 2022, le bataillon à vocation spéciale du ministère de la Défense de la « République Tchétchène d’Itchkérie » est une formation militaire de volontaires tchétchènes fonctionnant dans le cadre de la Légion internationale de défense territoriale de l’Ukraine.

Le 18 octobre 2022, le parlement ukrainien a d’ailleurs adopté une résolution reconnaissant la « République Tchétchène d’Itchkérie » comme un territoire occupé temporairement par la fédération de Russie. Les médias occidentaux n’en ont pas fait leurs manchettes.

Cette déclaration fait écho à la reconnaissance de l’indépendance des territoires séparatistes de l’est ukrainien par Moscou en février 2022, à la différence que les Tchétchènes ne sont ni d’ethnicité ukrainienne, ni ukrainophones.

En important le conflit tchétchène sur sol ukrainien, la guerre en Ukraine devient un bourbier de plus en plus inextricable. Qui plus est, ce n’est en rien le combat du Canada. Le rôle d’un gouvernement responsable devrait être celui de médiateur pour faciliter les négociations de paix, pas de choisir un camp et de lui fournir des armes [aux frais des contribuables]. Le PLC qui critiquait autrefois le penchant va-t-en guerre de la droite est celui qui fait faux bond à la neutralité et à la posture pacifique traditionnelle du Canada.