Deux barrages hors fonction depuis 3 semaines!

Nous apprenions par Radio-Canada ce lundi que cela faisait déjà 3 semaines que les complexes hydroélectriques de la Romaine 3 et 4 étaient hors fonction et que les réparations pourraient encore durer des semaines. À la société d’État, on se fait rassurant et on relativise, mais il n’en demeure pas moins qu’il y a probablement une raison derrière ce mutisme prolongé autour de cette situation.

Les bris rendant inopérantes les centrales hydroélectriques de Romaine-3 et Romaine-4 concernent une ligne de transport d’électricité qui serait tombée sur 5 des 180 kilomètres la reliant à Poste Montagnais, sur la Côte-Nord. Ce serait une pluie verglaçante décrite comme équivalente à ce que la région avait reçu lors de la Crise du verglas de 1998 qui serait à l’origine du bris. « 75 millimètres de verglas se sont accumulés sur la ligne, ce qui a fait tomber au sol 14 câbles. Les pylônes ont toutefois tenu le coup. », explique Pascal Poinlane, porte-parole d’Hydro-Québec.

Bien que les câbles, en eux-mêmes, pourraient être réparés plus rapidement, l’accumulation de glace demeure, ce qui ralentit les travaux. Selon Thomas Gerbet, journaliste pour Radio-Canada, Hydro-Québec aurait confirmé que 9 hélicoptères étaient mobilisés afin de briser la glace, en plus de drones, qu’on pouvait voir dans une vidéo récente de la société d’État sur le réseau social X.

« Il faut relativiser »

De toute évidence, la sortie tardive des informations au sujet de ce bris porte à penser qu’Hydro-Québec était peu encline à reconnaître les difficultés encourues. Nous le savons, la société d’État traverse en ce moment de nombreux défis et est particulièrement mise sous pression en raison des politiques de transition énergétique du gouvernement. Chaque nouvelle panne ou difficulté entraîne toujours davantage de scepticisme dans la population.

Et à raison ; on sait déjà qu’en 2022, la vérificatrice générale avait produit un rapport faisant état du piètre état du réseau de distribution d’Hydro-Québec, qui nécessitait un travail monumental de rénovation. Le rapport indiquait aussi une augmentation marquée des pannes et de leur longueur : un phénomène qui n’échappe à personne, et dont on avait un exemple le jour même des révélations au sujet des centrales de La Romaine 3 et 4 ce lundi, alors que 60 000 foyers étaient privés de courant à Montréal.

Dans ce contexte, il est compréhensible qu’Hydro-Québec cherche le plus possible à éviter les controverse sur sa fiabilité, et tente d’évacuer tout souvenir de la Crise du Verglas… Et ça semble relativement fonctionner. Dans un article du Journal de Montréal hier où Poinlane était interrogé, on affirme en introduction que le bris aurait eu lieu lundi, c’est-à-dire au moment où Radio-Canada sortait l’information selon laquelle cela faisait trois semaines qu’il s’était produit (le 19 novembre). De toute évidence, il y a une certaine confusion dans les communications publiques.

Mais le but de l’intervention de M. Poinlane était surtout de « relativiser », selon ses propres mots. En effet, il ne s’agit pas d’un bris majeur, et il n’affecte pas les capacités de production et de distribution d’Hydro-Québec d’une manière tellement significative : « Il faut relativiser. C’est sûr qu’il y a une soixantaine de centrales hydroélectriques au Québec, puis la Romaine 3 et 4, c’est 640 MW sur 37 000 MW ». En outre, le fait que les centrales soient aux arrêts ne leur fait qu’accumuler des réserves d’eau dans les bassins, qui pourront être utilisés plus tard. De la sorte, effectivement, ce bris n’est pas, en soi, une catastrophe.

Insécurité énergétique

Or, bien qu’on puisse se passer momentanément de ces deux centrales, le bris et les réparations qui s’étirent en longueur ne manquent pas d’influencer la perception populaire des Québécois à l’égard de leur sécurité énergétique. Comme nous l’avons mentionné, à une époque où le gouvernement veut tout miser sur l’électrique et bannir toutes sources d’énergies alternatives telles que le gaz naturel ou l’essence pour les voitures, voir que nos lignes de transport sont encore sujettes à des conditions dignes de la crise du verglas en 1998 a quelque chose d’inquiétant. Cette fois-ci, ce n’est que 5 km de ligne, mais qui sait combien de kilomètres seront affectés à la prochaine perturbation météorologique? Veut-on vraiment du tout à l’électrique quand on voit des hélicoptères balancer des billots de bois sur des câbles pendant trois semaines pour les libérer de la glace?

Philippe Sauro-Cinq-Mars

Diplômé de science politique à l'Université Laval en 2017, Philippe Sauro Cinq-Mars a concentré ses recherches sur le post-modernisme, le populisme contemporain, la culture web et la géopolitique de l'énergie. Il est l'auteur du livre "Les imposteurs de la gauche québécoise", publié aux éditions Les Intouchables en 2018.

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