Le documentaire « Garçons, un film de genre », paru en 2023, n’en finit plus de faire la controverse, et étrangement, ce n’est même pas pour son wokisme lourd au sujet des stéréotypes de genre. Encore la semaine dernière, l’une des séquences où l’on voit une gaspésienne relater s’être fait traiter de « plote gaspésienne » et de « sale blanche » lors d’une visite à l’école Pierre-Laporte à Montréal, qui est fréquentée majoritairement par des élèves d’origine arabe, est devenue virale. Dans la foulée, le député Pascal Paradis, de Matane-Matapédia, où se situe l’autre école qui participait à ce documentaire, a repartagé la vidéo sur X, avant de la supprimer. Il se faisait en effet reprocher de jouer le jeu de « l’extrême-droite », notamment à mots couverts par le réalisateur du documentaire, Emmanuel Foglia…
Il faut dire d’entrée de jeu qu’on ne peut réellement blâmer les élèves ou une communauté entière dans cette situation ; s’il y a un blâme à porter, il appartient aux gouvernements, aux décideurs, à certains intervenants des milieux scolaires, aux médias et, d’une manière générale à notre culture civique défaillante. Si on se retrouve avec ce genre de problèmes en 2024, ce n’est pas de la faute des jeunes, mais des adultes et décideurs au Québec qui ont créé ce contexte social communautariste.
Ce qui est réellement choquant de cette histoire n’est même pas le fait que des élèves d’une écoles aient lancé des railleries racistes à des élèves d’une autre, non, c’est plutôt le climat de « gaslighting » massif, qui fait en sorte que même un député doit rétracter son outrage justifié par un « tout va bien aller » naïf et complaisant. Diversité oblige, il ne faudrait plus jamais réagir à rien, ni même aux insultes les plus transparentes.
La banalisation du racisme anti-blanc
Selon un sondage Gallup, aux États-Unis, les relations raciales n’avaient jamais été meilleures qu’en 2013, mais à partir de cette année, où est apparu le mouvement Black Lives Matters et une multitude d’émeutes, les relations raciales n’ont cessé de se déteriorer. C’est aussi à partir de cette époque que montent rapidement les mouvements post-modernistes qualifiés de « social justice warrior », et ensuite, de « wokes ».
En d’autres termes : toutes ces initiatives « anti-racistes » insistant sur les concepts de « privilège blanc », de « racisme systémique » et d’inclusivité, ont eu l’effet complètement inverse qu’escompté, et ont, dans les faits, alimenté une remontée du racisme dans les sociétés occidentales.
Cette idéologie pseudo-scientifique émanant des dynamiques intersectionnelles a propagé l’idée que le racisme contre les blancs est impossible. En effet, on a échafaudé l’idée que le racisme, qui n’est, selon la définition, qu’une discrimination basée sur la couleur de peau ou l’ethnie, serait en fait seulement possible contre des groupes minorisés ou dominés – ce qui exclue les blancs d’office.
Ces mouvances académiques pourraient en soi demeurer inoffensives, mais ce serait négliger à quel point elles sont promues auprès des jeunes, notamment dans des publications Tik Tok au racisme anti-blancs décomplexé.
Bref, croire que ces mouvances idéologiques – que des bien-pensants comme Emmanuel Foglia défendent dans des signalements de vertu ad nauseam – n’ont pas d’influence sur la manière que les jeunes immigrants traitent les jeunes québécois de souche dans nos écoles, ce n’est plus se mettre la tête dans le sable, c’est s’enterrer vivant.
Ainsi, lorsque le documentariste déclare que : »C’était vraiment plus de l’excitation et une manière d’être baveux avec des jeunes d’ailleurs. C’est comme quand j’allais à l’école : tu rencontres un nouveau, tu l’envoies chier. S’ils avaient été noirs, jaunes ou rouges, il n’y aurait pas eu d’importance. », il n’a pas tout à fait tort – tous les jeunes sont susceptibles d’être baveux avec des nouveaux – mais c’est complètement décontextualiser leur comportement qui est, qu’il le veuille ou non, symptomatique d’une normalisation à grande échelle du racisme anti-blancs.
Le directeur de l’école, pour sa part, déclare « Je ne pense pas que ce que l’on voit dans le film est une réaction au fait qu’ils soient blancs. C’est une réaction au fait qu’ils soient des étrangers et qu’il y a des caméras professionnelles qui sont là. » Encore là, il s’agit d’une analyse niaise qui ne prend pas en compte que la notion d’étranger, ici, prend un tout autre sens: c’est parce qu’ils sont en majorité d’origine arabe que ce sentiment d’altérité est aussi fort, et qu’ils n’ont pas de honte à se montrer ouvertement racistes. C’est parce que c’est LEUR école, dans LEUR ville multiethnique, pas celle de ces « Kebs » régionaux… L’appartenance dépasse ici le simple cadre scolaire, il revêt un caractère communautaire.
Prétendre que des insultes racistes ne sont le fruit que d’une excitation juvénile et tenter de les excuser, ce n’est pas de la tolérance, c’est de la lâcheté. Pas de doute que ces jeunes abusent de la naïveté de ce directeur.
L’aveuglement volontaire d’Emmanuel Foglia
Encore plus surprenant de la part du réalisateur est le fait que selon lui, l’objectif de son documentaire était « d’examiner ce qu’est l’identité masculine aujourd’hui et les stéréotypes qui y sont associés », et non pas d’examiner les chocs culturels dans les écoles. (Sa focalisation sur les stéréotypes de genre est d’ailleurs un autre aspect qui rend ce documentaire imbuvable, mais ça sera pour un autre article.)
Or, quelle naïveté peut habiter le documentariste pour qu’il tente si désespérément d’ignorer l’influence énorme de cultures immigrantes demeurées parfois très machistes dans les représentations de la masculinité des jeunes d’aujourd’hui? Que vaut un documentaire qui ne se penche pas sur cet aspect incontournable des représentations sociales de la masculinité, ou en tout cas, qui tente d’étouffer tout débat sur le vivre-ensemble qui pourrait en émaner?
Le professeur d’Éthique et culture religieuse à l’École Pierre-Laporte révèle d’ailleurs qu’il y aurait « beaucoup d’homophobie et de transphobie à l’école
. On le voit chez plusieurs élèves, on le voit encore plus chez plusieurs parents
. » Faudrait-il vraiment faire à semblant que la forte proportion d’élèves d’origine magrébine ou musulmane n’aurait rien à voir avec cette surreprésentation d’homophobie dans cette école? Nous prend-on pour des valises?
Ce n’est pas de l’islamophobie ou de l’intolérance d’être réaliste et de prendre en considération l’homophobie normalisée des cultures musulmanes. Pourquoi serait-ce une si grosse surprise que cette tendance sociale inquiète lorsqu’elle se manifeste ici?
En passant, lorsque des bien-pensants comme Emmanuel Foglia s’inquiètent de la popularité d’influenceurs misogynes comme Andrew Tate, prennent-ils le temps de considérer que ce dernier s’est converti à l’islam parce qu’il jugeait que la religion « avait raison au sujet des femmes »? Je vous laisse méditer ça.
Renversement de culpabilité
Mais là où ce « gaslighting » woke est le plus horrible, c’est dans sa manière de systématiquement renverser la culpabilité vers les « blancs » qui oseraient s’offusquer de ces comportements inacceptables. On s’insurge que les élèves d’une école à majorité arabe fassent preuve de racisme décomplexé devant les caméras (qu’osent-ils faire lorsqu’elles ne sont pas là) et traitent une fille de « plotte gaspésienne » et « d’ostie de blanche », et en retour, on se fait traiter de racistes, d’islamophobe, de gens « d’extrême-droite »… C’est honteux.
Et alors même que cette fille est celle qui a subi du racisme, dans son esprit manipulé par ces idéologies anti-racistes paradoxales, elle se retrouve à voir l’expérience comme un éclairage sur le racisme que peuvent subir les gens de couleur! En effet, elle explique « Il y a du monde de couleur qui vivent ça chaque jour dans leur vie. » Je me suis dit : « Mon Dieu Seigneur, comment ces gens-là sont forts! » Ça m’a juste touchée dans le sens que c’est leur quotidien, pendant que moi, je le vis une fois dans ma vie et ça me fait de quoi. »
C’est une belle preuve d’empathie et de tolérance… mais cette manière de détourner l’attention vers un supposé racisme quotidien des blancs contre les gens de couleur démontre bien la manipulation idéologique profonde que vivent nos jeunes. Ce n’est pas vrai, qu’au Canada, en 2024, les gens de couleurs se font insulter quotidiennement. Le racisme existe toujours, mais prétendre que notre société ressemble à une plantation du sud des États-Unis au début du XIXième siècle est tout simplement absurde. La victime de racisme ici, c’est cette québécoise, pas d’hypothétiques « gens de couleurs » qui vivent des situations sorties tout droit d’un imaginaire militant figé deux siècles dans le passé.
L’idéalisme niais à l’épreuve des exemples empiriques
Il faudra bien un jour se rendre à l’évidence : les multiples exemples, dans le monde occidental ces dernières années, de quartiers ou de secteurs où l’immigration de masse a occasionné une mise en majorité des populations immigrantes se sont tous accompagnés par le même lot d’incivisme, de radicalité et de criminalité. Qu’on regarde en France, en Angleterre, en Belgique, en Suède ; le rejet de la société d’accueil est devenu un problème réel et très concret.
Évidemment, on peut toujours se soulager que le Québec, « ce n’est quand même pas la France », et c’est assez vrai. Nous disposons d’un vaste territoire, et l’Amérique est bel et bien une « terre d’immigration » où, pour le moment, les fractures communautaires ne s’avèrent pas aussi sévères.
Mais tout de même, la réalité révélée par le documentaire d’Emmanuel Foglia, à savoir que certaines écoles au Québec sont désormais majoritairement composées d’élèves d’origine magrébine, devrait naturellement pousser les gens à aller regarder les autres exemples ailleurs dans le monde. Et la triste réalité, c’est que cette situation vient avec son lot de problèmes, dont bien franchement, les insultes racistes sont probablement les moindres. Cependant, elles sont habituellement les premiers symptômes d’un mal plus profond, d’où les partages « alarmistes ».
Les théoriciens du vivre-ensemble peuvent bien idéaliser un monde meilleur tant qu’ils le voudront, mais la réalité, c’est que nous disposons à ce stade d’assez d’exemples empiriques pour démontrer que ces concentrations démographiques de populations immigrantes sont risquées et sujette aux fractures communautaires.
Tout va bien aller
Qu’on me comprenne bien : ce ne sont pas les étudiants de Pierre-Laporte ni leurs familles que je critique ici ; ils ne sont que le produit d’un milieu que nos politiques ont créé. Non, je critique ce gaslighting malsain, cette ambiance bon-enfant et naïve, ce chantage idéologique constant qui nous empêche d’être honnête sur la situation sous peine de passer pour intolérants.
À l’écoute de ce reportage, le contraste entre l’arrivée enthousiastes des jeunes de Matane à Pierre-Laporte et leur départ silencieux est frappant et crève le coeur. Dans les discussions subséquentes, on voit bien qu’en jeunes bien élevés, ils minimisent un peu la situation. Mais ils ne peuvent s’empêcher de revenir de manière un peu amère sur les insultes racistes qu’ils ont essuyés. Et dans tout ça, Philippe Lamoureux, le directeur de l’école, vient leur faire un discours lourd d’euphémismes, réduisant la réaction de ses élèves à l’excitation de voir « une gang de blancs » débarquer… Bien que probablement justifiée pour apaiser les tensions, la scène est franchement à vomir.
Tout de même, le documentaire finit sur une bonne note, avec les élèves de Pierre-Laporte se rendant à Matane pour faire leur visite, qui se déroule à merveille. Évidemment, étant la classe participant au projet, la complicité était probablement attendue, mais les jeunes semblent bel et bien se réconcilier d’une manière constructive. Encore une fois ; ce ne sont pas les jeunes qui sont à blâmer ; la bonté se retrouve chez tout le monde, mais plutôt la tentative de banaliser les propos tenus et leur caractère révélateur dans le cadre de l’enjeu sur l’immigration et celui du civisme dans les écoles.
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