Donnons la chance aux coureurs, car les conservateurs seront de toute façon le prochain gouvernement

Il s’en passe des choses sur la scène fédérale. Pour nous, Québécois, elle est distante, intimidante. Mais ce n’est pas une raison pour autant de laisser le monopole de la Chambre des communes aux intérêts du Canada anglais. Même en tant qu’indépendantistes, nous devrions laisser la chance aux coureurs, car de toute façon, les conservateurs seront bientôt au pouvoir. Voici pourquoi.

Nous avons assisté à une scène surréaliste digne d’un téléroman savon : le Bloc québécois s’est offert pour maintenir au pouvoir, même si ce n’est que pour « quelques mois », le Parti libéral et Justin Trudeau. Les raisons évoquées par Blanchet? Trudeau a un programme, Poilievre n’en a pas. Pourtant, le programme des libéraux, nous le connaissons, trop bien malheureusement.

Il s’agit du gouvernement le plus centralisateur de l’histoire moderne du Canada. C’est un gouvernement résolument hostile au Québec. Avec la complicité du NPD, il a empiété sur nos compétences. Mis encore plus en danger la pérennité de la langue française. Et peut-être même l’existence même du Québec à long terme. Mais voilà, le Bloc estime qu’il faut garder Trudeau au pouvoir pour espérer arracher quelques « gains ».

C’est un cynisme incroyable. Tout le monde au Canada veut qu’on aille en élections, et ce incluant les Québécois. Si Blanchet prétend vouloir défendre les intérêts du Québec, c’est de les faire voter. Et le plus tôt sera le mieux. L’arrogance du Bloc n’est pas surprenante. Mais à ce point? Par exemple, Yves-François Blanchet affirme que les « valeurs conservatrices » ne sont pas celles du Québec. Il est qui pour prétendre la chose? De parler de l’ensemble des Québécois comme un bloc progressiste.

Les conservateurs ont des députés au Québec. Et ceux-ci rejoignent un électorat régional, rural et également dans la région de Québec. Bien sûr, le parti conservateur n’est pas exempt de critiques. Par exemple, quel est le programme de Pierre Poilievre en immigration? Il ne souhaite pas se prononcer. Du moins, il le fait du bout des lèvres. Mais c’est qu’il serait peut-être temps de donner la chance aux coureurs.

Il est difficile de croire qu’un gouvernement Poilievre sera pire que celui de Justin Trudeau. Déjà, les arguments de certains indépendantistes progressistes, comme l’avortement ou le mariage gai, ne seront pas remis en question sous un nouveau gouvernement conservateur. Bien sûr, il y a des tendances sociales dans le conservatisme canadien. Mais Poilievre sait qu’il ne peut pas toucher à ces questions sans une levée de boucliers qui pourrait lui coûter cher.

Il faut se le dire : les conservateurs ne pourront pas faire pire que les libéraux. Justin Trudeau a doublé la dette canadienne accumulée en 150 ans, pendant ses neuf années de règne. Avez-vous plus de services en échange? Non, personne n’a vu la couleur de cet argent. Mis à part des programmes de diversité. Ça oui, le gouvernement libéral est la poule aux œufs d’or pour eux. Mais pour à peu près n’importe qui d’autre, Trudeau, ce sont des dettes, de l’inflation, des logements plus chers, du chômage.

Les indépendantistes devraient être plus prudents dans leur appui même « temporaire » à Justin Trudeau. Ils contribuent par leur action à une montée du cynisme envers les politiciens. Et peut-être même contre l’indépendance. C’est un secret de polichinelle : pour avoir un oui majoritaire, il faut recevoir l’appui des conservateurs de la région de Québec. Cette tendance qui pèse lourd dans la capitale nationale et ses banlieues.

Or, ce n’est pas avec plus de « gauchisme » et de moraline que le Bloc et le PQ pourront s’imposer dans une région où il y a une rivalité entre des travailleurs manuels qui en arrachent, et de l’autre côté, des fonctionnaires gâtés par la sociale-démocratie québécoise. Cela ne veut pas dire qu’ils ne gagneront pas. Mais disons que c’est mal parti s’ils continuent sur cette voie.

Qu’on le veuille ou non, le Canada a déjà fait son choix. Si la tendance se maintient, le prochain gouvernement sera conservateur et majoritaire. Une journée de plus au pouvoir pour Justin Trudeau, c’est encore des problèmes qui ne feront que s’accumuler. Pourquoi ne pas essayer les conservateurs où nous en sommes?

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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