Bonjour Alexandre, merci de nous accorder cette entrevue pour les lecteurs de Québec Nouvelles. Tout d’abord, aimerais-tu te présenter pour nous? Nous raconter brièvement ton parcours jusqu’à maintenant?
Je suis un militant nationaliste canadien-français doublé d’un patriote québécois. Qu’est-ce à dire ?
Je défends l’idée que le Québec est le foyer national des Canadiens français et que ces derniers doivent demeurer majoritaires sur cette terre que leurs ancêtres ont colonisée, défrichée et humanisée à la sueur de leur front. A contrario du patriotisme civique qui a remplacé le nationalisme canadien-français au courant des années 1960, je ne crois pas au fait que le premier venu décidant de s’installer au Québec et parlant français appartient par la magie du sol à la nation canadienne-française. En vérité, le Québec est un État multinational composé de la nation majoritaire canadienne-française, de la minorité historique anglophone, des dix nations autochtones reconnues par l’État québécois et des diverses minorités ethnoreligieuses présentes sur son territoire. Comme le disait le plus grand sociologue québécois Fernand Dumont; s’il y a une société québécoise, il n’y a pas de nation québécoise.
Le contexte d’immigration massive nous fait chaque jour réaliser un peu plus que nous pouvons partager un territoire, et même une langue commune avec des nouveaux arrivants, sans jamais appartenir au même peuple.
Après avoir fait des études en histoire et constatant le marasme intellectuel dans lequel se trouvait le mouvement nationaliste québécois et le manque de courage politique pour aborder de front l’immigration massive qui menace le Québec français, je co-fonde Nomos-TV en 2017. Cette webtélé patriote et nationaliste donne une voix aux patriotes inquiets de la survie de la nation tout en menant un combat culturel contre les forces antinationalistes qui travaillent à notre disparition.
Peux-tu nous raconter comment tu as rencontré ton acolyte Philippe Plamondon avec qui tu as étudié en Égypte? Et qui depuis est ton bras droit dans l’aventure Nomos-TV?
Nous nous sommes rencontrés sur les bancs de l’UQÀM – preuve que cette université peut avoir du bon… – alors que nous étudiions tous les deux la langue arabe. C’est lors d’un séjour en Tunisie en 2010 que nous avons fraternisés et depuis lors cette amitié s’est transformée en aventure intellectuelle puis politique avec la fondation de Nomos-TV.
Lorsque nous écoutons Nomos-TV, ou que l’on suit les échanges sur Telegram, il y a souvent évocation de la « droite Lionel Groulx » ou droite nationale, et la droite de Québec, la « droite Metallica ». D’ou vient cette référence à Metallica et quelles sont les caractéristiques de cette droite?
C’est un fidèle auditeur de Nomos-TV qui a donné la mention de « droite Metallica » au courant plus libertarien et plutôt fédéraliste représenté par les radios de Québec qui utilisent souvent une musique métal pour la présentation de leurs émissions. Nous nous sommes réappropriés le terme afin de distinguer les deux « droites » qui sont souvent à couteaux tirés, notamment sur la question nationale. La « droite Metallica » est souvent hostile au nationalisme québécois qu’elle associe à la social-démocratie, au féminisme, aux syndicats et de façon plus générale à la gauche péquiste. Malheureusement cette critique du nationalisme péquiste se résume parfois à un ethnomasochisme délétère et infécond qui rend quelquefois les positions de cette « droite » totalement compatibles avec le projet canadien postnational de Justin Trudeau.
Comment peut-on rejoindre nous comme nationalistes la « droite Metallica » ou simplement des gens socialement et économiquement conservateurs, mais qui ne sont pas indépendantistes, ou parfois même très hostiles à ce mouvement?
Je crois que beaucoup de gens se sentent au fond comme de réels orphelins politiques, mais contrairement à Paul St-Pierre-Plamondon qui demeure un farouche social-démocrate avant toute chose, les nationalistes de droite se sentent mal, peu ou pas représentés du tout par l’offre politique québécoise. Tandis que le PQ marche sur les deux jambes du culte référendaire et de la social-démocratie, la CAQ demeure un parti de compromis bien insatisfaisant pour de nombreux nationalistes québécois inquiets par l’immigration de remplacement et l’anglicisation du Québec.
L’impopularité de l’indépendantisme tient aussi beaucoup aux échecs référendaires répétés du Parti québécois qui a entraîné la nation dans un cul-de-sac délétère avec cette stratégie perdante. Les Canadiens français sont largement favorables à une plus grande autonomie provinciale sans nécessairement vouloir la sécession du reste du Canada. C’est sur ce sentiment nationaliste du « Québec d’abord » que la Droite nationale québécoise doit miser pour rapatrier à elle les gens hostiles à l’évocation d’un troisième référendum sur l’indépendance du Québec.
Tu penses quoi des indépendantistes de gauche qui voient dans la lutte contre le pétrole albertain l’argument numéro un qu’ils évoquent pour s’affranchir du Canada? Advenant l’élection d’un gouvernement canadien radical sur les questions d’écologie, n’est-ce pas de la naïveté de faire reposer son argumentaire là-dessus ?
La question écologiste n’a strictement rien à voir avec la question souverainiste. Un Québec indépendant pourrait très bien exploiter les ressources naturelles présentes dans son sol comme le gaz naturel ou le pétrole au nom de l’autonomie énergétique. Il est par ailleurs normal que l’Alberta exploite ses ressources naturelles pétrolières puisque son économie repose sur ce secteur. Le fait que le Québec ait misé sur l’hydro-électricité relève plus de la conjoncture géographique que de la vertu écologique et si les Québécois étaient dans la même situation que les Albertains, eux aussi développeraient leur secteur pétrolier sans aucun remord.
Les indépendantistes québécois veulent-il un pays au nom de la lutte aux gaz à effet de serre ou bien parce que la nation canadienne-française doit être maître de son destin sur son territoire national ? Répondre à cette question permet de distinguer les nationalistes des militants en tout genre qui instrumentalisent le patriotisme à des fins politiques qui n’ont pas grand-chose à voir avec l’intérêt national du Québec.
Parlant de clivage gauche-droite, crois-tu qu’au Québec, il y aura un retour du bâton contre la gauche culturelle hégémonique dans nos universités et institutions?
Il est fort possible qu’il y ait une reconquête des cœurs et des esprits mais ce sera un long travail ardu de la part de la Droite nationale pour parvenir à reprendre en main nos institutions, surtout en milieu scolaire. Avec la Révolution tranquille et la démission de l’Église catholique sur les enjeux de société, la quasi-entièreté du champ intellectuel a été accaparé par la gauche marxisante ou socialisante. Toute victoire électorale est précédée d’une victoire culturelle et c’est ce combat que la Droite nationale doit mener pour prendre un jour les rênes de l’État québécois.
Selon toi, est-ce qu’il y a un espoir pour le Québec, ou encore pour le Canada? Selon moi, le Québec a encore un avenir s’il se bouge les fesses, mais pour le Canada, je suis beaucoup plus sceptique. C’est comme si l’état de pourrissement de ce pays était beaucoup plus avancé que le nôtre.
Depuis la création du ministère du Multiculturalisme et du Conseil canadien du multiculturalisme en 1973 sous l’impulsion de Pierre Elliott Trudeau, le Canada a progressivement muté passant d’un pays se réclamant de ses origines britanniques à une laboratoire post-national à ciel ouvert. Le choix de faire reposer la croissance démographique et économique de la fédération sur une immigration de travail devenue immigration de remplacement a transformé graduellement le Canada en un assemblage de diverses communautés ethnoculturelles et religieuses partageant peu de choses en commun. Rappelons que les volumes d’immigration sont tels qu’en proportion de sa population, le Canada reçoit trois fois plus d’immigrés par habitant que les États-Unis ou que la France. Toronto est aujourd’hui une ville composée majoritairement de non-Blancs et la majorité des grandes villes canadiennes seront à majorité composée des « minorités ethniques » vers 2050. Le plan de l’Initiative du Siècle visant à faire du Canada un pays de 100 millions d’habitants en 2100 par l’immigration de remplacement est actuellement scrupuleusement suivi par le gouvernement Trudeau. Notons qu’en noyant le Québec d’immigrés, le fédéral s’assure également de défendre son intégrité nationale puisque la marginalisation démographique des Canadiens français au Québec entraînera la fin des velléités séparatistes québécoises. Par ses choix démographiques, la fédération canadienne entraîne le Québec dans un suicide migratoire que les nationalistes doivent combattre.
Également, est-ce que les nationalistes québécois devraient s’allier aux canadiens de droite ou conservateurs?
Il est à l’avantage des nationalistes québécois d’avoir un gouvernement décentralisateur à Ottawa pour donner plus d’air au Québec, même si sur les enjeux migratoires et identitaires, il n’y a pas grand-chose à attendre du Parti conservateur actuel. Cependant, l’élection de Pierre Poilievre en 2025 pourrait mener à une réduction du financement des organisations d’extrême gauche et des lobbys LGBT, ce qui serait déjà une victoire culturelle mineure face à la folie dépensière et militante du gouvernement Trudeau. Cependant, il faut raison garder : il n’y aura pas de « Poilievremanie » au Québec et les nationalistes devraient voter stratégiquement pour le candidat bloquiste ou conservateur le plus à même de l’emporter sur le candidat libéral selon leur comté électoral. La priorité pour 2025 doit être d’empêcher la réélection de Justin Trudeau.
Selon toi, comment se manifestent les identitaires au Canada anglais? Est-ce seulement en réaction hostile contre le Québec? Ou il existe une vraie droite identitaire là-bas?
Dans son livre Whiteshift : Populism, Immigration and the Future of White Majorities, le politologue Eric Kaufmann explique que le Canada fait figure d’exception dans le monde anglophone par son absence de débat sur l’immigration et l’explique en raison de l’effet repoussoir que provoque les débats identitaires québécois sur le reste du pays. Cela explique la relative absence de débat sur les enjeux d’immigration ou d’identité nationale au Canada anglais. Peut-être que la question de la pénurie de logement que nous vivons actuellement pourrait faire bouger le curseur à droite sur ces enjeux, mais le niveau de remplacement de population est tel à l’ouest de l’Outaouais qu’il est peu probable qu’une critique virulente de l’immigration massive voit le jour pour la prochaine campagne électorale.
Quelles sont selon toi les priorités des nationalistes au Québec pour les prochaines années? Quelle attitude devrions-nous adopter face à la CAQ? Devrait-on les blâmer pour les actions nuisibles ou bien les encourager à aller plus loin avec les lois 21 et 96?
Le rapport des nationalistes à la Coalition avenir Québec est ambigu en raison du fait que ce parti est avant tout le parti de ce qu’il est convenu d’appeler « le compromis canadien-français ». François Legault a eu l’habileté de réunir l’ancien électorat péquiste et l’ancien électorat libéral des régions dans un seul et même mouvement politique, réussissant à tuer l’alternance PQ/PLQ là où Mario Dumont avait échoué au milieu des années 2010. La CAQ est donc toujours mi-figue mi-raisin pour le mouvement nationaliste actuel qui souhaiterait qu’elle utilise son capital politique afin d’aller plus loin dans la défense des intérêts nationaux. Notons toutefois que la division du vote canadien-français a profité pendant plus d’une décennie au Parti libéral du Québec, cantonné aujourd’hui strictement au vote anglophone et immigré. Le système Westminster conçu pour voir s’affronter des Whigs contre des Tories n’a pas été pensé pour représenter une scène électorale multipartite. La division du vote « bleu » au Québec signifierait donc une remontée mécanique des libéraux une fois que ceux-ci auront de nouveau un chef digne de ce nom.
Notons également que l’actuel gouvernement centriste de François Legault représente un moment électoral bien précis avant que la radicalisation de la scène politique québécoise ne se manifeste par le décès des baby-boomers centristes. Demain, dans l’affrontement entre l’alliance d’une partie de l’électorat urbain radicalisé par le marxisme culturel (appelé pudiquement woke par les médias de masse) et des immigrés de secondes et troisièmes générations face à une nouvelle génération de nationalistes beaucoup plus à droite que les précédentes, la CAQ n’aura d’autre choix que de se droitiser ou passer à la trappe de l’histoire.
As-tu un message par exemple pour des jeunes gens qui commencent à s’intéresser à la politique? Des recommandations à leur faire?
Trois choses :
Merci à toi pour ton temps et nous espérons collaborer avec toi à nouveau.
Merci à vous pour l’invitation. Pour vos lecteurs qui seraient intéressés à creuser le sujet de la guerre culturelle de la Droite nationale, je les invite à faire un tour sur https://nomos-tv.com/.
Anthony Tremblay pour Québec Nouvelles
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