Explosion du nombre de passages illégaux vers les USA en provenance du Québec

Bien que le chemin Roxham reste un point d’entrée utilisé par des migrants cherchant à demander l’asile au Canada, la quantité d’arrivées clandestines par cette voie a connu une baisse significative depuis avril 2023, notamment en raison de l’entente sur les tiers pays sûrs entre le Canada et les États-Unis. Ceci dit, le Canada connaît depuis une forte hausse des demandes d’asile aux aéroports et aux divers postes frontaliers. Mais je m’éloigne du sujet, qui est le nombre fulgurant de passages clandestins du Québec vers les États-Unis par le Secteur Swanton.

Le secteur Swanton s’étend de l’extrémité du comté de St. Lawrence dans l’État de New York jusqu’à la frontière entre le New Hampshire et le Maine. Il s’agit d’une section de la frontière entre le Canada et les États-Unis longue d’environ 300 kilomètres, qui correspond au segment qui sépare le Québec et les États de New York, du Vermont, et du New Hampshire. Le secteur comporte de nombreuses zones boisées ainsi que des chemins qui se terminent sans mener à d’autres routes principales et qui ne sont pas surveillés de façon continue.

Selon les données de U.S. Customs and Border Protection, lors de la dernière année, le secteur Swanton a répertorié autant d’interceptions qu’entre 2005 et 2022. Il s’agit de 17,810 traversées clandestines, soit 2 fois et demie davantage que les 6925 en 2023, et 17 fois plus que les 1065 en 2022. En 2021, il y avait eu 365 appréhensions, ce qui correspondait déjà à une par jour, en moyenne. Selon Robert Garcia, l’agent de patrouille en chef, des ressortissants de 97 pays différents ont été interpellés depuis le 1er octobre 2023. Plus de la moitié de ces individus proviendrait de l’Inde.

Certains s’exclameront que si les migrants quittent le territoire canadien par milliers pour s’introduire aux États-Unis, il n’y a pas de problème, voire qu’il s’agit même d’une bonne chose – mais il s’agit d’un raisonnement erroné.

D’abord, parce que tous ces individus non documentés transitent par le Québec. Avant de passer clandestinement la frontière américaine, ils se retrouvent chez nous pour un laps de temps indéterminé. Nous savons très peu de choses au sujet de ces personnes. Certains argueront qu’il peut s’agir de braves gens – mais ce sont quand même des personnes qui ont entrepris un transit migratoire non conforme. Parmi le lot, il y a des passeurs de trafic humain et d’autres criminels.

Un homme qui tentait de faire passer clandestinement neuf personnes aux USA, dont deux jeunes enfants, a récemment été arrêté par les agents de la patrouille frontalière de Richford, au Vermont. Avant de s’introduire illégalement aux USA, le groupe a dû passer par le terrain d’un de nos concitoyens qui donne sur la frontière. Parce que la majorité de ces terrains appartiennent à des agriculteurs, des éleveurs et d’autres propriétaires fonciers. Que ce soit pour transiter dans un sens ou dans l’autre, personne n’a envie de voir un flux quotidien d’étrangers sur son terrain. La situation est d’autant moins rassurante quand elle comporte la possibilité d’activité criminelle.

Pourquoi autant de migrants passent-ils par le Canada pour s’introduire aux États-Unis? Pour plusieurs raisons, mais qui ramènent toutes au laxisme et aux politiques invitantes de l’administration canadienne. Les États-Unis ont des exigences plus strictes que le Canada en matière de visa touristique. Leur processus de demande est plus long et complexe: les ressortissants de nombreux pays doivent passer par un entretien en personne à l’ambassade ou au consulat américain, alors que le Canada offre un processus de demande en ligne. Tandis que les États-Unis appliquent des critères d’admissibilité plus rigoureux, le Canada, en revanche, a adopté un processus plus « inclusif », notamment pour les voyageurs ayant des antécédents criminels mineurs.

Il est plus facile pour une personne de faire une demande d’asile au Canada qu’au Mexique. Le Système d’asile du Mexique est moins développé, moins accessible et surtout moins généreux que celui du Canada. Les ressources pour les demandeurs d’asile y sont limitées, et les autorités mexicaines moins bien équipées pour traiter un grand nombre de demandes. Outre, il est plus dangereux de se trouver en situation irrégulière au Mexique qu’au Canada en raison de la présence de réseaux de trafic humain et des risques de violence posés par les cartels criminels. Le Canada est réputé pour être un pays où les personnes en situation irrégulière peuvent trouver des protections et des recours légaux.

On parle d’une centaine de milliers de nouvelles demandes d’asile au Canada en 2024 [sans parler de ceux arrivés avant]. Il n’est pas impossible qu’un pourcentage des migrants ayant rempli des demandes au Canada tentent quand même de s’introduire aux États-Unis. Au pire, s’ils se font intercepter, ils peuvent toujours se faire renvoyer au Canada – ce qui vaut mieux que d’être retournés au Mexique, advenant qu’ils soient d’abord passés par ce pays.

La gestion irresponsable du flux migratoire [car il ne s’agit pas de simple « immigration »] par les administrations Biden et Trudeau a fait de cette question l’enjeu politique principal. Donald Trump est bien placé pour remporter les élections du 5 novembre, mais peu importe qui sera le prochain président des États-Unis et quel parti détiendra le contrôle de la Chambre et du Sénat, la question migratoire se maintiendra au sommet des préoccupations. Dans ce dossier, le Canada de Trudeau s’est attribué le rôle du mauvais voisin; celui qui laisse passer n’importe qui sur son terrain pour aller camper sur celui du voisin. En l’absence de volonté politique crédible pour s’attaquer au problème de ce côté-ci de la frontière, ça va finir par causer des tensions avec Washington, surtout si les Républicains de Trump prennent le pouvoir. Espérons que nous ne devrons pas attendre jusqu’au 20 octobre 2025 pour avoir l’occasion de se débarrasser du Justin.

Ophélien Champlain

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