Les enjeux énergétiques ont pris le devant de la scène dans les débats politique québécois depuis quelques années. La fin annoncée des surplus d’Hydro-Québec, prévue pour 2026-2027, ainsi que les politiques de transition énergétique en ont fait un enjeu central. Or, on assiste à des débats très étranges et assez décousus de part et d’autre du salon bleu, où règnent des phrases prémâchées et des positions assez boiteuses. Non pas que les politiques de la CAQ ne méritent pas d’être critiquées en ce moment, mais c’est assez étrange pour les partis d’opposition de parvenir à des positions encore pires…
C’est à la lecture d’un article du Journal de Montréal que m’est venu cette impression ; on y parlait des critiques des partis de l’opposition contre la CAQ dans son attribution outrageuse des blocs d’énergie, et particulièrement de celles de Marwah Rizqy, qui accusait le gouvernement d’avoir « dilapidé les ressources financières et énergétiques » du Québec. Sa critique du coup de poker gouvernemental dans des multinationales comme Northvolt a certainement de la poigne : « François Legault a mis le Québec dans le rouge! […] Il a vendu ce qu’il n’avait pas et, maintenant, il nous demande de trouver des solutions à un problème qu’il a lui-même créé. Quel premier ministre nationaliste priorise les multinationales étrangères au détriment d’entreprises d’ici? Certainement pas un premier ministre nationaliste ».
Jusqu’ici, tout va bien, mais son résumé de la situation s’avère n’être qu’un amas de slogans creux : « François Legault fait fi des préoccupations des Québécois et des experts en matière énergétique. Alors que les consultations publiques ont clairement mis en avant la priorité de la sobriété et de la modernisation des infrastructures, le gouvernement persiste à offrir nos ressources à des multinationales, au détriment de la décarbonation locale et de l’efficacité énergétique ».
Qu’on me comprenne bien, c’est assez factuel ; c’est effectivement ce que beaucoup d’experts en politique de l’énergie affirment – révélant par la bande un peu leur jupon. Et c’est d’ailleurs aussi ce que le gouvernement défend, du moins, officiellement. Mais si on gratte un peu, qu’est-ce qu’on entend vraiment par « décarbonation locale » et « efficacité énergétique »? Ce n’est pas un peu fourre-tout, un peu vague comme concept pour justifier sa mise en priorité et la mise sur pause du développement économique?
Pour utiliser des termes un peu moins pompeux, on ne parle ici que de rénovations pour mieux isoler des maisons, pour changer des systèmes de chauffage, des procédés de construction dans les usines, etc. Ce n’est pas une mauvaise chose, évidemment, mais veut-on vraiment nous vendre l’idée de mettre le développement économique sur pause le temps qu’on rénove? Est-ce vraiment ça, le projet de société québécois? Une grande corvée collective?
Car le Plan d’action de Michael Sabia établissait clairement un objectif de n’attribuer que 25% des blocs d’énergie au développement économique, et 75% à ces projets de rénovations vertes – quelles qu’elles soient, apparemment… Devrait-on en conclure qu’en termes d’investissements aussi, on veut mettre 75% du développement économique sur pause, le temps de faire nos rénos? La pizza est-elle incluse entre deux poses de calfeutrant?
Vous comprenez bien que j’exagère un peu, mais le concept de sacrifier notre développement pour des concepts aussi nébuleux n’est pas une farce. La réponse de la ministre de l’Énergie était d’ailleurs tout à fait juste. Admettant le caractère « incontournable » de l’efficacité énergétique, elle rappelait que ce n’était pas non plus la panacée : «Ça fait partie des mesures qu’on doit mettre de l’avant, mais, vous savez, le rehaussement de la demande en énergie est tel que ça ne peut pas être que ça».
Et c’est un peu le problème de ces critiques dans les débats sur l’énergie ; elles semblent toujours se limiter à un évènement précis de la gouvernance caquiste – comme l’attribution arbitraire des blocs d’énergie ou le dossier Northvolt – et ne s’attaquent jamais au véritable problème, qui est le dysfonctionnement inhérent aux politiques de transition actuelles. On critique le gouvernement en train de nous ruiner par ses politiques de transition… parce qu’il ne fait pas assez de politiques de transition! On ne sait pas vraiment ce qu’on veut en fait.
Haroun Bouazzi y va d’ailleurs d’une analyse semblable à celle de Rizqy : « À l’heure actuelle, la CAQ n’écoute ni les experts ni la population. Il serait temps que la CAQ arrête de distribuer des blocs énergétiques aux Northvolt de ce monde et se concentre plutôt sur la décarbonation en adoptant un vrai plan intégré des ressources énergétiques centré sur la sobriété et l’efficacité énergétique »
C’est encore la même récupération des critiques un peu populistes au sujet de Northvolt – auxquelles je souscris – qui se concluent avec les mêmes mots-clés de la glorieuse révolution verte. Je suis pourtant d’accord, aussi, avec cette idée d’un plan intégré, ou du moins, un processus de planification plus formalisé et transparent. Pascal Paradis, du PQ, demande pour sa part le retrait du projet de loi 69 sur l’énergie et de « véritables » consultations sur l’avenir énergétique du Québec. Je ne suis pas contre non plus, mais toutes ces positions, répétée ad nauseam par nos perroquets de politiciens et experts, rate complètement le point.
L’origine de cette confusion apparente et de ces prises de positions contorsionnistes par les partis, c’est que les problèmes énergétiques du Québec forment une sorte de cercle vicieux : nous allons manquer d’électricité bientôt, mais on considère quand même le tout à l’électrique comme une priorité. De la sorte, on doit augmenter notre production d’une manière phénoménale et construire de A à Z un parc industriel pour des transports « verts », ce qui nous prive, d’encore plus d’énergie et enrage les écolos. Et on se retrouve avec des Bouazzi de Québec Solidaire qui se plaignent que le gouvernement investisse dans Northvolt, une entreprise de batterie pour des voitures électriques, plutôt que dans la « vraie » décarbonation. Une surenchère de phrases creuses…
Il faut cesser de tomber dans ces réflexions circulaires où « il faut consommer moins d’électricité » mais en même temps, « il faut tout convertir à l’électrique », et où « on veut décarboner » mais « on ne veut pas d’usine de batterie étrangère ». Il faut cesser ce règne de l’oxymore… La vraie solution, ce n’est pas de démêler ce fouillis qu’est la transition énergétique, c’est de s’en libérer. La solution, c’est de cesser cette folie liberticide de transition forcée et d’électrification prématurée et laisser le marché développer des alternatives de manière organique. À la veille des déficits énergétiques, il faut impérativement lever le bannissement insensé des hydrocarbures et, par leur développement, refinancer nos institutions, nos services et, qui sait, s’il en reste un peu, les énergies vertes.
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