On le sait, partout en Occident, depuis quelques années, on a vu l’émergence de mouvements politique dits « populistes », habituellement associés à la droite nationaliste. Malgré le fait que la CAQ de François Legault soit désormais accusée de « suivre le nouvel ordre mondial » par une bonne partie de cette mouvance depuis la pandémie, il faut se rappeler que Legault était accusé de frayer avec cette tendance liée au Trumpisme, en 2018, notamment en raison de sa fermeté dans l’application de la loi sur la laïcité, son côté un peu paternaliste et son opposition au wokisme.
Or, si le populisme est habituellement caractérisé par un focus particulier sur les enjeux des gens du peuple et peut parfois dériver dans un côté un peu sensationnaliste, il semblerait qu’au Québec, nous ne récoltions que cette seconde option. La CAQ et ses représentants ont l’air de mousser cyniquement des évènements culturels et sportifs dans une logique électorale usée.
Panem et circenses (du pain et des jeux), disaient les romains pour parler de cette tendance à manipuler « la plèbe » en lui offrant des spectacles et du pain bon marché. N’est-ce pas un peu le cas aujourd’hui?
C’est un peu l’impression qu’on a en voyant la subvention de 5 à 7 millions de dollars de la part du gouvernement pour faire venir les Kings de Los Angeles à Québec l’an prochain pour qu’ils jouent deux matchs de hockey. Il semble qu’il n’y ait jamais de limites à engraisser les poches de l’organisation de milliardaires qu’est la LNH. Même après un amphithéâtre carrément construit pour eux, on continue de tenter d’attirer son attention comme de vrais cocus méprisés.
Et tout cela, même dans un contexte économique difficile où les Québécois ont de la misère à joindre les deux bouts. Le contraste risque d’être frappant entre la place Jean Béliveau et les files interminables devant la banque alimentaire de la Bouchée généreuse, juste en face… D’ailleurs, les négociations stagnent pour leur trouver un nouveau local, alors tous ces pauvres gens devront probablement passer l’hiver à attendre dans le froid.
Mais on le sait, le hockey, c’est notre sport! En bon mononcs, les caquistes aiment bien se montrer près du peuple et organiser des « games ». Surtout pour la région de Québec! Puisqu’on a réalisé que le troisième lien était un véritable cirque de faux-semblants, il faut bien gaver la population de « shows » et de « gros party »! Pauvre eux, même le tramway est une farce! Il faut bien leur donner quelque chose!
Et puis à peu près en même temps, on a eu la triste mort de Karl Tremblay, chanteur du groupe mythique Les Cowboys Fringuants, qui a vraiment secoué le Québec. Loin de moi l’idée de remettre en doute la profondeur du deuil qui a pu être éprouvée dans nos sphères politiques, mais en 2023, à l’ère des réseaux sociaux, la limite entre l’hommage et la récupération est très mince.
On a donc eu un malaise face à Bernard Drainville, le ministre de l’Éducation, actuellement aux prises avec une grève de grande ampleur dans le secteur, qui a décidé de chanter Toune d’Automne au complet dans un point de presse. Entre bris de décorum, fausses notes et l’aspect « sorti de nulle part », mettons qu’on a le choix.
Mais c’est aussi l’intérêt du gouvernement d’offrir à l’artiste des funérailles nationales qui a rendu des gens sceptiques. Certes, la légende entourant les Cowboys Fringuants n’est plus à refaire. Certes, c’est un pilier de la culture québécoise des dernières décennies. Mais on a rapidement remarqué que de nombreuses légendes culturelles québécoises n’ont pas reçu un tel honneur.
Ce n’est pas pour enlever quoique ce soit au chanteur Karl Tremblay, mais beaucoup de gens semblent oublier depuis quelques jours que les Cowboys Fringuants, c’est avant tout un groupe, et que la majorité des chansons ont été composées par Jean-François Pauzé. Or, on semble en faire un personnage plus grand que nature, comme s’il était le seul génie derrière le groupe… Mais soyons honnête, c’est surtout la tristesse de le voir partir si tôt qui accentue sa légende en ce moment.
Bref, mon point n’est pas de dire que la CAQ devrait ignorer les évènements culturels et sportifs et seulement se pencher sur des sujets austères et arides, mais simplement qu’on sent souvent de la récupération politique dans ses décisions. Le parti et été maintes fois accusé de gouverner aux sondages, et cette tendance transparaît aussi dans sa manière de réagir et stimuler ce genre de spectacles.
Il ne devrait pas y avoir de problème à célébrer notre culture, mais dans un contexte où on demande aux citoyens de faire des brassées de lavage la nuit, où la ministre de l’Habitation ne connaît pas le coût moyen d’un loyer à Montréal, où les classes politiques se votent des augmentations de 30% et dilapident des fonds publics dans des restaurants de luxe alors que des grévistes peinent à se faire entendre, les excentricités populistes de la CAQ passent mal.
Il faudrait quand même faire comprendre à Legault que les jeux, c’est très bien, mais sans le pain, ça l’est un peu moins.
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