Nous le savons, le Canada vit en ce moment une période extrêmement difficile sur le plan économique. La reprise post-pandémique est famélique, l’inflation a explosé, on vit une crise du logement inédite causée en grande partie par une immigration incontrôlée qui met aussi de la pression sur nos services, les gouvernements s’acharnent à rendre l’énergie dispendieuse dans leur grande croisade idéologique contre les hydrocarbures, et pourtant, on a certains corps professionnels qui jugent que c’est le bon moment pour en demander encore plus et prendre la population en otage. À ce stade, si les syndicats avaient peu de sympathie dans la population générale, ils semblent s’acharner pour s’assurer qu’elle tombe définitivement à zéro.
Paralyser une économie déjà moribonde
En effet, c’est la troisième fois cette année que le pays en entier voit son économie paralysée par des syndicats qui occupent un secteur clé. Nous avons eu un lock-out des chemins de fer en août, qui a complètement mis aux arrêts le transport vital de marchandises partout au pays. Nous avons eu, plus récemment en novembre, une grève des ports, encore une fois partout au pays, qui a paralysé nos capacités d’exportations. Et maintenant, non contents d’avoir ralenti notre économie déjà moribonde, on a un syndicat qui semble déterminé à gâcher le Noël de tous les citoyens sans exception, en paralysant les services postaux, qui devraient habituellement être dans leur période la plus achalandée de l’année.
Alors qu’il est intervenu pour imposer un arbitrage dans le cas des chemins de fer et des ports, puisque le Canada, une économie basée sur la production de ressources et l’exportation, ne peut se permettre de prolonger telles paralysies, le gouvernement fédéral déclare encore ne pas avoir l’intention d’intervenir dans le conflit de travail de Postes Canada. Disons qu’au regard des conséquences absolument dévastatrices de cette grève, il serait à peu près temps qu’il change d’avis là-dessus.
On apprenait récemment que cette grève, qui dure depuis 25 jours, avait déjà coûté 1,5 milliard aux petites et moyennes entreprises canadiennes. On évalue qu’elle leur ferait perdre 76 millions de dollars par jour pendant ce dernier droit avant le temps des fêtes, qui représente habituellement entre 25 à 40% de leurs recettes annuelles.
Et c’est sans compter le coût humain de prendre les colis d’une population qui en arrache déjà en otage, au risque de ruiner leur temps des fêtes, le seul moment de célébration dans l’année pour beaucoup d’entre eux.
Les syndiqués sont-ils meilleurs que les autres?
On a habituellement une sorte de sympathie pour les employés qui se battent pour de meilleures conditions de travail ou pour avoir un salaire décent. On peut bien comprendre qu’avec l’inflation, beaucoup de corps professionnels se battent pour préserver leurs acquis, et s’assurer que leur salaire suit l’inflation. Mais franchement, quand l’ensemble de la population vit les mêmes problèmes et qu’elle voit qu’un corps professionnel abuser de son énorme levier de négociation sur son dos, l’empathie vire à l’aversion complète.
Qui pourrait réellement s’émouvoir des salaires des employés de Postes Canada alors qu’ils sont en train de faire risquer la faillite à des PME? Qui pourrait réellement les plaindre de cette intention par Poste Canada de les faire travailler les fins de semaine alors qu’une bonne partie de la population le fait pour joindre les deux bouts?
Les employés de Postes Canada réalisent-ils que TOUTE la population en arrache en ce moment, et que ce n’est pas la faute exclusive de leur employeur?
Qui a vraiment encore de la sympathie pour les syndicats lorsqu’ils s’attaquent frontalement à nous, les citoyens, pour faire valoir leurs revendications au gouvernement?
Prouver sa propre vétusté
D’ailleurs, la raison pourquoi Postes Canada veut commencer à livrer les fins de semaines, c’est pour demeurer compétitif dans un marché de plus en plus dominé par les services intégrés de livraison tels qu’Amazon. À l’heure de « l’ubérisation » de la société, du magasinage virtuel, et des services en ligne, il semble évident que les services postaux doivent s’adapter à cette nouvelle réalité. C’est simple : la poste n’est plus aussi importante qu’elle ne l’était par le passé, et elle a beaucoup plus de compétiteurs.
Évidemment, dans un tel cas de figure, pour maintenir sa pertinence, Postes Canada tente de devenir plus flexible et plus agressif dans ses horaires de livraison, et ça implique de ne pas dormir sur sa bédaine pendant les fins de semaine comme des fonctionnaires, alors qu’Amazon Prime va jusqu’à vous poursuivre en drône dans la fôret vierge pour vous livrer dans les temps promis. (Je viens d’inventer ça, mais vous comprenez l’image…).
En faisant cette grève catastrophique, Poste Canada aura probablement forcé de nombreux Québécois à faire affaire avec Amazon ou les compétiteurs au lieu de Postes Canada, consolidant encore davantage leur avantage concurrentiel. Du moins, pour les fêtes de 2024…
La réalité, c’est que si cette industrie veut survivre, elle devra accepter des mutations profondes dans ses fonctionnements dans les prochaines années, et ne pas agir comme des parvenus assis sur leurs conventions collectives qui coulent avec le bateau.
Bref, c’est d’autant plus frustrant de les voir prendre la population en otage lorsqu’on réalise qu’ils se battent pour une chimère et contribuent encore davantage aux problèmes de leur propre industrie.