La montée et la chute politique de Maxime Bernier

Cela fait neuf ans que les libéraux de Justin Trudeau dirigent le Canada et l’usure du pouvoir est en train de les frapper de plein fouet. Alors, cela sent la fin de régime à Ottawa.  Les conservateurs de Pierre Poilievre ont réussi à se positionner comme solution de rechange au gouvernement libéral. Selon QC 125, si les élections avaient lieu aujourd’hui, c’est un tsunami conservateur qui frapperait le Canada. Le PCC obtiendrait 43% des voix avec 212 sièges contre seulement 25% des voix et 72 sièges pour le PLC. En conséquence, Pierre Poilievre a réussi à séduire des libéraux centristes et à coaliser presque tous les conservateurs sous la bannière du PCC.

Alors, le Parti populaire a vu ses appuis drastiquement baisser depuis que M. Poilievre est le chef des conservateurs. Auparavant, certains conservateurs, mécontents du centrisme d’Erin O’Toole, s’étaient réfugiés au Parti populaire du Canada. Cela a permis à Maxime Bernier d’obtenir 5% des voix, mais il n’a pas fait élire de députés. Maintenant, le PCC a un véritable conservateur comme leader. Donc, le PPC risque de disparaître du paysage politique canadien. Maxime Bernier risque de sombrer dans la marginalisation et il n’aura que lui-même à blâmer si cela se concrétise.

Il faut se rappeler que le Beauceron a été député conservateur de Beauce de 2006 à 2019. Ce dernier a été ministre de l’Industrie, des Affaires étrangères et ministre d’État de la Petite entreprise et du Tourisme. C’est à l’Industrie que M. Bernier s’est démarqué en procédant à la réforme de l’industrie des télécommunications. Mais, ses déboires aux Affaires étrangères lui ont coûté son poste de ministre. Il avait oublié des documents confidentiels chez sa petite amie de l’époque Julie Couillard. Sa réputation en a pris un coup. Après cela, le premier ministre Harper lui a offert un ministère junior.

Les conservateurs ont perdu le pouvoir en octobre 2015. Stephen Harper a démissionné de ses postes de premier ministre et de chef du Parti conservateur du Canada. Maxime Bernier s’est lancé dans la course au leadership conservateur. Il était le favori et son principal adversaire était son collègue de l’Ouest Andrew Scheer.

Le député de Beauce a centré sa campagne sur ses idéaux et valeurs conservatrices : une réduction de la taille de l’État fédéral, une baisse du fardeau fiscal des contribuables et des entreprises, le remboursement de la dette fédérale, l’exploitation des ressources naturelles, le retour à l’équilibre budgétaire en deux ans, l’abolition du CRTC, etc. Il prônait des idées qui auraient pu séduire les membres du PCC. Mais, il a fait une promesse ambitieuse : éliminer le système de gestion de l’offre sur les produits agricoles. Il en a fait une obsession et il s’est mis à dos les producteurs laitiers du Canada. Il faut reconnaître que le Beauceron a eu du courage de proposer une telle mesure qui allait à l’encontre du statu quo qui prédominait dans les rangs conservateurs sur ce sujet. Par contre, M. Bernier aurait dû se concentrer sur des mesures conservatrices plus consensuelles. Les Producteurs de lait du Canada ont fait campagne contre lui et cela lui a probablement coûté la victoire.

En effet, Maxime Bernier a perdu la course au treizième tour de scrutin et Andrew Scheer est devenu le nouveau chef du Parti conservateur du Canada. Malheureusement, l’élu de Beauce a refusé de travailler avec M. Scheer. Alors, il a quitté le PCC et formé le Parti populaire du Canada. En faisant cela, Maxime Bernier a prouvé qu’il n’était pas un joueur d’équipe, mais un idéologue solitaire intransigeant.

Il a positionné son parti très à droite sur l’échiquier politique et cela n’a pas eu de succès. Lors des élections de 2019, il a perdu son poste de député de Beauce. Sans élus, la marginalisation allait frapper ce parti de plein fouet. Aux élections de 2021, le parti de M. Bernier a obtenu 5% des voix et il a subi une défaite dans son coin de pays.

Maintenant, le PCC est dirigé par un véritable conservateur, Pierre Poilievre. En conséquence, le PPC est devenu un groupuscule qui attire les ailes plus radicales et marginales du mouvement conservateur : la droite sociale et les identitaires. Maxime Bernier est devenu un adepte de l’identitaire et du conservatisme social afin de séduire le seul électorat qui lui reste. Autrefois, il défendait les idées libertariennes comme le libéralisme classique et la réduction du rôle de l’État dans la société. Maintenant, il a un discours anti-immigration et défend les idées du conservatisme social. Par exemple, lors d’un débat, à l’émission de Mathieu Bock-Coté sur QUB radio, l’opposant à Ian Sénéchal (du podcast Ian et Frank), il a dit clairement que les entreprises préconisent une hausse de l’immigration car ils veulent de la main-d’œuvre à bon marché. Cela va clairement à l’encontre du discours pro entrepreneuriat que M. Bernier défendait lorsqu’il était ministre dans le gouvernement Harper.

Pour conclure, Maxime Bernier s’est grandement marginalisé depuis 2019. Après le triomphe de M. Scheer, il aurait dû rester au Parti conservateur du Canada afin de faire avancer ses idées de l’intérieur. Mais, il a décidé d’être un mauvais perdant et de faire cavalier seul. Il a fondé son propre parti à son image. Mais, ce fut un échec retentissant. Maxime Bernier est le chef d’un parti politique ultra-marginal qui n’a pas réussi à s’implanter dans le paysage politique canadien. L’ancien député de Beauce a fait une grosse erreur. S’il était resté au PCC, il serait une des figures marquantes du caucus québécois du Parti conservateur. De ce fait, il aurait pu faire avancer ses idées au sein du PCC. Mais, il a décidé de faire cavalier seul. Son avenir politique semble sombre et il n’a que lui-même à blâmer. Ce dernier est condamné à la marginalisation et son parti va rejoindre les défuntes formations politiques dans le cimetière politique canadien.

Simon Leduc

Ancien éditeur en chef du Prince Arthur Herald et ex-blogueur au Huffington Post Québec. Chroniqueur pour le journal Contrepoids et blogueur.

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