La place des politiciens est-elle sur les réseaux sociaux?

À Montréal, un nouveau restaurant nommé Belle Afrique a un succès inattendu grâce aux réseaux sociaux. Le « Fufu sauce graine » étant leur plat emblématique, il n’en fallait pas plus pour que se dessinent des tendances sur TikTok, avec son lot d’influenceurs et de politiciens en manque d’affection pour s’y rattacher. François Legault s’est fait filmer par le Tiktokeur Antony Tran en train de manger ce plat que personne ne connaissant il y a de ça quelques semaines. On en vient à se demander : la place des politiciens est-elle sur les réseaux sociaux? Et de surcroît avec des influenceurs? La réponse courte : non. La réponse longue : non, mais… Analyse

Avec la baisse généralisée du quotient intellectuel en Occident, l’omniprésence des écrans qui réduisent l’attention à celle d’un poisson rouge, il n’est pas étonnant que les politiciens soient obligés de se tourner vers les réseaux sociaux pour se mettre en valeur. En 2008, Barack Obama est le premier président américain élu grâce à une campagne moderne sur les réseaux sociaux. C’est alors l’âge d’or de Facebook et Twitter. Une ère où tout était possible.

Or, il s’est écoulé plus de 16 ans depuis. Les gens ont vieilli depuis. Les plateformes aussi. Selon de nombreuses études, le temps d’écran chez les gens fait qu’ils ont davantage de difficultés à se concentrer, en plus d’exacerber les problèmes de vue. D’où la popularité foudroyante des formats courts comme ceux de TikTok, qui ont ensuite donné naissance à des équivalents sur Instagram, Facebook, YouTube.

François Legault, qui sait probablement qu’il ne sera pas réélu, utilise les réseaux de « jeunes » comme TikTok pour montrer une image sympathique de lui. Mais c’est comme cet oncle à Noël qui essaie de paraître comme un adolescent attardé. La sauce ne prend pas. Quant au réseau social des « vieux », Facebook pour ne pas le nommer, on y voit des annonces régulières, suivies d’un flot ininterrompu de commentaires négatifs.

La transparence n’est pas le point fort des politiciens sur les réseaux sociaux. On aimerait s’attendre à plus de contenu qualitatif, comme de répondre sans détour aux questions des journalistes, qu’à des pitreries. Bien sûr, les élus ont le droit d’avoir des loisirs comme tout le monde. Mais est-ce vraiment le moment pour François Legault de manger devant une caméra un « Fufu sauce graine » (ça ne s’invente pas)?

De toute façon, on a presque envie de dire que François Legault n’intéressera pas la jeunesse ni qu’elle votera pour lui. Il sera toujours vu comme cet oncle un peu lourd qui donne de beaux cadeaux de Noël, mais qui est incapable d’avoir l’air sérieux et de reconnaître son incompétence.

La réponse courte à la question si les politiciens doivent prendre d’assaut les réseaux sociaux est non. La réponse plus longue est toujours non, mais que dans dans certains cas, les réseaux sociaux peuvent être utiles pour documenter un parcours politique et donner l’heure juste. Par exemple, donnons à Paul St-Pierre Plamondon ce qui lui revient de droit. Celui-ci fait filmer toutes ses interventions dans les universités, mais aussi ses conférences de presse. Il n’y a pas de coupure. Pour la transparence, ça mérite la note de 100%.

Les libéraux vous proposent sur les réseaux sociaux une gourde d’eau en échange d’un don. Québec Solidaire s’est essayé au rap et n’a récolté que du mépris (bien mérité). Donc, de voir un politicien provincialiste comme François Legault s’improviser critique culinaire pendant que la corruption s’infiltre partout dans les failles de l’État et que les services sont difficiles d’accès, c’est un manque de respect pour les citoyens. En 2008, les réseaux sociaux, c’était quelque chose de « révolutionnaire ». Maintenant, la formule est usée. Il faudrait que nos politiciens trouvent autre chose à faire de leurs temps libres qu’à chercher les clics des jeunes.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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