L’Afrique du Sud : un État failli sur le bord de l’effondrement

L’Afrique du Sud est officiellement une démocratie ayant aboli la ségrégation raciale depuis 1994. Lorsque Nelson Mandela a pris le pouvoir après 27 ans d’incarcération, les attentes étaient élevées dans le pays le plus inégalitaire au monde entre les riches et les pauvres. Pourtant, près de 30 ans se sont passés depuis la prise du pouvoir par l’African National Congress (ANC), et le pays s’enfonce toujours plus profondément dans la crise. Qu’est-ce qu’il se passe dans ce qui était considéré jadis comme le pays le plus développé d’Afrique? Et comment ils en sont arrivés là? Analyse de la situation d’un pays pas comme les autres par son histoire et ses divisions internes.

Le célèbre youtubeur SerpentZA, qui est l’un des premiers à avoir consacré sa chaîne à la vie en Chine lors des débuts de la professionnalisation du site, est originaire d’Afrique du Sud. Dans une vidéo récente, il explique comment le pouvoir sud-africain, concentré depuis 1994 dans les mains de l’ANC, n’a rien fait pour moderniser le réseau électrique construit durant les années 50. Essentiellement produite par des centrales à charbon, l’énergie en Afrique du Sud est sûrement l’enjeu majeur dans ce pays multiethnique.

Ce n’est pas l’argent qui a manqué pour moderniser le réseau, mais c’est la corruption de l’ANC qui est telle qu’elle détourne des milliards de dollars dans les poches des membres de la famille des dirigeants du pays. Et cela continue encore aujourd’hui. Pendant que quelques oligarques corrompus se partagent les richesses de l’État sud-africain, les habitants voient des coupures de courant intermittentes se succéder.

Par exemple, l’électricité peut être coupée 12 heures par jour, par tranches à chaque fois de quelques heures. De 9h à 12h. De 16h à 19h… vous comprenez. Et ça, c’est dans les régions relativement développées du pays. Certaines n’ont pas cette chance d’avoir de l’électricité au moins quelques heures par jour. L’économie du pays est entravée par ces coupures. Les restaurants et les commerces sont dans l’incapacité de fonctionner.

Un restaurant a besoin de conserver les produits périssables au frais, et il faut bien utiliser l’électricité pour faire cuire la nourriture. C’est pour ça que beaucoup de commerces ont fermé. Et que les autres n’en ont plus pour longtemps. Les génératrices coûtent extrêmement cher, et peu ont les moyens d’en acheter, surtout qu’il faut de l’essence pour les faire fonctionner, ce qui n’est pas évident dans un pays qui est en pénurie de carburant.

L’Afrique du Sud, c’est aussi une des populations les plus pauvres de la planète. 50% de la population ne travaille pas. Cela fait plusieurs millions de personnes qui doivent trouver de quoi survivre au jour le jour. Et qu’est-ce que cela produit? Des crimes. Toujours plus de crimes. À Bali, des Sud-Africains me racontaient que l’on pouvait se faire tuer dans la rue pour avoir exhibé son téléphone portable. Le pays compte parmi les pires statistiques au monde en matière de meurtres, de viols et de policiers tués en devoir.

Alors, comment peut-on affirmer que les BRICS vont mettre à mal les colonnes de l’empire américain? L’Afrique du Sud étant « membre » de cette « alliance », on voit mal dans ce cas comment elle peut tirer son épingle du jeu. Les compagnies d’assurance refusent désormais de couvrir les pertes des assurés en cas d’effondrement total du réseau électrique. Qui demeure une possibilité. Imaginez Mad Max avec ses bandes criminelles qui se battent pour un peu d’essence. C’est quelque chose qui pourrait arriver à l’Afrique du Sud d’ici peu.

Pourtant, plusieurs personnes célèbrent le « déclin » de l’Occident et voient dans les BRICS un rival de taille contre l’hégémonie américaine. Cette « alliance » est en réalité pilotée par la Chine, qui ramasse en déconfiture les autres « membres » : la Russie est à risque d’éclater en plusieurs États, un peu comme l’URSS en 1991, le Brésil traverse une phase d’instabilité, l’Afrique du Sud est au bord de l’effondrement. Seule l’Inde peut un peu se comparer à la Chine. Mais ces deux pays entretiennent une rivalité depuis l’indépendance de l’Inde en 1947.

Il est possible que dans les prochains mois, si ce n’est pas déjà le cas, que la Chine vienne à la « rescousse » de son allié sud-africain. Et qu’il mette sous tutelle ses entreprises d’État, et qu’il mette la main sur les ressources naturelles du pays. Triste destin pour un pays qui avait l’avenir devant lui.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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