L’Afrique subsaharienne, «nouvel épicentre» de l’extrémisme selon les Nations Unies

Traduit de l’anglais. Texte de Geoffrey York paru le 8 février 2023 dans le Globe and Mail.

Le nouvel épicentre mondial de l’extrémisme islamique violent est l’Afrique subsaharienne, où les gens adhèrent de plus en plus en raison de facteurs économiques et moins pour des raisons religieuses, indique un nouveau rapport de l’agence de développement international de l’ONU.

Une augmentation significative de 92% des nouvelles recrues des groupes extrémistes les rejoignent pour avoir de meilleurs moyens de subsistance par rapport aux motivations des personnes interrogées dans un précédent rapport publié en 2017, selon le rapport du PNUD publié mardi.

La vie de nombreux Africains a été gravement affectée par la pandémie de COVID-19, l’inflation élevée et le changement climatique, indique le rapport.

Selon ce même rapport, le nombre de personnes rejoignant des groupes extrémistes pour des raisons religieuses a diminué de 57 %.

Près de 2 200 personnes ont été interrogées pour le rapport dans huit pays africains : Burkina Faso, Cameroun, Tchad, Mali, Niger, Nigeria, Somalie et Soudan. Plus de 1 000 personnes interrogées sont d’anciens membres de groupes extrémistes violents, qu’il s’agisse de recrutements volontaires ou forcés, précise le rapport.

Au moins 4 155 attaques à travers l’Afrique ont été documentées depuis en 2017, a indiqué le rapport. Dans ces attaques, 18 417 décès ont été enregistrés sur le continent, la Somalie comptant le plus grand nombre de victimes.

Le gouvernement somalien mène actuellement ce qui a été décrit comme l’offensive la plus importante contre le groupe extrémiste al-Shabab depuis plus d’une décennie.

Les personnes interrogées sont issues de divers groupes extrémistes du continent, notamment Boko Haram au Nigeria, al-Shabab en Somalie, qui a prêté allégeance à Al-Qaida, et en Afrique de l’Ouest Jama’at Nusrat al-Islam wal Muslimeen, ou JNIM, qui est allié au groupe État islamique.

«L’Afrique subsaharienne est devenue le nouvel épicentre mondial de l’extrémisme violent avec 48 % des décès dus au terrorisme dans le monde en 2021», a déclaré Achim Steiner, administrateur du PNUD, lors d’un point de presse précédant le lancement du rapport.

Cette montée de l’extrémisme en Afrique «a non seulement des répercussions négatives sur les vies, la sécurité et la paix, mais menace également de réduire à néant les progrès durement acquis en matière de développement pour les générations à venir», a-t-il déclaré.

Les campagnes militaires visant à éradiquer l’extrémisme ne s’avèrent pas fructueuses, a déclaré M. Steiner.

«Les réponses antiterroristes axées sur la sécurité sont souvent coûteuses et peu efficaces, mais les investissements dans des approches préventives de l’extrémisme violent sont terriblement insuffisants», a-t-il déclaré. «Le contrat social entre les États et les citoyens doit être revigoré pour s’attaquer aux causes profondes de l’extrémisme violent».

Environ 71 % des personnes qui ont rejoint des groupes extrémistes ont été influencées par des violations des droits de l’homme commises par les forces de sécurité de l’État, telles que l’assassinat ou l’arrestation de membres de leur famille, indique le rapport.

Les forces de sécurité de certains pays subsahariens ont été accusées de brutalité et d’exécutions extrajudiciaires, et la faiblesse des systèmes judiciaires donne aux victimes peu d’espoir d’obtenir justice, selon le rapport.

[…]

«La recherche montre que ceux qui décident de se désengager de l’extrémisme violent sont moins susceptibles de rejoindre et de recruter d’autres personnes», indique le rapport.

«C’est pourquoi il est si important d’investir dans des incitations qui permettent le désengagement», a déclaré Nirina Kiplagat, spécialiste du PNUD en matière de prévention de l’extrémisme violent en Afrique. «Les communautés locales jouent un rôle central dans le soutien des voies durables de sortie de l’extrémisme violent, parallèlement aux programmes d’amnistie des gouvernements nationaux».

Le rapport du PNUD recommande d’améliorer les services de base, notamment la protection de l’enfance, l’éducation et les moyens de subsistance de qualité, afin d’empêcher les gens de rejoindre volontairement les groupes extrémistes. Il préconise également de créer davantage de possibilités de sortie et d’investir dans des services de réadaptation et de réintégration à base communautaire.

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