Depuis quelques années, un mouvement écologiste radical multiplie les coups d’éclats en Europe et en Amérique du Nord. Dans un alarmisme apocalyptique revendiquée, les militants de « Last Generation » n’hésitent pas à commettre des actions illégales telles que bloquer des aéroports ou asperger des bâtiments et des oeuvres d’art de peintures ou autres liquides. Ils font des demandes extrêmement radicales au gouvernement sous la forme d’ultimatums et aspirent même à modifier les processus décisionnels en environnement par des assemblées populaires – une mesure de nature quelque peu idéaliste, voir carrément anarchiste. Vincent Benatar a voulu en savoir plus sur ce groupe militant et son organisation. Portrait.
Cet article couvre Last Generation Canada, un groupe écologiste radical sinistre et tellement obsédé par ses vision apocalyptiques qu’il en vient à ressembler à un culte de la mort. Ce groupe commet des actes criminels tels que des blocages et du vandalisme, dérangeant des citoyens ordinaires et se justifiant au nom de la protection de l’environnement. Ils ne sont que le chapitre canadien d’une structure se répétant dans quasiment tous les pays occidentaux. Leurs soutiens et leurs financement sont puissants.
Leurs actions
L’action ayant stimulé ma curiosité en premier lieu est celle ci: deux militants ont lancé de la peinture sur l’aéroport YUL de Montréal.
Après, j’ai aussi vu passer cela, une espèce d’action militante bizarre et psycho-sexuelle, me rappelant les stratégies étranges utilisées par PETA :
J’ai donc décidé de creuser. Heureusement pour moi, ils sont plutôt coopératifs question documentation sur leur site internet, d’où j’ai pris la majorité de l’information pour cet article.
Mais d’abord, faisons un tour de piste. Juste en 2024, ils ont :
06/02: Ottawa: Mis une poussette en feu sur la colline du Parlement
07/02: Ottawa: Bloqué la rue Wellington (où il y a le Parlement fédéral) pendant qu’une de leurs militantes faisait des graffitis le bureau du Premier Ministre avec leur signature classique en peinture rose. 5 arrestations
08/02: Ottawa: Un militant lance de la peinture sur un squelette de dinosaure dans le Musée Canadien de la Nature.
18/03: Sherbrooke: Des militants interrompent un souper du Parti libéral du Canada, où se trouvent des membres du Parlement.
04/04: Montréal: Des militants interrompent une conférence du président de l’aéroport YUL.
12/04: Montréal: Des militants interrompent un discours de Pierre Poilievre.
28/05 Ottawa: Des militants bloquent l’autoroute 417. 3 Arrestations.
09/06: Montréal: Le Pont de la Concorde est bloqué à Montréal par des militants afin de déranger le Grand Prix. 5 arrestations
14/06: Ottawa: Des militants se filment devant la résidence de Justin Trudeau, lui lançant un “ultimatum” pour qu’il rejoigne le traité de non-prolifération des énergies fossiles, sous peine d’avoir à faire face à des actions coordonnées à l’international. (On reviendra sur ce point plus tard.)
16/06: Montréal: Disruption d’un événement de campagne de Pierre Poilievre
23/06: Toronto: Des militants courent en plein milieu du Centre Rogers pendant un match des Blue Jays contre les Yankees de New York. 2 arrestations.
24/06: Montréal: Blocage de la route menant à l’aéroport YUL.
25/06: Montréal: Peinture lancée sur l’aéroport YUL.
26/06: Montréal: Blocage de la route menant à l’aéroport YUL.
27/07: Montréal: Des militantes se couvrent de pseudo-pétrole au centre-ville.
De ces actions, nous pouvons tirer quelques conclusions.
1- Les militants sont concentrés dans l’axe Montréal-Ottawa, les seules actions en dehors de cette zone étaient pour des évènements spécifiques: un souper avec des parlementaires à Sherbrooke et un match de Baseball. Ils semblent n’avoir aucune présence dans l’ouest canadien.
2- Les militants sont prêts à crier après Pierre Poilievre et des parlementaires libéraux, mais leur vrai “disruption” se fait aux dépens de citoyens ordinaires utilisant leur auto pour se déplacer, ou des gens ayant payé très cher pour prendre l’avion.
Leurs demandes
Mais que veulent-ils ? En tout cas, sur leur site, leur langage est assez radical.
Leur ultimatum, directement adressé à Justin Trudeau, repose sur trois demandes :
Ces demandes sont, disons-le, extrêmes. Bannir les énergies fossiles serait une attaque frontale contre la classe moyenne. Les voitures électriques sont encore très loin du prix abordable pour les classes populaires.
Les assemblées citoyennes, selon leur site, seraient des assemblées de gens “semi-aléatoirement” sélectionné et formé par des experts* qui prendraient des décisions pour mieux refléter les besoins de la communauté. J’ai du mal à imaginer que des gens sélectionnés aléatoirement reflètent leur vision extrême de l’environnementalisme, d’où l’astérisque après « formé par des experts ». Il faut lire entre les lignes “des gens totalement soumis à notre vision”.
Un réseau global
Donc, des extrémistes utilisent des méthodes illégales pour forcer une vision radicale de l’environnementalisme, qui détruirait notre économie et notre classe moyenne. Un problème certainement, mais pas de quoi s’inquiéter si ce n’était vraiment qu’une simple bande d’étudiants d’extrême gauche. Ce n’est malheureusement pas le cas.
Last Generation Canada fait partie du Réseau A22, réunissant des groupes similaires et très actifs dans plusieurs pays.
Vous vous rappelez sûrement d’une nouvelle à l’international ou des extrémistes similaires ont aspergé de la peinture sur la Mona Lisa, au Louvre. Il viendra sans surprise que cette action a été commise par Riposte Alimentaire, la branche française de ce mouvement.
Plus grave encore, leur branche allemande a réussi à bloquer l’aéroport de Francfort pendant des heures, annulant 170 vols. Cela viendra sans surprise, mais en fouillant un peu, on découvre que le réseau Oil Kills, associé à A22, s’associe également avec Stay Grounded. Un autre groupe écologiste radical militant pour une réduction du transport aérien (lire entre les lignes: éliminer le transport aérien).
Dans leurs propres mots
Pour mieux les comprendre, j’ai décidé de leur poser quelques questions. Après certaines démarches je suis rentré en contact avec Jacob Pirro, qui s’est identifié comme le porte-parole francophone du groupe.
1. Pas en tant que représentant du groupe, mais en tant qu’individu. Qu’est ce qui t’as poussé à rejoindre Last Generation? Et comment les as-tu découvert?
J’ai appris à connaître Last Generation Canada à travers des amis de confiance qui m’ont initié à la campagne. Je milite au sein de cette dernière puisque je crois en la nécessité d’avoir des actions directes non-violentes afin de pousser nos gouvernements à agir pour le bien de leurs citoyens. C’est bien entendu la responsabilité du gouvernement et s’il ne fait pas son travail, il est de notre devoir d’agir. Je suis également certain qu’il est nécessaire d’avoir un système démocratique qui représente réellement les besoins de sa population plutôt que de laisser notre sort au mains de gouvernements et d’entreprises qui ne pensent qu’avec leur portefeuille.
2. On peut s’entendre qu’il est normal de manifester contre le gouvernement lorsqu’on est en désaccord. Cependant vos tactiques vont explicitement déranger des citoyens ordinaires. Considérez vous ces citoyens comme faisant partie du problème?
Absolument pas. Je crois que nous avons été forcés par nos systèmes défaillants à suivre des règles qui agissent contre notre bien collectif. Les entreprises pétrolières, gazières, minières et autres sont responsables de l’urgence climatique actuelle (en plus de l’inaction gouvernementale quant à la destruction de nos écosystèmes). Un exemple flagrant de manipulation est le concept d’empreinte carbone individuelle, qui a été popularisée par British Petroleum afin de détourner l’attention de cette dernière et de la rediriger sur nous-mêmes. Je trouve absurde qu’on finisse par se dire « si je ne recycle pas parfaitement, l’urgence climatique est ma faute » considérant les émissions de GES des entreprises qui ne recherchent que le profit.
3. LGC est la branche canadienne d’un mouvement international, les branches françaises et allemandes notamment ont fait beaucoup parler d’elles. Quel est votre degré de coordination avec vos homologues étrangers.
Nous discutons afin d’apprendre des erreurs et des succès de différentes campagnes à l’international. Last Generation Canada a l’immense avantage de pouvoir apprendre des tactiques des autres et de partager des conseils de sécurité avec des activistes engagés à travers le monde.
4. Vos demandes parlent d’assemblée citoyenne légalement contraignantes mais comment est ce en votre intérêt si on considère la probabilité que des citoyens choisis aléatoirement ne soit pas d’accord avec vos demandes/mesures
Des études prouvent que 3 canadiens sur 4 approuvent la demande de Last Generation Canada de mettre en place une agence fédérale de pompiers forestiers. Il est vrai qu’il se peut que des citoyens choisissent autrement que notre volonté mais dans tous les cas, nous respectons la démocratie représentative que met de l’avant cette structure décisionnelle directe. Nous avons confiance que le canadien moyen, contrairement aux gouvernements remplis de lobby, tient à sa qualité de vie aussi bien qu’à la qualité de son air.
5. Vous êtes une organisation para politique non officiellement associée aux partis politiques officiels. Mais avez-vous des liens au premier ou au deuxième degré avec des partis?
Nous n’avons aucun lien avec des partis politiques officiels. Il peut être possible que certains partis soient en accord avec nos demandes mais nous ne sommes pas en communication. Nous travaillons afin de mettre les chances de notre côté d’un point de vue climatique et pour qu’on ne revoit plus de tragédies comme celle d’une pompière de 19 ans qui a perdu la vie dû à l’inaction de nos gouvernements quant à la crise des feux de forêt. Nous croyons que le réel pouvoir se doit de revenir au peuple, à celles et ceux qui risquent de tout perdre dû à la situation d’urgence climatique actuelle.
*La capture d’écran originale de cette entrevue est ici.
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Somme toute, j’ai trouvé les réponses de Jacob honnêtes et, si je dois être honnête, convaincantes. Je dois même dire que je suis agréablement surpris par sa réponse par rapport au respect des conseils citoyens même si ceux- ci vont à l’encontre de leurs objectifs.
Je conclus que, du moins en ce qui concerne leurs relations publiques, Last Generation est capable de garder un visage humain et sympathique quand on approche le contact humain, ce qui est pourtant très contraire à leur site internet, portant un ton sévère et apocalyptique, ainsi que leurs actions dérangeantes comme bloquer des autoroutes.
Mon côté cynique dirait que c’est parce qu’ils savent être sur la limite de ce qui est toléré par la population générale et sont conscients de ce qu’ils ne peuvent se permettre, mais ma partie plus empathique me dit que ces militants sont sincères dans leur inquiétude par rapport à l’environnement. Je pense qu’une part de responsabilité pour la vision apocalyptique va au système d’éducation et comment il formule les questions environnementales. Mais il y a des individus dont la responsabilité est encore plus lourde, évidemment.
Leur financement
Bien que les militants de Last Génération semblent principalement composés d’étudiants universitaires. Ils ne sont pas seuls dans leur combat. En effet, bien que très peu de monde les aient vu, ils ont réussi à obtenir le temps et l’attention du militant écologiste David Suzuki, le réalisateur hollywoodien Adam McKay, et le journaliste John Vaillant, qui fait des webinars.
Ce qui nous intéresse ici, par contre, c’est leur source de financement. Voici ce qui est indiqué sur leur site :
Vous pouvez donner à LGC mensuellement ou spécifiquement à un fond pour leur défense légale. Mais sinon ne vous inquiétez pas, ils reçoivent du financement du Climate Emergency Fund.
Le Climate Emergency Fund est un organisme fondé par deux héritières de familles américaines puissantes: Rory Kennedy (sœur de Robert Kennedy Junior) et Aileen Getty, dont la famille travaille, ironiquement, dans l’industrie pétrolière.
Évidemment, ce n’est pas ces riches héritières qui vont aller se gluer les mains sur une piste d’atterrissage, non. C’est une stratégie plutôt habile : envoyer des étudiants de classe moyenne sans histoire prendre des casiers judiciaires, ça évite le scandale que ça ferait dans les nouvelles si les riches faisait la sale besogne eux même… Cela dit, ce sont eux qui sont ultimement responsables. Sans eux, les militants de terrain seraient facilement découragés par les problèmes judiciaires qu’ils auraient.
Mais vraiment, vulgarisons au plus simple: des milliardaires encouragent des étudiants de la classe moyenne a bloquer votre voiture sur la route, paient pour leur défense légale, et des fois ça va assez loin que ça empêche des aéroports de fonctionner. Ça peut paraître négligeable, mais accumulé à la longue; c’est très grave.
Conclusion
Nous avons longtemps laissé les militants de la décroissance définir le discours quand il vient parler de l’environnement. Ce laissez-faire a maintenant dégénéré et nous avons des militants qui sont prêts à fermer des secteurs de notre économie pour que le gouvernement répondent à leurs demandes.
Notre prospérité économique n’a pas à être prise en otage par des groupes radicaux et nous n’avons pas à tolérer l’existence de groupes supranationaux utilisant des tactiques illégales.
La plupart des gens proposeraient des tactiques plus agressives pour punir les militants. Mais je ne suis pas de l’avis que ça réglerait le problème. Le vrai problème est plutôt le fait que des héritières et des célébrités hollywoodiennes les encourageant à commettre des crimes et leur épargnent les conséquences en payant pour leurs frais juridiques. Et dans un monde ou ces écolos exécutent toutes leurs demandes, ce ne sont pas ces hauts placés qui ont déjà une fortune qui vont payer pour les désagréments. Ce sont les gens de la classe moyenne et ouvrière, qui vont perdre leurs emplois et voir leur mobilité sociale tirée vers le bas. Pour une solution efficace face à ce problème, il faut que les différents États-nations dans lesquels ces organisations sont actives s’unissent et s’en prennent directement aux criminels qui ont organisé et financé ce racket international.
Nous n’avons pas à ruiner notre futur pour que des élite libérales soignent leur conscience.
PS : Last Génération Canada se fait appeler “Dernière Génération Canada” sur l’onglet français de leur site. Cependant, malgré leur présence à Montréal et la présence de leur onglet français; leur communication est quasi exclusivement en anglais, leur onglet français est moins développé que leur onglet anglais (certaines sections ne sont même pas traduites Le représentant à qui j’ai donné une entrevue a aussi nommé l’organisation Last Generation. Considérant le caractère très “Canadian” de leur organisation, j’ai jugé plus pertinent de les appeler par leur nom anglophone.
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