Avec la récente attaque de drones iraniens en Israël dimanche dernier, de nombreux commentateurs ont réduit l’évènement à des représailles plus ou moins justifiées pour répondre au bombardement du consulat iranien à Damas par l’armée de l’air israélienne le 1ᵉʳ avril. Comme beaucoup de conflits dans cette région, chercher à identifier un coupable ou un évènement déclencheur des hostilités revient un peu à la fameuse question de l’œuf ou la poule. Les tensions géopolitiques au Moyen-Orient sont anciennes et extrêmement complexes, on ne peut les simplifier par des évènements si récents.
Très vite, les craintes d’embrasement de la région menant à une guerre de grande ampleur ont fusé de partout, certains spéculant que nous nous approchions dangereusement d’un conflit mondial. Il est donc nécessaire de rassurer un peu les gens ; malgré l’ampleur inédite de cette attaque par l’Iran, les dégâts en Israël sont demeurés assez limités, preuve que leur fameux « bouclier anti-missile » fonctionne plutôt bien.
Des Israéliens ont même rappelé que les jeunes ne se sont même pas empêchés de sortir en boîte et vaquer à leurs activités habituelles alors que le ciel s’illuminait d’explosions, signe que la résilience de l’État Hébreu est toujours forte.
Cet évènement est néanmoins un rappel de l’expansion massive des activités militaires et de l’influence de l’Iran dans la région depuis une décennie.
Il faut comprendre que lorsqu’on fait référence à l’attaque du consulat iranien en Syrie sans aucun contexte, on donne l’impression d’une attaque gratuite, de la violation sans fondement d’un territoire et d’un bâtiment diplomatique inoffensif. Il faut d’abord comprendre que la présence iranienne en Syrie n’a rien d’anodin ; les régimes syriens et iraniens sont alliés et l’Iran utilise la Syrie comme une base pour mener des opérations terroristes et militaires contre Israël.
Mais la Syrie n’est pas le seul pays où la République islamique d’Iran mène des opérations hostiles. Depuis plus de dix ans, il a considérablement accru sa présence dans de nombreux pays et régions contrôlés par des autorités chiites dans ce qu’on a fini par désigner comme le « croissant chiite ».
D’abord, le terme chiite désigne une branche de l’islam qui s’oppose au sunnisme, qui est pour sa part majoritaire dans le monde musulman. La majorité des chiites se retrouvent en Iran et en Irak, mais il y a des poches chiites un peu partout en Asie centrale, en Turquie, en Syrie, au Liban, autour du golfe Persique et au Yémen.
L’Iran est donc la principale puissance chiite dans le monde, et depuis sa révolution islamique en 1979, il fait tout en son pouvoir pour exporter son modèle révolutionnaire islamiste.
Mais c’est surtout à partir de la guerre en Irak et des printemps arabes que commencent à s’ouvrir de véritables opportunités d’expansions pour cet État que beaucoup qualifient de « terroriste ». En effet, la chute de Saddam Hussein, un Sunnite, permet à la majorité chiite d’Irak de prendre le pouvoir, ce qui profite évidemment à l’Iran. Ensuite, la continuation de la guerre civile sous l’État terroriste Daech et le vide laissé par le retrait américain consolide cette présence iranienne, qui vient alors soutenir le gouvernement chiite basé à Bagdad.
Pour ce qui est de la Syrie, les chiites y sont minoritaires, mais Bachar Al-Assad et son régime sont chiites. C’est donc la minorité chiite qui règne sur une majorité sunnite. Si le régime, à priori, ne suit pas l’exemple révolutionnaire islamiste iranien, mais s’avère plutôt moderniste, la guerre civile et l’abandon total des puissances occidentales viendra consolider une plus grande collaboration avec l’Iran qui se porte à son secours.
Pour ce qui est du Liban, le régime est multiconfessionnel, mais son importante minorité chiite bénéficie d’un soutien de longue date de la part de l’Iran, d’abord lors de la guerre civile de 1975 à 1990, et ensuite, dans ses multiples guerres contre Israël. Le pays est utilisé d’une manière extensive par le Hezbollah, un groupe terroriste chiite fortement financé par l’Iran.
Plus récemment, nous avons vu une guerre civile éclater au Yémen et des activités de piraterie intenses dans le golfe d’Aden. Encore une fois, ce conflit oppose des rebelles chiites Houthis, supportés par l’Iran, et le gouvernement sunnite supporté par des États sunnites tels que l’Arabie Saoudite.
Et c’est sans parler du Hamas, dans la bande de Gaza, lui aussi soutenu par l’Iran et qui est responsable de l’attaque terroriste en Israël le 7 octobre dernier.
Ainsi, on peut donc en conclure que l’Iran mène une série de guerres interposées dans tout le Moyen-Orient pour raffermir son influence. Et au travers de toutes ces guerres civiles, il a su placer ses pions et se constituer une sphère d’influence qu’on qualifie de « croissant chiite ». Partout dans cette région, il peut organiser des attaques militaires ou terroristes contre les pays qu’il considère ses ennemis.
À de multiples reprises, les dirigeants de l’Iran ont affirmé ouvertement vouloir « rayer Israël de la carte » ; ce n’est donc pas sans raison qu’Israël voit d’un mauvais œil sa présence en Syrie et au Liban, avec lequel il partage des frontières communes. Et le fait que l’Iran finance et organise des activités terroristes depuis ces pays explique des frappes occasionnelles contre ses installations.
Bref, on peut reprocher bien des choses à Israël, mais il ne faut pas pour autant sous-estimer le danger que représente le régime de la République islamique d’Iran dans la région.
D’ailleurs, il est important de mentionner que lorsqu’on entend les analystes et les représentants du gouvernement américain dire qu’ils ne souhaitent pas d’escalade entre les forces armées américaines et l’Iran, et que cela occasionnerait une flambée guerrière potentiellement incontrôlable, on tâche bien de laisser sous silence que dans les faits, des groupes terroristes financés et soutenus par l’Iran ont attaqué plus de 160 fois des bases américaines de la région juste en ce début d’année. C’est déjà une escalade de violence inédite qui donne l’impression que la « guerre froide » entre l’Occident et l’Iran est beaucoup plus chaude qu’on le pense.
Pour finir, soulignons qu’ici, au Canada, de plus en plus de voix se font entendre pour qu’on classe le Corps des gardiens de la révolution islamique comme entité terroriste. En effet, cette organisation paramilitaire qui opère en parallèle de l’armée régulière iranienne a pour fonction de protéger le régime et réprimer les dissidents, mais étends aussi ses activités dans le terrorisme international et les ingérences.
Nous avons une enquête sur les ingérences étrangères en ce moment au Canada, et il est à noter que l’Iran est deuxième suite à la Chine en termes d’activités d’ingérences sur notre territoire et de nombreux agents qui dépendent directement des gardiens de la Révolution opèrent en toute impunité sur notre territoire..
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