L’auteur de cet article, qui tient à rester anonyme, travaille dans le milieu financier.
Le Gouvernement du Québec, qui aspire à positionner le Québec comme un leader de la transition énergétique nord-américaine, a investi massivement dans des entreprises innovantes du secteur de l’énergie comme Northvolt, Lion Électrique et Taiga Motors. L’objectif de décarbonation est certes louable, mais c’est la nature de ces investissements qui suscite des interrogations parmi les Québécois. En effet, les fonds publics sont attribués à des entreprises encore jeunes dans leur développement, souvent fragiles et vulnérables. Analysons cette situation avec rigueur, pour déterminer si le gouvernement et ses différents organismes parapublics ont trop d’appétit pour le secteur de l’énergie verte.
1. Northvolt :
Le gouvernement du Québec a engagé un montant total de 2,9 milliards de dollars pour l’implantation de l’usine de batteries de Northvolt. Cet investissement comprend un prêt de 240 millions de dollars pour l’acquisition de terrains au Québec, une prise de participation de 420 millions de dollars, ainsi qu’un investissement potentiel supplémentaire de 300 millions de dollars lorsque la construction débutera. De plus, des subventions potentielles pourraient atteindre jusqu’à 4,6 milliards de dollars sur une période de 9 ans. L’investissement du gouvernement québécois dans Northvolt est sans aucun doute une tentative de positionner la belle province comme un des leaders mondiaux dans la fabrication de batteries pour véhicules électriques. Cependant, cette entreprise reste jeune et expose les finances publiques à des risques financiers considérables en raison des fluctuations des prix des matières premières et de la forte concurrence du marché asiatique dans ce secteur. Bien que le potentiel de retour sur investissement existe, le fait que Northvolt connait déjà des difficultés massives dans leurs productions et déjà entamé une ronde de licenciement important, ne peut pas être ignoré.
2. Lion Électrique :
Le gouvernement a accordé, via Investissement Québec et d’autres partenaires, des prêts cumulés dépassant 100 millions de dollars pour soutenir la production de batteries et de véhicules électriques. En plus de ces prêts, le gouvernement a investi près de 90 millions USD dans Lion Électrique par l’intermédiaire d’Investissement Québec, du Fonds de solidarité FTQ et de Fondaction. Les performances actuelles de Lion ne sont pas à la hauteur des attentes, les ventes sont en baisse et la production est en retard sur les prévisions. L’entreprise continue d’enregistrer des pertes financières malgré une position prometteuse dans son industrie. Le prix de l’action de l’entreprise avait atteint 24,67$ l’action en 2021, aujourd’hui à 0,88$ l’action, on peut en déduire que les investisseurs sont pessimistes de manière croissante. À moins d’un renversement de situation très surprenant, il est fort probable que cet investissement soit considéré comme un échec.
3. Taiga Motors :
Le gouvernement québécois, par le biais d’Investissement Québec, a octroyé un financement de 30 millions de dollars sous forme de prêt, dont 6 millions de dollars sont potentiellement annulables selon les conditions du programme ESSOR. En parallèle, Taiga Motors a également levé 40,15 millions de dollars supplémentaires sous forme de débentures convertibles, dont 15 millions de dollars ont été souscrits par Investissement Québec Les startups dans ce domaine présentent toujours un risque élevé de défaut de paiement, surtout lorsque les volumes de production sont inférieurs aux attentes. En 2023, Taiga ne produit que 500 unités, ce qui soulève des questions sur l’efficience de production de la compagnie, en plus de leur plus récent bilan qui montre qu’il reste environ 2,5 millions dans leurs coffres. Le marché des véhicules récréatifs électriques n’a pas montré de signes de croissance rapide jusqu’à présent, ce qui fait de Taiga une entreprise fragile. Le prix de l’action de Taiga a atteint 7,5$ l’action en 2021 et est aujourd’hui à 0,22$ l’action. Encore une fois, avec ces données, cet investissement présente des signes d’échec.
Les investissements du gouvernement québécois dans des entreprises comme Northvolt, Lion Électrique et Taiga proposent des risques élevés. Même si la transition énergétique est une priorité, ces entreprises n’ont pas atteint les performances attendues. Ces investissements se basent sur l’hypothèse que le secteur de l’énergie verte connaitra une croissance exponentielle, cependant il y a une bulle spéculative dans ce secteur créé par les gouvernements des pays occidentaux qui imposent des mesures pour accélérer leurs transitions énergétiques. On peut constater que la valeur intrinsèque des compagnies était beaucoup plus basse que la valeur qui a été payée par le gouvernement, donc le gouvernement a ainsi investi dans du « hype » tel un investisseur amateur. Le problème, c’est qu’il s’agit de somme colossale et de l’argent des contribuables durement gagné par les travailleurs québécois. En investissant dans un secteur aussi spéculatif, le gouvernement s’expose à des pertes potentielles importantes et il devient essentiel de se demander si ces sommes ne seraient pas mieux investies ailleurs. En effet, la bulle spéculative entourant l’énergie verte ne doit pas occulter les réalités financières de ces entreprises jeunes et fragiles. On peut en conclure que le gouvernement doit avoir une approche plus prudentielle avec l’argent publique et évaluer avec fermeté les risques avant de s’engager dans des projets de la sorte.
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