Le Parti communiste révolutionnaire, « rebranding » moderne d’un passé révolu

Si vous vous promenez dans les rues d’une grande ville, vous avez peut-être vu ces affiches : on y voit Karl Marx, pointant du doigt comme l’oncle Sam, qui vous enjoint de militer au Parti communiste révolutionnaire. On peut y voir quelque chose de folklorique, presque drôle, si ce n’était pas du fait qu’ils sont probablement un siècle en retard. Réflexions sur le « communisme » au Québec et son avenir.

Si vous avez fréquenté le Cégep ou l’Université, autour des années 2000-2012, vous avez sûrement déjà vu de drôles de types militer dans l’association étudiante. Souvent d’éternels étudiants, ils avaient de 24 à 28 ans, alors que la moyenne d’âge dans un Cégep doit osciller autour des 18 ans. Ils vendaient du rêve : le socialisme pour tous, rien de moins!

Cependant, ils avaient de bien gros défauts, comme d’abuser allègrement des budgets de l’association étudiante, puisés à même les cotisations semestrielles obligatoires. La photocopieuse était pour eux un moyen d’imprimer « gratuitement » affiches et propagandes. Bien sûr, rien n’est gratuit dans la vie, car quelqu’un paie toujours en fin de compte. Lire ici : les étudiants qui ne militent pas pour le parti.

Bref, à l’époque, le Parti communiste révolutionnaire en menait large dans la vie étudiante de plusieurs Cégeps. Ou même à l’UQAM. Ils se considéraient comme maoïstes. Ils disaient le plus sérieusement du monde qu’ils s’inspiraient du modèle de Mao (en Chine, jusqu’en 1976) pour mener la « révolution ». Au programme : guerre populaire prolongée, révolution culturelle, lutte contre le « révisionnisme » (c’est-à-dire les communistes trop « tièdes ») et autocritiques.

Le programme vous tente? C’est que vous ne connaissez pas l’histoire : des millions de morts en Chine, à la fois par des meurtres politiques en série, des émeutes, des famines. Bref, ce n’est pas une très belle histoire. Mais bon, ce n’est pas ce qui va arrêter nos militants communistes. Qui dira toujours que c’est la faute aux « révisionnistes », à la CIA ou aux médias « occidentaux ». Ils auront forcément une objection pour tout.

Voilà où l’on voulait en venir. Pendant des années, un groupe discret, mais pugnace, appelé « La riposte socialiste » s’est lentement imposé comme la référence au Québec. C’est un groupe issu de la « tendance marxiste internationale », une union internationale de groupes trotskystes, fondée depuis le Royaume-Uni. Qu’est-ce qu’ils ont de particulier? Bien, plusieurs affaires en réalité.

Ils ont comme particularité de vouloir infiltrer les partis de gauche officiels mieux intégrés dans nos sociétés. Ici, c’était le cas de Québec Solidaire, qui a déjà compté plusieurs collectifs « trotskystes » en son sein. Alors qu’au Canada anglais, c’était le NPD. Bref, les gars à l’intérieur voulaient radicaliser ces partis sociaux-démocrates pour en faire des partis révolutionnaires. Stratégie qui n’a jamais aboutie à aucun succès. Sauf d’avoir provoqué des crises d’urticaire aux militants modérés ou à l’establishment du parti.

Depuis, l’eau a coulé sous les ponts. Le Parti communiste révolutionnaire « maoïste » s’est dissous il y a quelques années. Il faut dire qu’ils voyaient des « révisionnistes » partout. Les communistes ont la fâcheuse habitude de se scinder en plusieurs groupes. C’est ce qu’on appelle des « scissions ». Très peu de groupes nés de ces « scissions » réussissent à survivre. En somme, des « morts nés ».

La riposte a changé de nom pour devenir le « Parti communiste révolutionnaire », ce qui est ironique, considérant la rivalité qu’il existe au Québec entre les groupes communistes. La plupart d’entre eux se mènent une guerre froide au plan idéologique. On accuse un d’être « révisionniste », ou bien d’être « nationaleux ». Des épithètes comme « petits bourgeois » sont lancées à l’occasion. Dans le petit monde des communistes québécois, on vit clairement sur une autre planète.

Les travailleurs se sont généralement enrichis. Les partis sociaux-démocrates font bien leur travail. Bien sûr, rien n’est parfait. Mais, qui veut réellement du « communisme »? Partout où l’idéologie fut implantée, ce fut un échec patent. Même les communistes entre eux ne savent pas s’ils doivent s’approprier les succès de la Chine moderne. D’un côté, ceux qui accusent la Chine d’être devenue un pays capitaliste, et d’autres qui disent que la Chine pratique un modèle économique original, qui a sorti des millions de gens de la pauvreté.

Les gars, à un moment donné, il faut se brancher. Cela fait plus d’un siècle qu’il existe des mouvements communistes au Québec. Mais que personne ne fut jamais d’accord sur rien. Combien avons-nous vu de groupes naître et mourir aussitôt? Qu’est-ce que vous faites de la question nationale? Comme si vous aviez le monopole de la pensée politique.

À un moment donné, après une telle succession d’échecs, il faudrait se poser des questions, vous ne trouvez pas? Ici, inutile de parler des crimes commis au nom de l’idéologie communiste. D’autres l’ont fait très bien avant nous. Un peu d’introspection, ça vous ferait du bien.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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