À primes abords, mon article paraitra comme une complainte, mais il s’agit ici plus d’une note de fatigue. En effet, pendant 2 ans, j’opérais un modeste podcast les matins qui survolait les actualités. Je cherchais à trouver des nouvelles intéressantes, des points de vue originaux, des textes journalistiques recherchés et nuancés; et pourtant j’ai trouvé de l’entre-soi, j’ai trouvé de la masturbation intellectuelle tant à gauche qu’à droite, j’ai trouvé des amalgames douteux manquant essentiellement de profondeur. J’assistais à davantage de prêches, d’invectives, de sensationnalisme. Par ailleurs, je voyais souvent les mêmes figures, les mêmes chroniqueurs et je me posais la question : comment peuvent-ils une fois par jour être originaux, pleins de rigueur et frappants d’intelligence? Si les uns écrivent sur des scandales et bariolent leurs textes de buzz words les autres griffonnent sur les mêmes sujets sempiternellement.

On peut expliquer que la qualité de certains médias peut avoir diminué en raison de différents facteurs tels que la pression pour publier rapidement des nouvelles, la réduction des budgets et des effectifs, la concurrence accrue pour l’attention des lecteurs, etc. De plus, l’avènement des médias sociaux et des plateformes en ligne a également eu un impact significatif sur la qualité de certaines couvertures journalistiques, car de nombreux sites web et comptes sur les médias sociaux peuvent publier des informations sans vérification ou sans respecter les standards éthiques traditionnels et professionnels.

Les sujets sont si insipides qu’ils nous laissent croire que nous avons le luxe de nous plaindre très facilement dans un monde occidental confortable. Quand les wokes parlent de leurs souffrances, quand les péquistes et autres nationalistes de salon nous parlent de la fin du français, quand les hypocondriaques nous parlent davantage de leur besoin de contrôle, quand certains intégristes sectaires nous font miroiter leurs illusions de liberté, quand la gauche nous parle de néolibéralisme et du déclin climatique, quand la droite nous parle des derniers proclamant ainsi la perte d’un monde traditionnel qu’ils n’ont même pas connu eux-mêmes; les exemples de l’absurdité de l’écrit quotidien sont nombreux. Après cela, on ne s’impressionnera pas que les gens ferment leurs journaux et passent à autre chose.

Je me fais cette conclusion très fracassante après avoir survolé pendant des années et plus intensivement 2 ans une quinzaine de médias différents. Ironiquement, l’explication se transmute en excuse; la démonstration en exhibition; l’enseignement à la rhétorique. N’effaçant pas le fort taux d’analphabétisme fonctionnel de nos concitoyens, les médias écrits n’aident pas. Or, ce n’est pas normal que je commence à lire un texte et que je sache déjà la conclusion scabreuse et pleine de mauvaise foi de son artisan. Il n’est pas normal que j’aie l’impression que la forme du texte est un copier-coller word sur un bureau d’ordinateur d’un stagiaire en communication ou encore PIRE que certains utilisent Chat GPT pour nous décrire telles ou telles crises ou phénomènes

On ne peut en aucun cas oublier les quêtes principales du 4e pouvoir : Informer (la presse a pour rôle de fournir une information complète des événements et non qu’une partie), surveiller le pouvoir (de le questionner, de le critiquer afin de veiller à ce que les droits et libertés fondamentales soient respectés), favoriser la démocratie et le débat sain, et sensibiliser avec parcimonie sans conditionner une angoisse perpétuelle dans la communauté. Aussi, ne serait-il pas plus juste et pertinent, que les chroniqueurs, journalistes, éditorialistes de tout acabit retrouvent un pouvoir de suggestion et de documentation auprès des lecteurs et des gens du pouvoir?

Enfin, je ne terminerai pas cette chronique déclamatrice sans un soupçon d’espérance et de positivisme en imaginant un peu l’avenir du journalisme et pour ce métier même si certaines tendances continuent de se développer. Voici quelques exemples/suggestions :

Davantage de prolifération de la technologie : Les avancées technologiques peuvent permettre une diffusion plus rapide et plus large de l’information, ainsi qu’une meilleure interaction entre les journalistes et le public.

Une plus grande démocratisation de la production de contenu : Grâce à la technologie, de plus en plus de personnes peuvent produire et partager du contenu journalistique, ce qui peut conduire à une plus grande diversité de points de vue.

Un meilleur développement de nouveaux modèles économiques : Alors que les médias traditionnels sont confrontés à des défis financiers, de nouveaux modèles économiques peuvent émerger pour soutenir la production de contenu journalistique de qualité.

De l’évolution des formes de journalisme : Le journalisme peut évoluer pour inclure de nouvelles formes de storytelling, telles que la réalité virtuelle et augmentée, qui peuvent aider à informer de manière plus engageante et immersive

Un rôle accru dans la protection des droits fondamentaux : Le journalisme pourrait jouer un rôle encore plus important dans la protection des droits fondamentaux, en informant sur les violations et en veillant à ce que les décideurs politiques soient tenus responsables. Contrairement à une époque pas si lointaine, n’est-ce pas?

Samuel Rasmussen

Formé à l’École de Politique Appliquée de l’Université de Sherbrooke, il se passionne pour la géopolitique et le développement des relations internationales. Collaborateur de différents podcasts notamment Ian et Frank et Agora Underground, il intervient souvent sur l’actualité. Il s’intéresse principalement à la psychologie du pouvoir et de son impact sur le plan individuel comme au sens large.

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