McCarthy lance une enquête en destitution contre Joe Biden

Le leader de la majorité Républicaine à la Chambre de Représentants, Kevin McCarthy, a ouvert unilatéralement une enquête en destitution contre Joe Biden. Ceci survient suite aux révélations du House Committee on Oversight and Accountability, présidé par James Comer, selon lesquelles la famille Biden et ses partenaires ont récolté au moins 20 millions de dollars provenant de sources étrangères, incluant les associés de Hunter Biden en Russie, au Kazakhstan et en Ukraine, dont certains ont dîné avec Joe Biden [selon le témoignage de Devon Archer, partenaire d’affaires de Hunter Biden].

Le Président, le Vice-Président et les élus au Congrès américain ont le droit de faire des affaires et de posséder des entreprises privées, mais il existe des réglementations strictes qui encadrent leurs activités financières et commerciales afin de garantir la transparence et d’éviter les conflits d’intérêts.

« Grâce à nos enquêtes, nous avons découvert que le président Biden a menti au peuple américain sur sa connaissance des relations commerciales de sa famille à l’étranger », a affirmé McCarthy, ajoutant que « ces allégations dressent le tableau d’une culture de corruption ».

Étant donné que les Démocrates disposent d’une majorité au Sénat, la destitution de Joe Biden ne pourra pas aboutir – d’autant plus qu’une telle procédure requiert une super majorité de deux tiers. Cependant, une enquête en destitution donne aux enquêteurs du Congrès une plus grande autorité légale pour accéder aux documents financiers de la famille Biden et pour faire respecter les assignations à comparaître.

Comme ce fut le cas avec les deux tentatives contre Trump [en fin 2019, puis début 2021], le but n’est pas la destitution du président en tant que telle, mais de nuire à sa réputation. Dans le cas présent, l’objectif est de faire la lumière sur la corruption de la famille Biden.

Considérant tous les efforts de l’establishment Démocrate et du FBI pour étouffer l’affaire du laptop d’Hunter Biden, on ne peut qu’accueillir favorablement la volonté Républicaine de faire la lumière sur les transactions commerciales de la famille Biden. Par contre, sans la coopération des médias, dans quelle proportion l’opinion publique sera-t-elle touchée ou influencée par cette enquête?

D’emblée, la couverture des médias de masse cherche à décrédibiliser l’initiative. Dans le New York Times, qui place en titre: « McCarthy, confronté à une menace d’éviction et à une fermeture, ordonne une enquête de mise en accusation », il est davantage question de la pression de « l’extrême droite » du Parti Républicain [« far right » en anglais] sur son speaker, que des allégations de corruption envers la famille Biden.

Pour s’assurer de la coopération des médias, la Maison Blanche a envoyé une note à la direction éditoriale des organisations de presse américaines. L’Assistant spécial du Président, Conseiller principal et porte-parole du Bureau du Conseil de la Maison Blanche, Ian Sams, a envoyé le mémo à une liste de presse incluant CNN, le New York Times, l’Associated Press, CBS News et Fox News. On peut y lire qu’il « est temps pour les médias d’intensifier leur surveillance des Républicains de la Chambre des Représentants en vue de l’ouverture d’une enquête de mise en accusation basée sur des mensonges ».

Les pressions du gouvernement sur l’appareil médiatique sont-ils le signe d’une saine démocratie? On perçoit surtout une administration en mode panique. Surtout que selon un récent sondage mené par CNN, 61% des Américains pensent que Joe Biden étant impliqué dans les affaires commerciales de son fils Hunter Biden alors qu’il était Vice-Président, et que 42% croient qu’il a agi dans l’illégalité. Outre, un sondage réalisé en mai par la firme Harvard-Harris révèle que 53 % du public pense que Joe Biden « était impliqué avec son fils dans un stratagème illégal de trafic d’influence ».

Quels éléments feront surface lors de l’enquête?

Les Républicains vont requérir quelques 5,400 documents écrits dans lesquels Joe Biden a utilisé les pseudonymes « Robert L. Peters » et « Robin Ware » pour communiquer avec les membres du personnel. Les Archives Nationales ont jusqu’ici refusé de transmettre les documents au House Oversight Committee. L’enquête va aussi se pencher sur le compte officiel Robert.L.Peters@pci.gov utilisé par Joe Biden, ainsi que sur d’autres comptes de messagerie privés enregistrés sous de faux noms.

Les Républicains du Congrès vont faire comparaître les banques au sujet des comptes détenus par Hunter Biden et son oncle James Biden. Les déclarations pourraient montrer si de l’argent a été transféré à Joe Biden à partir de leurs revenus en provenance de l’étranger et aussi, s’ils ont couvert une partie substantielle de ses dépenses. La Chambre pourrait éventuellement demander à voir les relevés bancaires du président.

On cherchera à savoir pourquoi les milliardaires russes Elena Baturina [l’ancienne première dame de Moscou] et Vladimir Yevtushenkov, qui avaient tous deux acheté des biens immobiliers avec Hunter Biden, sont parvenus à esquiver les sanctions imposées à la Russie suite à l’invasion de l’Ukraine par le Kremlin. On cherchera aussi à faire la lumière sur le transfert de 3,5 millions de dollars d’Elena Baturina à une société contrôlée par Archer et Hunter en février 2014. Au débat présidentiel de 2020, lorsque questionné par Trump sur ce versement, Joe Biden avait répondu que rien à ce sujet n’était vrai.

Joe Biden affirme d’ailleurs être dissocié des affaires commerciales de son fils Hunter. Il dit aussi ne jamais avoir discuté affaires avec ses partenaires financiers. Alors pourquoi Joe Biden a-t-il dîné deux fois au restaurant Cafe Milano [à Washington DC] avec les partenaires russes, ukrainiens et kazakhs de son fils? De quoi se sont-ils entretenus si ce n’est d’affaires?

Si ce n’est pas pour discuter d’affaires, pour quelle raison Joe Biden a-t-il rencontré le partenaire commercial chinois de Hunter lors d’un voyage à Pékin en 2013? Mise en contexte: Hunter Biden venait tout juste de cofonder le fonds d’investissement public chinois BHR Partners, quand il a présenté son père, alors vice-président, au PDG de BHR, Jonathan Li.

Il sera évidemment aussi question de la société ukrainienne de gaz naturel Burisma et du limogeage du procureur général ukrainien Viktor Shokin, dont Joe Biden s’est vanté d’être responsable. Mykola Zlochevsky, propriétaire de Burisma, aurait déclaré à un informateur du FBI qu’il avait été « contraint » de verser 10 millions de dollars en pots-de-vin en échange de l’aide du vice-président Biden pour évincer le procureur Shokin. À noter que l’intérêt de Trump envers cette situation, lors d’un appel téléphonique avec le président Zelensky en juillet 2019, lui a valu une procédure de destitution.

Malgré une volonté politico-médiatique qui s’efforce d’étouffer et de minimiser l’affaire afin de protéger Joe Biden, il y a décidément beaucoup de viande autour de l’os pour nourrir cette enquête. Par ce déni, la classe médiatique propose une inversion du réel qui fait partie intégrante de la nouvelle. Si des révélations similaires concernaient la famille Trump ou celle d’un Républicain de la mouvance MAGA, les Démocrates et la classe médiatique en feraient leurs choux gras. Résultant de cette partisannerie, voire de ce biais propagandiste, l’électorat américain est désormais scindé en deux, vivant dans des réalités parallèles qui ne reconnaissent pas les mêmes faits.

Ophélien Champlain

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