Montée de « l’extrême droite » en Europe : à qui la faute?

Les médias ont toujours la même réaction lorsqu’un parti qualifié « d’extrême droite » prend le pouvoir en Europe ou bien obtient un score historique. « Raz-de-marée », « séisme » voilà quelques-uns des qualificatifs que donnent les médias à ces événements politiques. Pourtant, on ne s’intéresse pas tellement aux causes de la montée de ladite « extrême droite ». Voyons voir cela de plus près.

La Hongrie est l’un des premiers pays d’Europe à mettre au pouvoir un parti « d’extrême droite », avec Victor Orban depuis 2010, après un premier passage au pouvoir entre 1998 et 2002. Celui-ci demeure toujours aussi populaire avec les années, et obtient des résultats électoraux plus qu’acceptables à chaque élection. On dénonce ses politiques contre les migrants, ou sa relation trouble avec la Russie et la Chine. Pourtant, pas grand-chose n’est dit sur les raisons qui poussent tant de hongrois à voter pour lui.

La Hongrie est un empire déchu. Petit empire, avec l’Autriche-Hongrie, mais quand même. Son territoire fut morcelé après la Première Guerre mondiale et de nombreux Hongrois se sont retrouvés dans des États nouvellement indépendants qui n’étaient pas franchement sympathiques à leurs droits. Pensons notamment à la Roumanie. Orban, un peu à la manière d’un Donald Trump, souhaite « rendre à son pays sa grandeur ». Mais s’il a besoin du financement européen après des années d’occupation soviétique qui l’ont laissée exsangue, il voit bien que l’Union européenne empiète sur la souveraineté des peuples en imposant toujours plus de décisions autoritaires comme un nombre de migrants à accueillir, ou d’institutions nationales à « réformer ».

Le wokisme est l’un des facteurs de la montée de « l’extrême droite » en Europe. La Hongrie dénonce régulièrement le délire qui s’incruste dans les institutions scientifiques, politiques et universitaires des pays européens ou des États-Unis. Il faut dire que le délire woke est allé si loin dans certains cas que l’on pourrait carrément parler de provocations.

Mais dans un cas qui nous intéresse ces temps-ci, ce sont les Pays-Bas. Ce qui fut le pays le plus libéral de son époque a donné 37 sièges sur 150 aux dernières élections à Geert Wilders, ce qui lui permettra de former une coalition pour diriger le pays. Depuis plus d’une vingtaine d’années, Wilders dénonce l’islamisation des Pays-Bas, en souhaitant interdire les mosquées comme le voile. Par contre, il faut dire qu’il doit son élection à des sujets plus terre-à-terre : la crise du logement et le coût de la vie.

En effet, les Pays-Bas sont touchés par une crise du logement sans précédent. Car depuis quelques années, énormément d’étudiants étrangers choisissent les Pays-Bas, car il est possible d’y étudier en anglais pour un coût abordable. Résultat : les logements dans les villes étudiantes sont hors de prix, et certains se retrouvent à devoir dormir sous une tente.

Les médias dénoncent régulièrement la percée de ces partis. Pourtant, peu de choses sont dites sur les raisons qui poussent les élections à donner leur appui. Par exemple, si Marine Le Pen a tant le vent dans les voiles, c’est peut-être parce que plus en plus de français a peur pour leur sécurité le soir et que certains quartiers des grandes villes sont dangereux. De même que le problème de la sécurité s’est depuis régionalisé. Les Français que vous interrogerez vous le diront : c’est difficile de sortir le soir ou même le jour sans être importuné par des individus intimidants. Et surtout que les migrants sont libres de leurs journées à errer dans les villes, sans que cela ne préoccupe la gauche qui dirige plusieurs centres urbains.

La montée de « l’extrême droite » ou peu importe comment on l’appelle, s’explique par plusieurs raisons. Mais est-ce possible que le wokisme, le manque de démocratie au sommet de l’Union européenne, la déconnexion des mairies de gauche libérale ou même des considérations plus terre-à-terre comme la crise du logement expliquent ce phénomène? Il ne faut pas blâmer les électeurs de choisir ce qu’ils considèrent comme une alternative, alors que la gauche et la droite traditionnelle ont échoué à apporter des solutions. Seul l’avenir nous le dira si ce fut un bon choix ou non. Pour l’instant, qu’on laisse la chance aux coureurs.

Anthony Tremblay

Originaire de La Baie, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, Anthony Tremblay a étudié en politique appliquée à l’Université de Sherbrooke. Curieux de nature et passionné par les enjeux contemporains, il a parcouru le monde, explorant des pays tels que l’Indonésie, la Turquie et la Chine. Ces expériences l’ont marqué et nourrissent aujourd’hui ses réflexions sur la crise du monde moderne, les bouleversements technologiques et l’impact croissant des réseaux sociaux. Fort de son expérience d’enseignement de l’anglais en Chine, Anthony conjugue perspectives locales et internationales dans ses analyses. Il réside actuellement à Sherbrooke, où il partage son quotidien avec ses deux chiens.

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