Le récent projet de loi sur l’énergie (69) déposé par le ministre Pierre Fitzgibbon cette semaine fait beaucoup jaser. À gauche à droite, on essaie d’analyser quel sera son impact sur la situation énergétique du Québec, mais surtout, sur les hausses de tarifs dans les prochaines années. Bien qu’on reconnaisse que le projet de loi a l’avantage de clarifier les politiques gouvernementales et leur mise en application par Hydro-Québec, force est de reconnaître qu’il s’inscrit encore dans le cadre de ce plan un peu foireux qu’est la transition énergétique, et laisse encore beaucoup de place à l’incertitude.
Plus de prévisibilité
Le projet de loi a certainement l’avantage de clarifier l’élaboration des politiques énergétiques du gouvernement dans un Plan de gestion intégrée des ressources énergétiques (PGIRE). À chaque 3 ans, ce plan dirigé par la Régie de l’Énergie sera mis à jour pour établir les besoins énergétiques du Québec et les tarifs appropriés. Ces mesures permettront une meilleure prévisibilité, notamment pour les entreprises et les industriels, qui ont dû composer avec beaucoup d’incertitudes et de confusion ces derniers temps.
On note aussi que le projet de loi renforce un peu la subordination d’Hydro-Québec au gouvernement. Le ministre de l’Énergie fixant plus clairement ses exigences auprès de la société d’État. On peut donc s’attendre à moins de mésententes avec le PDG d’Hydro-Québec comme ce fut le cas, notamment, sous la direction de Sophie Brochu entre 2020 et 2023.
Plus de flexibilité pour les entreprises
On offre aussi plus de flexibilité pour les entreprises en leur permettant de produire et vendre leur propre électricité, sous certaines conditions et approbations gouvernementales.
Il y a eu beaucoup d’alarmisme au sujet d’une privatisation en douce ces derniers mois, mais force est de reconnaître que ce type de flexibilité pour les petits producteurs est une bonne chose et ne s’avère pas être la menace qu’on annonçait. En fait, encourager la production locale d’énergie est absolument cohérent avec les grands principes normalement promus par les environnementalistes et semble très bien reçu, notamment dans le secteur du solaire.
Les tarifs résidentiels : une petite attrape
Au niveau des tarifs résidentiels, c’est un peu remplacer un dollar par un trente sous. On change un peu la manière de payer pour les projets de développement qui s’en viennent, mais tout le monde semble s’entendre que ça va coûter plus cher. Beaucoup plus cher.
Le gouvernement promet « d’éviter un choc tarifaire » avec un gel des hausses de tarifs résidentiels à 3%, mais il y a une attrape : il compensera Hydro-Québec en parallèle via le ministère des Finances et nos impôts! Autrement dit, les contribuables vont finir par payer d’une manière ou d’une autre, et le montant pourrait s’élever entre 100 et 300 millions de dollars.
En même temps, on peut au moins se rassurer que le gouvernement ne tombe pas dans des politiques trop punitives pour les citoyens. En effet, dans un esprit un peu masochiste qui a « intériorisé » l’agenda de transition, il y en a qui militent fort pour qu’on hausse les tarifs afin de forcer les Québécois, jugés trop énergivores et dépensiers, à diminuer leur consommation. On mise donc d’une manière un peu maladive sur les politiques d’efficacité énergétique, la modulation des tarifs, etc. Ceux-ci se retrouvent aujourd’hui un peu déçus par ce projet de loi qui ne prévoit qu’une modulation optionnelle des tarifs et mise plus sur le développement de la production énergétique que sur la diminution de la consommation.
À qui le fardeau?
Mais s’il épargne – de façon bien relative, il faut le reconnaître – les clients résidentiels, ce n’est pas le cas pour les industriels, qui ne bénéficieront plus du Tarif L, qui les exemptaient de l’indexation du bloc patrimonial d’Hydro-Québec. On prévoit donc que leurs tarifs vont augmenter de manière importante.
Et c’est là un enjeu majeur. Parce que selon Fitzgibbon lui-même, tout ça vise en fait à lancer le débat à savoir à qui il faut refiler la facture de ces politiques de décarbonation exorbitantes.
Le projet de loi met simplement en place le ring dans lequel s’affronteront, dans un combat à mort, les clients résidentiels, les petites et moyennes entreprises et les grands industriels. « Qui va payer pour ça ? C’est-tu les entreprises ? C’est-tu les commerces ? C’est-tu le résidentiel ? C’est-tu le gouvernement ? C’est-tu Hydro-Québec ? C’est un débat qu’on doit avoir. » explique le ministre.
Dans tous les cas, il s’agit d’un sacrifice énorme : la sécurité économique des citoyens, la viabilité de nos entreprises locales ou bien l’attractivité de notre secteur industriel sont carrément mis au ballotage.
D’autant plus qu’il ne fait au bout du compte que reporter à 2026 une véritable prise de décision, tout en maintenant les objectifs de transition irréalistes qui forcent ce choix déchirant en premier lieu. Fitzgibbon ne fait que « lancer le débat » jusqu’aux prochaines élections, mais rien n’est véritablement réglé.
Non seulement ça, mais pour forcer l’allure encore davantage, on est prêt à abandonner les processus d’appel d’offre, ce qui vient avec une part de risque. Tout ça pour aller plus vite en matière de transition! C’est quand même un peu vendre son âme au diable à ce stade…
S’inventer des problèmes
S’il y a bien quelque chose sur lequel le gouvernement devrait se pencher, c’est le sérieux déséquilibre entre les sacrifices demandés au Québec et leur impact réel sur les émissions globales de gaz à effet de serre.
La réalité, c’est que cette précarité énergétique est complètement artificielle. Nous aurions bien assez d’énergie aujourd’hui et pour le futur si le gouvernement n’avait pas passé les dernières années à saboter la diversité énergétique par signalement de vertu. C’est en voulant bannir les voitures à essence, le chauffage au gaz et la prospection et l’exploitation de nos ressources qu’on se retrouve désormais avec des projections dans le rouge.
La solution la plus efficace à ces enjeux énergétiques est encore à ce jour que le gouvernement laisse la population et le secteur de l’énergie tranquille et débarque de ses grands chevaux avec sa transition énergétique dogmatique et suicidaire.
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