Sur quelle planète vit Marc Tanguay?

Depuis quelque temps déjà, on constate une nette déconnexion des libéraux vis-à-vis de la société québécoise. Cela est encore plus vrai pour Marc Tanguay, le chef intérimaire du Parti libéral. À force d’encenser Jean Charest et le retour à « l’équilibre budgétaire », il rompt avec la distance qu’a voulu prendre Dominique Anglade face aux années Charest-Couillard. Analyse d’un parti qui se cherche une nouvelle identité dans une société en plein changement.

Il y a de ça quelques jours, nous avons assisté médusé au discours d’un Philippe Couillard qui venait célébrer les 10 ans de sa prise du pouvoir à Québec. Celui-ci dénonçait les « démagogues » et les « populistes ». Nous nous sentions comme à cette époque pas si lointaine où l’on voyait s’affronter la Meute et les Antifa. Une époque, qui espérons-le, est révolue pour de bon.

Le contexte politique actuel n’est pas favorable aux libéraux. Avec sa renaissance puis sa remontée fulgurante, le Parti Québécois a stabilisé ses appuis autour des 34%. Si les libéraux remontent progressivement, ce n’est pas à cause de la qualité de leurs interventions – plus que discutables – ni leur programme, mais justement de façon indirecte en réaction au Parti Québécois.

Beaucoup de Montréalais, qui s’étaient « égarés » à soutenir la CAQ, le Parti conservateur d’Éric Duhaime ou même Québec Solidaire, prennent à nouveau conscience de la « menace séparatiste » et de la possibilité d’un nouveau référendum. Rien que ça. Les libéraux, dans leur arrogance légendaire, prennent cela comme si c’était à eux que le pouvoir devrait revenir naturellement.

Marc Tanguay semble pris de nostalgie en pensant aux années Charest-Couillard. Celles de la « rigueur » budgétaire. Mais c’est pour une autre raison que les Québécois ont décroché des libéraux. Les mesures adoptées durant ces années noires ont fortement contribué au déclin du français, et à la situation dramatique dans laquelle les Québécois se trouvent.

Ceux-ci ne bénéficient plus des avantages du plein emploi, et sont sujets aux évictions par des sociétés d’investissement qui ont massivement racheté le parc immobilier. Si la CAQ est en partie responsable de ce fiasco, c’est justement qu’ils sont dans la continuité de l’ère Charest-Couillard. Personne ne souhaite le retour des libéraux, qui auraient au moins le mérite de jouer à visage découvert.

On se demande presque si Marc Tanguay et ses troupes ne vivraient pas sur une autre planète. Celle où les gens réclament la rigueur budgétaire, alors que l’on connaît tous la vérité. Des économies de bouts de chandelles dans la santé et l’éducation, mais des milliards donnés aux entreprises privées. Plus personne n’est dupe. Bien sûr que nous sommes dus pour un grand ménage. La CAQ l’a promis. Mais elle n’a rien fait. Exactement en droite ligne avec les libéraux avant eux.

Les libéraux sont incapables d’introspection. Ceux-ci préfèrent fantasmer sur un passé qu’ils estiment « glorieux », mais qui n’a fait que les enterrer toujours plus profondément. La seule raison pourquoi ils existent toujours, c’est en réaction au Parti Québécois. Nous reviendrons lentement mais sûrement à une politique bipartisane. Notre système politique britannique n’est pas fait pour plusieurs partis. Mais les libéraux seront à leur place : dans l’opposition en réaction à un éventuel référendum. Ce n’est pas glorieux pour le parti de Jean Lesage et Robert Bourassa.

Anthony Tremblay

Originaire de La Baie, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, Anthony Tremblay a étudié en politique appliquée à l’Université de Sherbrooke. Curieux de nature et passionné par les enjeux contemporains, il a parcouru le monde, explorant des pays tels que l’Indonésie, la Turquie et la Chine. Ces expériences l’ont marqué et nourrissent aujourd’hui ses réflexions sur la crise du monde moderne, les bouleversements technologiques et l’impact croissant des réseaux sociaux. Fort de son expérience d’enseignement de l’anglais en Chine, Anthony conjugue perspectives locales et internationales dans ses analyses. Il réside actuellement à Sherbrooke, où il partage son quotidien avec ses deux chiens.

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