OPINION | Taxe vaccinale : beaucoup de risques pour peu de bénéfices

Par Renaud Brossard, Directeur Québec, Fédération canadienne des contribuables

Aussi tentant que ça puisse être « d’emmerder » les non-vaccinés, pour reprendre l’expression d’Emmanuel Macron, on ne devrait pas laisser la colère guider nos politiques publiques.

La taxe vaccinale proposée par le gouvernement Legault ne fait pas exception à la règle. Si les détails se font attendre, le Premier ministre François Legault a laissé entendre que le montant serait « significatif, » et que, pour lui, 100$ n’était pas un montant significatif.

Avant d’imposer une nouvelle taxe, il faut se demander si le bénéfice qui en découle en vaut les coûts, et tout indique que celle-ci ne passe pas le test.

D’abord, il faut se demander si la taxe vaccinale aura réellement un effet notable sur la prise de rendez-vous des non-vaccinés.

Déjà, les non-vaccinés n’ont pas accès aux restaurants, cinémas, SAQ, etc. Dans le cas des travailleurs de la santé, bon nombre de ceux qui n’étaient pas vaccinés étaient prêts à perdre leur emploi plutôt que se faire vacciner en octobre dernier.

Radio-Canada nous rapportait que certains étaient prêt à payer jusqu’à 3 000$ pour obtenir un faux passeport vaccinal en décembre dernier. Les pénalités existantes, tant sur le plan financier que le plan social, sont déjà très fortes, et pourtant ils résistent encore.

Et même si vous n’êtes pas d’accord avec eux, croyez-vous qu’une taxe va les convaincre? Si vous croyez dur comme fer que vous faire vacciner va vous tuer, vous rendre gravement malade ou vous faire pousser des boutons verts, il y a fort à parier qu’une taxe ne vous convaincra pas de le faire.

En termes de revenus, il est faux de croire que ça permettrait de sauver notre système de santé.

Sur les 845 000 Québécois et Québécoises non vaccinés en ce moment, il y a environ 285 000 mineurs, qui ne seraient vraisemblablement pas touchés par la taxe.

Cela laisse donc environ 560 000 Québécois et Québécoises qui paierait la taxe.

Même en demandant 1 000$ par tête de pipe par année, la somme recueillie serait dépensée en moins de quatre jours par notre système de santé.

Et ça ce n’est en présumant qu’aucun des 560 000 citoyens visés n’a pas de justification médicale valable pour ne pas être vacciné. C’est sans compter aussi les coûts liés à l’embauche de nouveaux fonctionnaires pour en faire l’application.

Ensuite, les effets de la taxe ne se feront pas sentir que sur nos concitoyens non-vaccinés.

Pour que Revenu Québec puisse déterminer si vous devez la payer ou non, il faudrait donner un droit d’accès à ses 12 000 employés à certaines composantes de votre dossier médical qui ne sont généralement accessibles que par vous et votre médecin soignant.

Les fonctionnaires du revenu ne sont pas exempts des risques de fuites. Pas plus tard qu’en 2019, Revenu Québec congédiait une employée pour avoir enfreint la confidentialité de 23 000 dossiers d’employés.

Quel que soit votre statut vaccinal, ce serait demander toute une entorse à votre droit à la vie privée.

Cela créerait aussi un précédent inquiétant, permettant à Revenu Québec d’obtenir accès à d’autres informations personnelles qui ne sont pas liées à votre revenu et qui ne concernent pas la mission de cet organe de l’État.

Ultimement, la taxe vaccinale n’apportera pas tant de nouveaux revenus que ça au gouvernement et son effet sur les non-vaccinés risque d’être assez faible. Le risque associé au fait de donner accès à nos données médicales à 12 000 fonctionnaires de plus est, quant à lui, bien réel.

La nouvelle taxe vaccinale n’est pas le remède de cheval dont notre système de santé a besoin. Legault ferait bien de reculer sur son application.

L’auteur est doublement vacciné et attend l’ouverture de la prise de rendez-vous à son groupe d’âge afin d’aller chercher sa troisième dose.

Lettres à l'éditeur

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