Remarquez, nous ne parlons plus de seuils d’immigration pour les résidents permanents de nos jours. Faut-il en accueillir 50 000, ou 80 000 comme cela est préconisé par les partis de gauche? Le débat maintenant, c’est davantage de savoir combien de travailleurs étrangers temporaires il faut accueillir. Et surtout dans quels domaines. Quelques réflexions sur un enjeu pas simple, mais qu’il faut tenter de mettre au clair.
La Presse a partagé avec nous l’histoire d’un centre de la petite enfance à Rosemont. Il est dit dans l’article que six éducatrices sur dix sont sous des contrats de travailleurs étrangers. Dont le cas d’une femme originaire de l’île Maurice. Très appréciée des enfants, mais aussi des parents, ses qualités sont soulignées par son employeur. Elle devra cependant quitter son emploi en octobre.
On pourrait croire à un autre cas d’un article de La Presse visant à trouver une exception dans les politiques gouvernementales pour faire la promotion d’un agenda libéral. Mais il a quand même le mérite de poser la question : qu’est-ce qui est un travail « essentiel »? Mais aussi à l’opposé : qu’est-ce qu’un travail « non essentiel »? Sur le coup, on se dit : il faut que les Québécois fassent le travail. Mais c’est plus compliqué que cela.
Un salaire d’éducatrice en CPE tourne autour de 21$ de l’heure. Ce qui est à peine plus élevé que le salaire minimum actuel. De plus, il faut idéalement de l’expérience ou un certain talent pour exercer ce métier. Confieriez-vous vos enfants à des gens sur lesquels on a des doutes sur leurs compétences ? Eh bien, non. C’est le paradoxe de notre société : les emplois les plus importants, que ce soit dans la santé, l’éducation, sont dévalorisés.
Oui, en ce sens, des travailleurs étrangers peuvent être nécessaires pour des besoins très spécifiques, dans des domaines très précis. Mais ce qui devait être une solution de dernier recours s’est révélé être un buffet à volonté pour tirer à la baisse les conditions de travail. Contribuant au passage à la montée du chômage chez les jeunes. Oui, c’est légitime de recruter des travailleurs étrangers dans des domaines aussi cruciaux que la santé, l’éducation, la construction.
Mais est-ce vraiment nécessaire de recruter des travailleurs à l’autre bout du monde pour des « shops » qui offrent à peine plus que le minimum légal ? Plusieurs grands patrons québécois ont volontairement négligé la modernisation nécessaire de leurs usines. Il faut dire que pendant des décennies, les chômeurs se pressaient aux portes pour espérer travailler à n’importe quelle condition. Cela ne coûtait pas cher aux patrons d’avoir plusieurs travailleurs précaires que l’on pouvait jeter si nécessaire.
Mais les choses ont changé. Le monde entier est entré dans une nouvelle phase d’industrialisation. Celle de la robotique et de l’intelligence artificielle. Les entreprises allemandes, japonaises, chinoises et d’autres pays ont un avantage compétitif par rapport aux nôtres, car elles se sont modernisées. Ici, la productivité tire de la patte, car les patrons ont toujours de vieux réflexes du temps où le téléphone était à roulette.
Nous pourrions longuement disserter sur comment les usines devraient fonctionner, recruter leurs travailleurs, comment produire, et dans quelles conditions. Mais une chose est sûre : le réflexe trop facile de recruter ailleurs nuit aux travailleurs d’ici. Pas seulement à ceux des industries concernées, mais en faisant monter le chômage. Le chômage en hausse signifie une compétition plus rude entre les travailleurs pour des emplois aux conditions moins avantageuses.
Mais vraiment, le pire, c’est quand nous apprenons la quantité de travailleurs étrangers temporaires recrutés pour faire fonctionner des restaurants de fast food. Plusieurs restaurants partout au Québec ont des équipes presque entièrement constituées de ce type de travailleurs recrutés sur des périodes de deux à trois ans. Il faut dire que le fast food, au-delà de la question de la santé, est une industrie déclinante, qui fonctionnera toujours par défaut aux bas salaires.
La culture au Québec a changé depuis le temps où on allait tous après les bars au McDonald’s. Beaucoup ont pris conscience que ces endroits mettaient en danger leur santé, en plus d’être des désastres au plan économique. L’arrivée d’un nouveau fast food en ville, c’est comme un Wal-Mart qui vient d’ouvrir : il ne crée pas des jobs, mais il prend les ressources d’autres commerçants, qui eux devront éventuellement mettre la clé sous la porte.
Regardez dans votre ville : combien reste-t-il de petits restaurants familiaux indépendants? Plus beaucoup. Car les chaînes américaines ont envahi le marché, notamment par leur pouvoir de recruter des travailleurs à bas salaire à l’étranger. De plus, nous pourrions parler longuement des profits qui ne sont pas réinvestis ici. En somme, une très mauvaise affaire.
Oui, il faut des travailleurs étrangers temporaires dans certains domaines très précis, et ce, seulement en dernier recours. Par exemple, il faut bien nourrir le monde, non? Donc, le recrutement de travailleurs mexicains est nécessaire si l’on veut pouvoir manger des fruits de saison. Quant aux éducatrices en garderie, le gouvernement devrait faire une exception là-dessus. Mais avons-nous besoin de McDonald’s ou de Tim Hortons ouverts toute la nuit? Non.
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