Souvent dans l’histoire, les modus operandi des mouvements politiques font des émules à l’international et finissent par prendre les traits d’une contagion. Qu’on ne pense qu’au républicanisme révolutionnaire suivant le siècle des lumières ou aux guérillas révolutionnaires de l’après deuxième guerre mondiale, les activistes reproduisent constamment les stratégies et tactiques de leurs homologues étrangers.
Les évènements d’aujourd’hui au Brésil, par les parallèles frappants qu’on peut faire avec ceux ayant secoué les États-Unis en 2021, présentent des caractéristiques semblables.
Aujourd’hui, une foule d’environ 3000 personne a effectivement pris d’assaut tous les lieux de pouvoir du Brésil au cœur de sa capitale Brasilia. Cette masse dense vêtue de vert et de jaune était venue manifester son soutien à l’ex-président Jair Bolsonaro, qui contestait récemment les résultats de la dernière élection ayant porté au pouvoir Luiz Inacio Lula da Silva.
Semblable aux résultats de l’élection américaine de 2020, cette récente élection brésilienne, qui opposait la gauche à un président de droite populiste, s’était soldée par un résultat extrêmement serré de 50,90% des voix pour Lula contre 49,10% pour Bolsonaro, engendrant inévitablement la suspicion.
Bolsonaro a donc tenté depuis quelques mois de renverser ce résultat, alléguant des irrégularités dans l’élection, tout en demeurant, cependant, dans le cadre de la constitution. Or, comme Donald Trump, ses partisans semblent avoir pris l’initiative de sortir du cadre légal et de répondre à l’assermentation de Lula de la même manière qu’aux États-Unis face à l’assermentation de Biden.
Ce qui était d’abord une manifestation a dégénéré en occupation des édifices du Congrès brésilien, de la Cour Suprême et du palais présidentiel en milieu d’après-midi à Brasilia. Au moment d’écrire ces lignes, les forces de l’ordre avaient repris contrôle des bâtiments, arrêté au moins 150 émeutiers et étaient en voie de reprendre le contrôle des rues.
Cela dit, on aurait tendance à croire que les mouvements politiques de par le monde s’inspirent de leurs stratégies gagnantes, or ce n’est pas le cas ici. Comme aux États-Unis, les accusations sont sans appel et on parle de « tentative de coup d’État » et « d’insurrection » des « fascistes d’extrême-droite ». Peu importe, à ce stade, si leur remise en question des résultats électoraux étaient fondés ; la pente de la respectabilité sera extrêmement difficile à remonter.
Maintenant, sans vouloir diminuer l’évènement, ce n’est pas seulement les mouvements révoltés qui emploient les mêmes modus operandi, ce sont aussi leurs opposants. Et dans le cas présent, on a droit aux mêmes exagérations qui font de la confusion d’une émeute une tentative préméditée de coup d’État.
Ces présomptions jouent beaucoup dans l’imaginaire populaire, qui imagine nécessairement les putschs comme le fait de foules révoltées, or les coups d’États sont habituellement le fait de jeux de coulisses loin des yeux du public. Ainsi, à moins d’une planification claire de prise de pouvoir, ces évènements ne demeurent que des révoltes et des manifestations qui dégénèrent en occupation.
Puisque les sociétés occidentales ont atteint des niveaux de pacification et de docilité sans précédent, ce qui autrefois n’aurait été qu’une révolte spontanée est désormais placé au plus haut échelon de la violence politique et carrément considéré comme une tentative de renverser la démocratie.
Il faut donc émettre certaines nuances : dans le cas américain, le caractère spontané de l’occupation paraissait plus plausible. On avait là une manifestation qui avait dégénéré. Dans le cas présent, considérant ce précédent américain, il sera beaucoup plus difficile de prétendre l’innocence.
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