Un droit constitutionnel de s’injecter du fentanyl dans les carrés de sable?

S’injecter des drogues potentiellement mortelles dans un parc pour enfants est-il un droit fondamental? C’est essentiellement ce qu’affirme un juge de la Colombie-Britannique, qui a invalidé temporairement une loi visant à restreindre (un peu) la consommation publique de stupéfiants dans cette province. Il a cité le tort irréparable qu’on pourrait causer aux toxicomanes en les empêchant de consommer dans certains lieux publics.

Cette loi visait à réparer les pots cassés suite à la décriminalisation des drogues dures annoncée l’an dernier par le gouvernement néo-démocrate de la province, avec l’accord du gouvernement Trudeau. Même si la province interdisait toujours la consommation de stupéfiants près des écoles et des garderies, elle n’avait pas jugé bon de faire de même pour les parcs pour enfants. C’est pour remédier à ce genre d’incohérences que ces changements législatifs ont été apportés.

Un danger extrême

Rappelons qu’un enfant peut facilement mourir des suites d’une exposition accidentelle à une quantité infime de fentanyl ou de carfentanyl. Une telle tragédie a d’ailleurs eu lieu récemment à Edmonton. Ces opioïdes 100 à 10 000 fois plus puissants que la morphine posent même des risques d’empoisonnement aigus aux forces de l’ordre qui doivent manipuler ces substances.


Le risque posé à l’ensemble de la société est donc bien réel, mais ce juge a déterminé que les intérêts de la minorité marginale des toxicomanes devaient l’emporter sur le droit à la sécurité de l’immense majorité de la population.

Des juges activistes

Ces juges gauchistes qui inventent perpétuellement de nouveaux droits « fondamentaux » sont hors de contrôle. Il semble qu’il y ait une certaine prise de conscience au Canada anglais sur l’utilité de la clause dérogatoire.

Cette disposition, sans laquelle la Charte canadienne des droit et libertés n’aurait jamais été intégrée à la constitution fédérale, est aussi appelée clause nonobstant ou clause de souveraineté parlementaire. Elle permet aux élus du peuple d’outrepasser certaines sections de la Charte, en suivant des règles précises et pour une période (renouvelable) de cinq ans.

Comme cette Charte a été imposée au Québec et que tous les premiers ministres québécois, même libéraux, ont refusé de la signer, la clause de souveraineté parlementaire a toujours été considéré comme un outil légitime au Québec.

C’est beaucoup moins vrai au Canada anglais. Ainsi, le gouvernement Trudeau aimerait limiter les cas de figures où cette clause peut être invoquée, ce qui renforcerait nécessairement le pouvoir des juges nommés par le fédéral, et donc le pouvoir du fédéral par rapport aux provinces.

Le retour de la clause

Il semble cependant que la classe politique anglo-canadienne, à droite de l’échiquier politique au moins, soit en train de prendre conscience de l’importance de cet outil législatif.

Le premier ministre de la Saskatchewan Scott Moe a ainsi invoqué cette disposition pour protéger une directive visant à informer les parents lorsque leurs enfants « changent d’identité de genre » à l’école. Ce décret avait rapidement été invalidé par un juge activiste nommé par Ottawa, mais Moe ne s’est pas laissé faire.

Le premier ministre ontarien Rob Ford a également utilisé cette disposition à quelques reprises au cours des dernières années. Il s’agit d’une première dans l’histoire de la province.

On peut également penser à la dernière course à la chefferie du Parti conservateur du Canada, lorsque plusieurs candidats, dont l’actuel chef du parti Pierre Poilievre, avaient promis d’invoquer la clause nonobstant en réaction à un jugement de la Cour suprême ayant réduit la sévérité des sentences pour les tueurs de masse.

Cela peut expliquer l’évolution des mentalités dans le Rest of Canada : alors qu’en février dernier, 55% des Canadiens se disaient favorables à l’abolition de la clause dérogatoire (contre 63% des Québécois qui voulait la conserver), une majorité relative de Canadiens (46%) souhaitent maintenant que leur gouvernement provincial invoque la clause dérogatoire pour protéger les droits parentaux, à l’image de ce que Scott Moe a fait en Saskatchewan.

Il faut espérer que les provinces anglophones (et le gouvernement fédéral lui-même) s’inspirent du Québec et invoque la clause de souveraineté parlementaire plus souvent. C’est la manière la plus directe et la plus rapide de reprendre le dessus sur les activistes libéraux en toges qui ont la fâcheuse habitude de confondre leur idéologie avec la constitution.

Léo Dupire

Léo Dupire est président du collectif Québec FIER. Vous pouvez suivre ses activités sur les réseaux sociaux et sur leur page web : http://quebecfier.org/

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