L’élection d’un gouvernement Libéral majoritaire serait le pire de tous les cas de figure dans une perspective nationaliste québécoise. Le but présent n’est pas d’écrire un billet partisan, mais de regarder froidement les prospects d’une défaite Libérale en fonction de la carte électorale du Québec et de son historique.
En cette période de campagne, les accusations sont lancées de part et d’autre: « un vote pour le Bloc Québécois est un vote pour les Libéraux », mais aussi « un vote pour les Conservateurs est un vote pour les Libéraux ». Les deux affirmations peuvent être vraies dépendamment de la circonscription en jeu. Il y a cependant davantage de duels Bloc/PLC dans la province, ce qui en fait une dynamique cruciale de la présente élection.
Après deux mandats minoritaires, l’élection d’un gouvernement majoritaire Libéral rendrait toute réelle influence du Bloc caduque. Yves-François Blanchet a beau insister sur le rôle que peut jouer l’opposition, notamment en commission parlementaire, les leviers réels pour infléchir les décisions d’un gouvernement majoritaire sont très limités.
Même si les partis d’opposition participent activement aux débats et soumettent des amendements, leurs interventions ont rarement un impact décisif. Le pouvoir étant largement centralisé entre les mains de l’exécutif, le rôle de l’opposition se limite souvent à une fonction symbolique de contestation, sans véritable capacité de bloquer ou modifier l’agenda gouvernemental. Au final, un parti majoritaire peut ignorer l’opposition et faire adopter ses projets de loi sans compromis.
Certains reprochent au Bloc d’avoir appuyé les Libéraux plus souvent qu’autrement. Soit, mais la victoire d’un candidat bloquiste ne vaut-elle pas mieux que l’élection d’un député Libéral? On ne peut pas ignorer que dans plusieurs circonscriptions, notamment en Montérégie et dans la couronne de Montréal, une lutte binaire oppose le Bloc au PLC. Mieux vaut un contingent de députés bloquistes qu’un caucus Libéral du Québec renforcé.
Un caucus bloquiste peut servir de levier contre une administration Libérale minoritaire. Le caucus Libéral québécois, quant à lui, n’a jamais remis en question les orientations centralisatrices du parti. Il agit comme caisse de résonance de l’exécutif, non comme défenseur d’intérêts régionaux – et encore moins du nationalisme québécois.
Et pourtant, dans les faits, nombre d’électeurs québécois hésitent entre voter pour le Bloc ou pour le PLC. Ce « va-et-vient » est bien réel, même s’il peut paraître idéologiquement incohérent. C’est justement pourquoi il importe d’expliquer clairement que chaque vote bloquiste retiré au PLC peut faire pencher la balance en faveur d’un gouvernement minoritaire – ou même changer l’identité du parti au pouvoir. Si un parent ou ami entrevoit d’appuyer le Bloc au lieu de voter Libéral, il faut l’y encourager.
Au Québec, le vote conservateur est puissant là où il est enraciné — principalement dans Chaudière-Appalaches et la grande région de Québec — mais demeure marginal ou peu concurrentiel dans la majorité des autres circonscriptions. Pendant que le Bloc québécois et le Parti libéral se disputent la faveur des électeurs dans plusieurs coins de la province, les appuis au Parti conservateur, eux, tendent à demeurer stables. C’est ce que confirment aussi bien les agrégations de sondages que les résultats des six dernières élections fédérales.
La performance du Bloc peut avantager les Conservateurs au niveau pancanadien. Une douzaine de députés Libéraux de moins au Québec peut suffire à empêcher une majorité libérale, voire à faire élire un gouvernement conservateur minoritaire ou majoritaire.
L’électorat québécois est généralement progressiste, y compris les nationalistes – d’où la réticence à appuyer les Conservateurs. Cependant, un gouvernement Conservateur est la meilleure chose qui puisse arriver au nationalisme québécois, peu importe qu’on soit autonomiste ou indépendantiste.
Le Parti conservateur est historiquement plus favorable au respect des compétences provinciales que les Libéraux. L’ancien gouvernement Harper avait respecté un certain nombre de demandes du Québec en matière de décentralisation (culture, immigration, fiscalité). Même si cela ne correspond pas toujours à une reconnaissance formelle du « fait national québécois », cela crée de l’espace politique pour les provinces – ce qui est précisément ce que réclament les nationalistes québécois.
Contrairement aux Libéraux, qui ont institutionnalisé une approche centralisatrice et multiculturaliste, les Conservateurs sont enclins à décentraliser l’autorité fédérale afin d’accorder davantage de pouvoirs aux provinces. Tant que les Libéraux seront au pouvoir à Ottawa, le Québec ne pourra pas espérer rapatrier de compétences.
Le Parti conservateur peut sembler mou ou ambigu sur certains dossiers identitaires, mais il n’est pas engagé dans un progressisme multiculturaliste extrême semblable à ce que défendent les Libéraux. Avec les Conservateurs à Ottawa, ce ne sera jamais pire que les 10 ans que nous venons de traverser.
D’un point de vue stratégique, le Bloc et les Conservateurs n’ont pas intérêt à s’attaquer mutuellement en ce dernier droit de campagne. Les circonscriptions où ils s’affrontent directement (comme Beauport—Limoilou et Trois Rivières) annoncent des luttes à trois qui constituent des cas d’exception.
Au terme de 10 ans marqués par l’inflation galopante, une criminalité en forte hausse ainsi qu’une immigration massive légale et illégale, la pire issue demeure la réélection du Parti libéral en tant que gouvernement majoritaire. Sans parler de sa volonté de restreindre la liberté d’expression. Le cas échant, le peuple canadien deviendrait la risée du monde entier. Quoique prédisent les sondages, ce scénario catastrophe est loin d’être un passage obligé. Il est probable que certaines portions de l’électorat soient surreprésentées dans les projections ou encore, que l’attrait Libéral s’affaisse aussi abruptement qu’il est apparu.
Avec 78 des 343 circonscriptions, le Québec détermine presque 23% des sièges. Si la lutte est moindrement serrée ailleurs au pays, le Bloc peut avoir un effet tangible en tant que frein au pouvoir Libéral. Si le Bloc et les nationalistes québécois sont cohérents dans leur désir de rapatrier des pouvoirs, ils ne sauraient rêver d’un moment plus opportun que l’arrivée des conservateurs au pouvoir.
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