Une petite guerre se déroule présentement entre les géants du web que sont les GAFAM, et le gouvernement canadien. De même que des médias indépendants ou appartenant à l’État comme Radio-Canada. néanmoins, ceux-ci taisent volontairement un des aspects les plus dérangeants de la « crise » qui les secoue : leur financement par des subventions publiques. Pendant que le public n’a pas droit de cité, il faut énoncer les choses clairement : c’est au libre marché de décider de l’avenir des médias. Pas à des bureaucrates confortables épargnés de toutes critiques par ceux qu’ils maintiennent en vie. Voici quelques réflexions sur le sujet.

Il y a quelques années, c’était devenu trop problématique : La Presse, et le groupe Gesca, qui possédait de multiples quotidiens régionaux au Québec, s’en dirigeaient tout droit vers la faillite. On a longuement disserté sur le modèle de financement au passage numérique des médias traditionnels au format papier. Les commanditaires qui faisaient la pluie et le beau temps ont peu à peu déserté les pages de nos journaux pour aller sur les réseaux sociaux : au lieu de s’adresser à une masse indifférenciée, de monsieur et madame Tout-le-Monde, on va débourser pour cibler des groupes spécifiques de la société qui découvriront des publicités selon leurs revenus, âge, intérêts.

Pourquoi payer pour diffuser des publicités d’autos qui seront vues par des gens n’ayant pas l’intérêt pour tel type de véhicules? Pourquoi ne pas payer à la place pour publiciser ses pick-up à des travailleurs de la construction ou des entrepreneurs qui utilisent de toute façon les réseaux sociaux comme à peu près tout le monde? Publicité mieux ciblée, pour moins chère. Le « deal » est excellent.

C’est ce schéma qui dérange actuellement le petit monde des médias. Ceux-ci comptent pour le moment sur des formules d’abonnement, avec des « paywall » empêchant la lecture de plus de tant d’articles par mois. Ou bien on fera un appel aux dons. Deux modèles qui présentent des limites assez claires. Il paraît parfois déroutant de payer des abonnements en ligne, étant donné la multiplication de l’offre, et du peu d’intérêt qualitatif de nombreux sites. Si vous regardez plusieurs médias sur un sujet à l’étranger, vous verrez que l’on fait usage des dépêches de Reuters, de l’AFP, de la Presse canadienne.

Qu’il s’agisse de La Presse, de Radio-Canada, mais aussi de grands quotidiens étrangers comme le New York Times, Le Monde ou The Guardian, la qualité n’est plus aussi au rendez-vous que par le passé. La qualité des nouvelles internationales s’en fait particulièrement ressentir. On fait moins appel maintenant à des correspondants bien installés qu’à des pigistes au statut précaire. Ou bien on reprend les agences de presse, avec tous les biais que cela peut comporter.

Il y a aussi l’aspect doctrinal criard qui dérange le public à juste titre. Si Radio-Canada n’a jamais été un modèle de neutralité, ou encore d’objectivité, la couverture associée aux théories du genre, au racialisme, aux idéologies diversitaires se radicalise depuis l’arrivée au pouvoir de Justin Trudeau. Tout la vision du monde radio-canadienne se résume grosso modo à enfoncer dans la gorge de la population un programme politique progressiste. Même si cela est rejeté de façon quasi unanime par des gens qui en ont assez des leçons de morale.

De l’autre côté du spectre politique, chez Quebecor, on ne considère plus des sujets profonds, mais des faits divers sans intérêt. TVA martèle aussi à la population qu’une menace réelle ou imaginaire est en cours. De Donald Trump, qui a même eu « l’honneur » d’avoir son propre jingle lors des nouvelles à TVA, jusqu’aux dérapages inacceptables lors de la pandémie contre les non-vaccinés ou toute personne critique des mesures sanitaires, on se dit parfois que Pierre Karl Péladeau a peut-être récolté ce qu’il a semé.

Nous pourrions également parler de La Presse, qui n’a pas cru bon de revoir sa ligne éditoriale fédéraliste et progressiste alors qu’elle est financée à même les impôts de tous les contribuables du Québec. Dont un minimum de 40% d’indépendantistes qui ne s’identifie pas à cette excroissance, dernière survivante de l’empire Power Corporation au Québec.

Disons-le clairement : c’est au marché de décider qui va survivre ou mourir dans le petit monde des médias au Québec. Le marché, ce n’est pas seulement quelques personnes riches qui financent leurs intérêts, ce sont les contribuables, les citoyens, les lecteurs. Donc, monsieur et madame Tout-le-Monde. Les altermondialistes disaient à une certaine époque qu’acheter c’est voter.

Ce n’est pas pertinent que pour le café : ça concerne tous les aspects de votre vie. Vous voulez encourager les producteurs d’un film qui reflète vos valeurs? Vous pouvez voter avec votre argent. Ça compte aussi dans le sens contraire. Des producteurs détruisent votre enfance en créant un nouveau film sur un univers que vous aimiez, mais vous trouvez que les personnages ne sont là que pour cocher des cases de diversité? Vous avez parfaitement le droit de boycotter.

Les médias peuvent être soutenus ou boycottés. Combien de gens ont « débranché » le câble ces dernières années? Beaucoup plus que l’on croit. Et à l’inverse, vous pouvez financer le travail des créateurs que vous aimez. Patreon, mais aussi l’option rejoindre sur YouTube permettent à des médias alternatifs de proposer du contenu original qui font la différence. Même un j’aime sur Facebook, un retweet, ça fait une différence dans l’océan du web. Maintenant vous savez quoi faire.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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