Le racisme anti-québécois : ni une nouveauté ni une surprise

Jean-François Lisée a lancé un pavé dans la marre. Certains de nos concitoyens semblent surpris par ces témoignages de professeurs dans les écoles. Qu’il y ait un sentiment anti-québécois très présent chez les élèves. Pourquoi cela n’est pas une nouveauté? Ni une surprise? Voyons voir cela ensemble.

Le sentiment anti-québécois ne date pas d’hier. On peut remonter à l’arrivée des premiers immigrants européens, qu’il s’agisse des Irlandais, des Écossais ou plus tard des Juifs et des Italiens pour constater qu’à toutes ces époques, les nouveaux arrivants s’assimilaient à l’anglais et faisaient compétition aux Canadiens français dominés. Dans son livre Le colonialisme au Québec, André d’Allemagne rappelle que sur une vingtaine de groupes ethniques, les Canadiens-Français étaient parmi les plus pauvres, étant seulement dépassés par les Italiens et les Autochtones. Il faut tout de même rappeler que plus de 85% de la population à l’époque était Canadienne-Française.

Bien sûr, il y a eu un rattrapage économique sans précédent dans l’histoire. Les Québécois se sont enrichis, sont devenus propriétaires, accédaient à la classe moyenne comme le reste de l’Amérique du Nord. Par contre, ce sentiment de dédain ou d’hostilité de certains individus issus de l’immigration n’a pas fondamentalement changé. Par exemple, rappelons-nous de Mordecai Richler, écrivain juif montréalais, qui a comparé les femmes canadiennes-françaises à des truies destinées à donner naissance. Ou aux calomnies sur les filles du Roy qui seraient des prostituées. Ces faussetés sont toujours dans l’imaginaire collectif et plusieurs y croient, même des Québécois de souche.

La vision d’un Québec profondément raciste envers ses minorités ne date pas d’hier. Déjà à l’époque d’Honoré Mercier, vers la fin des années 1880, celui-ci ridiculisait dans ses lettres les récriminations victimaires des anglophones, qui s’estimaient discriminés. Et ce même s’ils dominaient l’économie de façon hégémonique, ne laissant que des professions libérales aux Canadiens français.

Nous pourrions nous dire que tout ça, c’est de l’histoire ancienne. Or, quand on lit l’essai Rhapsodie québécoise de l’auteur Akos Verboczy, on constate que le racisme envers la majorité historique était très présent durant les années 90 dans les écoles montréalaises. Cet « enfant de la loi 101 » raconte à un moment donné que durant un spectacle de musique, plusieurs nationalités furent représentées. Les élèves applaudissaient devant les Grecs, les Libanais, les Haïtiens. Mais cela a tourné au vinaigre quand des Québécois ont fait une de nos danses traditionnelles. Elles furent accueillies par des railleries. De même qu’un mépris devant ces « ploucs » que nous sommes. Un professeur d’origine québécoise a tenté d’ouvrir le dialogue avec ses élèves. Ces enseignants ont donc des décennies d’expérience en termes de mépris dans leurs classes.

Après ce bref historique, on peut se demander pourquoi c’est pire maintenant. Selon la plupart des intervenants, l’école est pire que « dans le temps ». Tous les enseignants et professionnels dans les écoles pourront vous le dire. Les parents ne prennent plus leurs responsabilités et tolèrent des comportements qui auraient été il y a peu absolument inacceptables. La violence envers les adultes est pire, de même que la diffusion des rumeurs par le biais des réseaux sociaux. Mélangé à ça un contexte social tendu, de retour de l’identité québécoise après l’ère glaciaire Charest-Couillard, et une mondialisation profitant aux géants du web américains, nous avons un cocktail explosif qui crispe les tensions dans les écoles.

De nombreux immigrants comprennent que dans un contexte nord-américain, les Québécois sont une minorité dominée. Et l’on n’immigre pas pour s’intégrer à une minorité marginalisée. Du moins c’est comme ça que beaucoup pensent. Néanmoins, plusieurs ont quand même fait l’effort de s’intégrer, d’apprendre notre langue et de s’enraciner chez nous. Cela doit être souligné. C’est pour cette raison que le Québec doit instaurer un nouveau contrat social avec ses nouveaux arrivants. D’un côté, on encourage ces gens à profiter de nouvelles opportunités économiques qu’ils n’auraient pas dans leur pays. Et de l’autre, nous exigeons le respect de notre langue et de notre culture. Le problème de plusieurs Québécois, c’est qu’ils n’exigent pas qu’on les respecte. Le respect, ça commence par soi-même. Et après les autres suivront.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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