Traduit de l’anglais. Texte de Frédérik-Xavier Duhamel publié sur le site du Globe and Mail le 20 juillet 2023
Au cours des huit dernières années, plus de 200 détenus, dont certains étaient incarcérés pour des infractions violentes, ont été libérés prématurément des prisons provinciales du Québec par erreur.
Les rapports d’incidents obtenus par le Globe and Mail montrent que le personnel correctionnel, ainsi que les greffiers et les policiers, ont confondu des détenus, mal calculé la durée des peines et mal communiqué entre eux, des erreurs qui ont conduit à la libération prématurée de 175 personnes entre janvier 2015 et janvier 2022. En plus de ces cas, 29 autres personnes ont été libérées avant la date prévue, entre avril 2022 et mars 2023, a déclaré Louise Quintin, porte-parole du ministère de la Sécurité publique.
Le Globe a déjà rapporté que des centaines de personnes ont été illégalement emprisonnées pendant des jours ou des mois au Québec au cours de la dernière décennie en raison d’erreurs administratives. Une victime présumée de détention illégale demande maintenant l’autorisation d’intenter un recours collectif contre le gouvernement provincial.
Le 31 mai, un fonctionnaire du ministère a envoyé par erreur au Globe 384 pages de rapports d’incidents non expurgés rédigés par les administrateurs et le personnel des services correctionnels.
Le 1er juin, le ministère a demandé au Globe de détruire les rapports parce qu’ils contenaient des informations personnelles confidentielles ainsi que des informations relatives à la sécurité, et a déclaré qu’il enverrait une version expurgée.
Après l’envoi de la version expurgée, le Globe a posé des questions demandant au ministère de justifier les suppressions, qui comprenaient non seulement les noms, mais aussi les chefs d’accusation pour lesquels les détenus avaient été condamnés ou faisaient l’objet d’une procédure. Le ministère a également supprimé les détails concernant la cause des incidents et leurs conséquences pour le public. Gaston Brumatti, fonctionnaire du ministère, a déclaré que les suppressions étaient justifiées en vertu de diverses dispositions de la législation provinciale sur l’accès à l’information, mais il a refusé d’aborder les suppressions individuelles.
Le ministère a également déclaré que, comme les questions du Globe suggéraient que les rapports non expurgés n’avaient pas encore été détruits, un « incident de confidentialité » a été signalé à la Commission d’accès à l’information du Québec.
[…]
Si la plupart des rapports indiquent que les fonctionnaires se sont rendu compte dans la journée qu’ils avaient libéré un délinquant prématurément, d’autres signalent que des erreurs n’ont pas été identifiées avant plusieurs jours, voire plusieurs mois.
Les fonctionnaires qui se démènent pour contacter les délinquants et les ramener derrière les barreaux disposent souvent de numéros de téléphone de la personne ou de ses proches qui s’avèrent inutiles. Lorsque le contact a été établi, certains délinquants se sont montrés coopératifs, d’autres non. De nombreux rapports d’incidents indiquent que les autorités étaient toujours à la recherche des délinquants au moment où ils ont été rédigés.
Dans les cas où des délinquants ont été libérés prématurément après avoir commis des crimes violents, y compris des voies de fait et des agressions sexuelles, les services correctionnels indiquent qu’ils ont dû en informer les victimes.
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À plusieurs reprises, ces erreurs ont conduit à des accusations de « liberté illégale » portées contre des contrevenants lorsque les fonctionnaires n’étaient pas en mesure de les contacter immédiatement, selon les rapports.
Les documents soulignent également que le manque de ressources et les difficultés techniques ont conduit à des erreurs.
Un rapport suggère qu’une libération prématurée a été en partie causée par un personnel surchargé. « Il convient de noter que 191 courriels, totalisant 267 documents, ont été traités le 25 octobre 2021 par les trois agents chargés de la gestion des peines », indique le rapport, qui décrit comment un délinquant a été libéré quelques heures après avoir reçu des documents exigeant son incarcération dans une affaire distincte ce jour-là.
Un autre rapport fait état d’un « problème récurrent avec le système de messagerie Outlook » après que des documents aient été reçus par le Centre de détention de Sorel-Tracy quatre heures après qu’un greffier les ait envoyés, ce qui a contribué à la libération prématurée d’un détenu.
Mme Quintin a refusé de répondre aux questions sur ces problèmes, car elle a déclaré que ces informations étaient censées être caviardées. Les rapports indiquent également que le personnel responsable des erreurs de libération devra expliquer ce qui s’est passé et pourrait faire l’objet de mesures disciplinaires. Mme Quintin a déclaré que le ministère ne commentait pas les dossiers des employés, mais que les sanctions « peuvent aller d’un avertissement écrit au licenciement ».
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