On a longtemps dit que Québec Solidaire était le « parti de la jeunesse ». Avec son image de jeunes branchés, à vendre des bas à 20$ la paire, on croyait que le parti avait trouvé sa petite niche. Or, à constater le brassage politique actuel, on constate que Québec Solidaire ne fait plus recette auprès des jeunes. Petite analyse d’un parti à la croisée des chemins.

Depuis un peu plus d’un mois, Ruba Ghazal, députée de Mercier et « héritière de Gérald Godin », se promène au Québec afin de faire la promotion de l’indépendance du Québec. S’étant même collé l’étiquette de porte-parole des gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean, elle multiplie les « honneurs » même si elle n’est pas au pouvoir, et ne le sera probablement jamais. Mais passons.

L’initiative « Nouveau Québec » vise à faire la promotion de l’indépendance avec la vision de Québec Solidaire. Ce qui est différent de jadis où QS se contentait de simplement dire que les Québécois seraient invités à participer à l’écriture d’une constitution qui sera votée par référendum. Il semble y avoir un semblant d’argumentaire de nos jours, notamment en ce qui a trait à l’environnement et à l’économie. Une nouveauté pour un parti qui a toujours jonglé avec des éléments indépendantistes hésitants, et des membres majoritairement fédéralistes.

Est-ce possible qu’il s’agisse d’une coïncidence avec la renaissance du Parti Québécois avec Paul St-Pierre Plamondon? Rien n’est laissé au hasard en politique. Pourtant, les événements de PSPP attirent les foules. Dans la salle de la faculté d’éducation de l’Université de Sherbrooke, il y avait plus de 200 personnes, avec seulement une vingtaine de « têtes grises ». Tous des jeunes à différents niveaux de leur scolarité. À l’Université de Montréal, pourtant pas un endroit spécialement accueillant envers les indépendantistes, les organisateurs ont dû refuser plus de 150 personnes à la porte, car trop s’étaient présentés pour venir écouter le chef du Parti Québécois.

Qu’en est-il de Québec Solidaire? Catherine Dorion, que l’on considère un peu méchamment comme la première belle-mère du parti, a attiré une trentaine de personnes à l’Université de Sherbrooke. Quant à Ruba Ghazal, une trentaine d’étudiants se sont pointés à l’Université, laissant au passage des chaises vides dans la salle. À Trois-Rivières, dans un café végan, une vingtaine de personnes écoutaient à moitié sa présentation. Et pour la plupart, il s’agissait de « têtes grises », pour reprendre un terme péjoratif utilisé par Radio X pour parler des péquistes.

Comment expliquer cela? Pourtant, Québec Solidaire a envahi les universités depuis longtemps. On s’attendrait à un pouvoir de mobilisation de loin supérieur à celui du Parti Québécois, parti évincé par les militants qsistes à chaque fois que l’occasion s’est présentée. On pourrait aussi voir une question générationnelle.

Québec Solidaire, même si le parti fut fondé en 2006, a vraiment pris son envol dans la foulée du printemps 2012. C’est le parti de la génération « carré rouge ». Une génération encore idéaliste, qui croyait que l’avenir serait meilleur si l’on se mobilisait pour. Or, aujourd’hui, ces jeunes ont vieilli. Ils ont eu des enfants. Ou bien ils travaillent et n’ont pas le temps pour la politique. Québec Solidaire doit faire face à un électorat vieillissant. Les Y vieillissent. Les Z et les Alpha sont moins idéalistes justement à cause de leurs conditions matérielles.

Quant à la nouvelle génération, qui constate qu’elle n’aura pas le même niveau de vie que ses parents, demeure pragmatique. Plus terre-à-terre, elle mise sur un parti social-démocrate certes, mais qui propose des solutions pragmatiques et un vrai programme au lieu du « pelletage de nuages ». Il s’agit pour elle de sauver les meubles, ou du moins ceux qui sont récupérables. Pour ces raisons, l’avenir de Québec Solidaire est incertain. Gabriel Nadeau-Dubois a déjà dit qu’il ne se représenterait pas s’il obtenait un autre score décevant aux prochaines élections de 2026. Le parti le sait qu’il joue son avenir. Et qu’il est loin d’être garanti avec une nouvelle génération d’électeurs plus pragmatiques que celles d’avant.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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