Voici trois politiques fédérales qui font que vous devrez peut-être prendre des douches froides cet hiver

Il est souvent question dans les médias au Québec ces temps-ci de la future pénurie d’électricité qui nous affectera. La croissance trop rapide de la population, nos exportations vers les États-Unis et des entreprises particulièrement gourmandes ont mis sur la corde raide un réseau électrique que l’on croyait invincible pour l’éternité. Cependant, un acteur auquel on pense moins est en train de nuire aux efforts du Québec pour son indépendance énergétique : le gouvernement fédéral. Voici trois politiques fédérales qui font que vous devrez peut-être prendre des douches froides cet hiver.

La boucle de l’Atlantique : Terre-Neuve contourne le Québec avec notre argent

Cela n’est un secret pour personne que le Québec n’ait rien reçu de la part du gouvernement canadien pour ses projets de barrages à la Baie James ou sur la Côte-Nord. Nous consommons environ aussi environ 15% de notre électricité depuis la centrale de Churchill Falls au Labrador, au grand mécontentement des Terre-Neuviens. En effet, même si nous avons investi et pris le risque de construire ce barrage, Terre-Neuve s’estime lésée par des redevances considérées comme trop faibles.

Cependant, le projet de boucle de l’Atlantique vise à approvisionner les provinces maritimes en électricité du Labrador par le biais d’infrastructures subventionnées en bonne partie par le gouvernement fédéral. On parle de 4,5 milliards de dollars pour l’argent que le fédéral est prêt à mettre sur la table. Le Québec se retrouve ainsi à payer pour l’exportation de l’électricité terre-neuvienne. Pour le moment, le projet est sur la glace, mais une reprise est toujours possible.

La centrale de Muskrat Falls était un projet censé exporter de l’électricité de Terre-Neuve vers les maritimes sans passer par le Québec. Mais le gouvernement canadien se retrouve à financer en partie cet échec monumental aux dépens des contribuables de tout le Canada, dont le Québec.

Le projet de loi C-69 et l’ingérence du fédéral dans les enjeux environnementaux

Même si la Cour Suprême a en partie invalidé le projet de loi C-69 il y a quelques jours, il demeure néanmoins que le fédéral pourra toujours empêcher des travaux d’infrastructures des provinces au nom des cours d’eau et des oiseaux migrateurs par exemple. En effet, ces compétences demeurent dans le giron fédéral et pourraient éventuellement entraver la construction de nouveaux barrages au Québec. Cette loi devait obliger les provinces à suivre les normes fédérales en environnement par le biais d’audiences publiques.

Les provinces de l’ouest sont les premières concernées puisqu’elles extraient du gaz et du pétrole. Mais le Québec pourrait aussi être éventuellement concerné par les évaluations fédérales dans ses champs de compétences. Le fédéral ayant déjà affirmé qu’il serait prêt à empêcher la construction de nouveaux barrages dans l’esprit de cette loi.

De l’énergie carboneutre d’ici 2035 au Canada : le Québec ne pourra faire ce qu’il veut

Le ministre de l’Environnement Steven Guilbeault a dévoilé en août dernier son projet de rendre l’énergie carboneutre d’ici 2035 au Canada. En effet, les provinces devront avoir recours à des sources d’énergie propres, c’est-à-dire hydro-électricité, nucléaire, éolienne ou solaire, pour leurs besoins. On estime qu’avec l’électrification des transports, la demande en énergie devrait augmenter d’ici 2050.

Or, le Québec produit déjà 99% de son électricité par des énergies propres. Le 1% restant, il s’agit de centrale au diesel ou au mazout aux Îles-de-la-Madeleine ou dans les villages nordiques qui ne sont pas reliés au reste du Québec. Cependant, il est probable que l’on utilise à terme la centrale au gaz de Bécancour pour les pics de demande en hiver. Or, le fédéral ne voudra pas.

De même que les provinces de l’ouest pensent que l’échéancier est irréaliste et se traduira par des hausses de tarif pour ses citoyens, on peut raisonnablement penser que le Québec sera entravé une fois de plus par le gouvernement fédéral même s’il est le producteur d’énergie le plus propre au Canada. Ce n’est donc pas au Canada à nous dire quoi faire.

Ces trois mesures politiques, même si elles sont gelées ou invalidées en partie, demeurent néanmoins assez vagues pour que le gouvernement fédéral puisse mettre ses mains dans nos politiques énergétiques. Le Québec a depuis longtemps développé sa propre expertise, et ce sans l’argent d’Ottawa. Nous étions indépendants jusqu’à maintenant sur le plan énergétique. Cela devrait continuer ainsi.

Anthony Tremblay

Après des études en politique appliquée à l'Université de Sherbrooke, Anthony Tremblay s'est intéressé notamment aux questions sociales telles que le logement ou l'itinérance, mais aussi à la politique de la Chine, qu'il a visité et où il a enseigné l'anglais. Il vit à Sherbrooke avec ses deux chiens.

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