La guerre culturelle contre le néo-progressisme woke doit se combattre sur son propre terrain, soit les arènes culturelle et commerciale. Parce que le champ politique ne suffit pas, même en présence d’une réelle volonté parlementaire pour mener cette lutte, telle qu’on peut l’observer dans certains États américains et pays d’Europe de l’Est. C’est pourquoi une petite victoire dans le ring de la Bud Light fouette le moral des troupes.
Rappel: le wokisme est issu du féminisme intersectionnel et repose sur la notion d’oppression systémique: toutes les femmes sont opprimées par le patriarcat, les personnes de couleur par les blancs, les minorités religieuses par la majorité d’héritage chrétien, les homosexuels par les hétérosexuels, et les personnes transgenres, par les gens qui s’identifient à leur sexe biologique. Le wokisme semble actuellement avoir choisi de faire du combat trans son fer de lance.
Bien qu’il l’ait supplantée en tant que combat de la gauche, le wokisme n’est pas issu de la lutte ouvrière. Il ne provient pas des classes populaires. C’est plutôt un phénomène bourgeois qui a émané des départements de sciences molles des campus universitaires.
Le wokisme est désormais récupéré par l’élite corporatiste, qui en fait doublement la promotion: politiquement, par l’imposition de la notation ESG [un système de crédit social auquel sont assujetties les entreprises], et aussi culturellement, par le biais des industries du divertissement et de la publicité – ce qui nous amène à l’affaire Bud Light, qui a fait d’une personnalité transgenre populaire sur le réseau Tik Tok un ambassadeur de la marque.
La classe corporatiste a épousé la lutte transgenre. Le marketing ne cherche vraisemblablement plus à plaire à une base de consommateurs, mais à plaire au régime – et celui-ci est désormais de religion woke.
Dylan Mulvaney
Certains diront qu’il ne faut pas donner davantage d’attention à cet individu, qui est devenu populaire à cause de ses détracteurs – sauf que le personnage semble tellement bien pistonné que le mutisme de ses critiques ne changerait probablement rien à sa surexposition médiatique. Le système a décidé d’en faire non seulement une vedette, mais le visage du transgenrisme.
Après un succès très modeste dans le show-business, Dylan Mulvaney a fait son coming-out en tant que femme trans en mars 2022, à l’âge de 25 ans, avec une courte vidéo intitulée « 1er jour en tant que fille », dans laquelle il est question d’avoir pleuré 3 fois, écrit un courriel cinglant sans l’envoyer et commandé des robes au-dessus de son budget.
Par la suite, Mulvaney s’est fait connaître pour vouloir « normaliser la bosse », c’est-à-dire la protubérance causée par les organes génitaux mâle dans les vêtements des femmes trans. Sa chirurgie de féminisation faciale a aussi été documentée sur vidéo.
Plus que n’importe quelle autre femme trans, Mulvaney réduit la femme à l’exagération de stéréotypes, dont la flamboyance et la superficialité ne sont égalées que chez certains drags queens. Son personnage de fillette ou d’adolescente surexcitée est tellement surfait que plusieurs ont initialement cru que le but était de « troller »: de débouter l’idéologie du genre et la mouvance LGBTQ+ par le ridicule.
Apparemment non. Dylan Mulvaney s’est fait inviter à la Maison Blanche pour s’entretenir avec le président Joe Biden au sujet des soins « d’affirmation du genre » pour les jeunes transgenres – dont ce dernier approuve inconditionnellement. Au-delà de sa trans-identité, Mulvaney appuie la théorie du genre, selon laquelle l’auto-identification en tant que personne du sexe opposé doit suffire afin d’être considéré à 100% comme telle.
On retrouve subitement ce personnage exubérant partout: dans une annonce de produit de soin pour le visage Olay, comme porte-parole de l’entreprise de vêtements Nike, au talk-show de l’actrice Drew Barrymore, qui s’est carrément agenouillée à ses pieds.
Bud Light
En juillet 2022, Alissa Heinerscheid devient Vice-Présidente du marketing chez Bud Light. Sur sa page Linkedin, désormais supprimée et sur laquelle elle indiquait ses pronoms, Heinerscheid mentionnait être la première femme à diriger Bud Light en 40 ans d’existence du produit.
En entrevue, Heinerscheid déclare qu’il faut « faire évoluer et élever cette marque incroyablement emblématique » avec « une campagne vraiment inclusive ». La société a ainsi annoncé une prochaine gamme de canettes sur le thème de la fierté LGBTQ+ avec différents pronoms.
Dans le cadre d’un partenariat sponsorisé avec Bud Light, Mulvaney fait la promotion du « concours Easy Carry », qui donne la chance de gagner 15,000 $ à quiconque publie une vidéo de lui-même tenant autant de canettes de Bud Light que possible.
Dans la vidéo, Mulvaney montre une canette [non commerciale] de Bud Light portant son visage qui a été produite et offerte en cadeau pour célébrer son 365ème jour « en tant que fille ».
« Go Woke Go Broke »
Le contrecoup a toutefois été intense: le chanteur Kid Rock a publié une vidéo de lui en train de fusiller des canettes de Bud Light. Les appels au boycott ont inondé les réseaux sociaux. De nombreuses femmes, dont la représentante Républicaine Lauren Boebert, ont lancé des tweets pour afficher leurs nombres de jours en tant que femmes [soit la totalité de leur vivant] et signaler que Bud Light ne les avait jamais célébrées de la sorte.
Au-delà d’une semaine après la diffusion de la vidéo, l’appel au boycott de Bud Light continue de dominer les réseaux sociaux. Tellement que le cours de l’action d’Anheuser-Busch [la société mère] a chuté, effaçant 3 milliards de dollars de la capitalisation boursière de l’entreprise [en date du 11 avril]. Et la baisse se poursuit.
On peut arguer que ce montant n’est qu’une goutte dans la citerne et que la perte sera rapidement récupérée une fois la poussière retombée. Aussi, que tous les autres gros producteurs de bière soutiennent également l’idéologie woke. Toutefois, il est encourageant de constater que l’indignation anti-woke des réseaux sociaux peut se traduire en action concrète. Ce boycott n’est pas passé inaperçu. Il lance un avertissement, montrant à l’industrie du marketing que le wokisme n’est pas payant en publicité. Reste à espérer que le mouvement soit endurant et qu’il s’étende à d’autres marques. Nike et Olay font également face à de fortes réactions de désapprobation de la part de la clientèle féminine.
Ces contrecoups peuvent toutefois servir de rampe de lancement pour de nouvelles marques. En réponse au parrainage de Dylan Mulvaney par Bud Light, Seth Weathers [PDG de Freedom Speaks Up et Conservative Body] vient de dévoiler le lancement de la bière Conservative Dad’s Ultra Right 100% Woke-Free American Beer.
Il sera encourageant de voir la réaction au marketing woke s’étendre à d’autres types de produits. Pour gagner la guerre culturelle contre l’idéologie de l’élite, il faut lui opposer une contre-culture, qui comporte ses propres biens de consommation.