Jérôme Blanchet-Gravel, éditeur en chef du média indépendant Libre Média, a pris un malin plaisir ces derniers mois à souligner sur sa page personnelle les pires enjeux de société québécois nous ayant été offerts par les médias grand public. Arguant avec force que le Québec est une société vieille, dévitalisée et obsédée par la réglementation de chaque aspect de la vie, il a poussé l’émergence de l’hashtag « #GrandsEnjeux » pour se moquer de la petitesse de nos débats.
Dans un récent article intitulé « Au Québec, la religion des règles », Blanchet-Gravel précise un peu plus sa pensée :
« J’espère ne pas surprendre en affirmant que le Québec a sombré dans une folle réglomanie, c’est-à-dire cette tendance qui consiste en gros à tout réglementer au nom de la sécurité et du bien-être de tous. […] Loin d’être centrée sur des enjeux dignes du journalisme, l’actualité québécoise est en train de devenir une litanie de faits divers présentés sous un angle réglementaire, la conformité aux règles étant le critère absolu pour juger de ce qui est bien ou non. »
La CAQ comme vecteur principal de la « réglomanie«
Blanchet-Gravel rappelle qu’avec la pandémie, la CAQ est devenue l’un des principaux vecteurs de cette tendance à tout réglementer et contrôler. En effet, la crise sanitaire semble avoir trop habitué le parti au pouvoir d’un contrôle total au nom du bien-être collectif, un rôle qu’il ne semble pas à même d’abandonner. L’auteur nous rappelle alors que pour recommencer à vivre normalement, il faudra d’abord réapprendre à vivre en acceptant le facteur de risque inhérent à l’existence.
« Bien sûr, le parti représentant le mieux cette tendance mortifère est la Coalition Avenir Québec de François Legault, un parti bien décidé à poursuivre dans la voie de l’étatisme vide, sans compréhension réelle du fonctionnement de la culture vivante.
Pour protéger notre identité, il nous faut aujourd’hui bien plus que multiplier les lois dans une orgie administrative. Ce qu’il nous faut pour notre survie, c’est d’abord remettre la vie au cœur de notre existence mécanique et abîmée, car exagérément régulée. »
Québec Nouvelles tenait aujourd’hui à vous offrir une compilation non-exhaustive de ces tristes controverses ayant parsemé notre été :
En mai :
– Le maire Marchand lance une opération policière « bruits perturbateurs » pour contrôler les niveaux sonores suite à des plaintes concernant des véhicules bruyants dans la nuit dans le Vieux-Québec.
– Les détaillants de piscines se préparent à « affronter la vague » du démarrage des piscines.
– Le conseil de quartier de Lairet adopte une résolution pour inviter la ville à encadrer l’utilisation des BBQ et fumoirs au charbon de bois.
– « La ville de Québec entend couper l’herbe sous le pied des arroseurs de pelouse, et le maire les invite à ouvrir leur cœur au trèfle ».
– « La cour du Québec juge que planter du trèfle n’est pas une micro-agression. »
– Les médias avertissent la population avec gravité qu’on aura un été chaud marqué d’orage violents.
En juin :
– Débat autour d’un parc à chiens qualifié de « crise » et de « far west » par les médias. Un parc du très tranquille secteur de Sillery, dans la ville de Québec, est démantelé.
– « Explosions de moustiques au Québec », titre de manière sensationnaliste un journal.
– Le Journal de Montréal s’inquiète de l’accès des jeunes aux boissons énergisantes.
– La ville de Beloeil remplace de nouveaux panneaux vitrés de basketball par de vieux panneaux en plastique suite à une plainte de bruit.
– Le Canada propose d’apposer des avertissements sanitaires sur chaque cigarette.
– Retrait de paniers de basketball à Châteauguay en raison du bruit du ballon qui dérange le voisinage.
– Le grand prix est associé à la prostitution, au bruit et à la pollution.
– Le voisinage du restaurant Le 737 s’inquiète de sa réouverture pour la saison estivale en raison du bruit occasionné. Des inspecteurs font des relevés du niveau sonore.
– Josée Legault s’insurge qu’une autre cliente à l’épicerie ne porte pas de masque alors qu’elle en a entièrement le droit depuis que l’obligation a été levée.
En juillet :
– « Discorde à Neuville » autour d’un stationnement en bordure d’un casse-croute.
– Controverse autour de la décision de la Ville de Sherbrooke de moins tondre le gazon dans plusieurs secteurs.
– Controverse autour de Samuel Girard, joueur de hockey professionnel ayant consommé « un peu trop » d’alcool lors d’une célébration avec la coupe Stanley.
– « Quel est le coût environnemental de vos barbecues d’été? »
– « Force du son excessive sur les plaines ». Un éditorial de Christian Côté de Donnacona qui s’inquiète pour sa santé auditive lors du festival d’été.
– « Des coyotes sèment la terreur » en première page du Journal de Montréal.
– « Des piétons surpris par des oiseaux agressifs dans le Vieux-Montréal ».
– « Dites non aux gougounes », titre le journal de Montréal au sujet des maux de pieds occasionnés par celles-ci.
– Des médias partout dans le monde relaie une étude qui affirmerait que faire des siestes augmenterait les risques de morts prématurées.
– Débat autour des trottinettes électriques sur les pistes cyclables.
– Québec devrait-il interdire aux commerces climatisés de laisser les portes ouvertes?
– Stéphane Gendron propose d’interdire l’alcool dans les avions.
– Outrage contre la proposition automatique de pourboire dans les restaurants.
– Et quoi encore?
Pour lire Jérôme Blanchet-Gravel:
https://libremedia.ca/article/au-quebec-la-religion-des-regles?fbclid=IwAR06axo7s4JOkSEqOYtjFYZwEzkKhPIFfM8cD2HKdTIdanAp_xmqhqa2lLU