Traduit de l’anglais. Article d’Alanna Smith publié sur le site du Globe & Mail le 4 mai 2025.
Au cours des six derniers mois seulement, des travailleurs de la santé ont été poignardés, agressés physiquement et forcés de se mettre à l’abri alors que des balles atteignaient l’extérieur d’un service d’urgence, dans des incidents de sécurité sans lien entre eux dans des hôpitaux à travers le Canada.
Les travailleurs de première ligne affirment que ces événements violents ne sont qu’un petit aperçu de la réalité derrière les portes des urgences, où la violence verbale et physique semble en augmentation, mettant en danger à la fois les patients et le personnel. L’une des principales préoccupations concerne la présence croissante d’armes – en particulier les couteaux.
En réponse, certains hôpitaux au Canada ont installé des systèmes de détection d’armes. Cette technologie utilise l’intelligence artificielle pour détecter et identifier les armes, telles que les couteaux ou les armes à feu, tout en les distinguant des clés ou d’autres objets du quotidien. Les armes illégales sont alors confisquées, tandis que les armes légales peuvent être entreposées et retournées au patient à sa sortie de l’hôpital.
La violence et les agressions envers les travailleurs de la santé sont en hausse en Ontario, selon un nouveau sondage
London, en Ontario, est l’une des dernières villes à adopter ce système. L’Hôpital universitaire a commencé à l’utiliser le mois dernier, et l’Hôpital Victoria, où une fusillade s’est produite dans la zone des urgences en décembre dernier, commencera à l’utiliser mardi.
David Musyj, directeur du London Health Sciences Centre, le réseau hospitalier de la ville, affirme que l’on discutait depuis des mois de l’installation du système de détection, mais que la fusillade a été « la goutte de trop ». Dès janvier, le LHSC avait signé un bail avec Convergint Canada pour le matériel.
« Si nous pouvons prévenir ne serait-ce qu’un seul incident, c’est déjà énorme », a déclaré M. Musyj.
Le premier hôpital au Canada à avoir installé ce système est le Windsor Regional Hospital, en octobre 2023. Environ 10 armes par an étaient détectées avant l’installation du système. Au cours des 18 mois suivants, plus de 4 000 objets ont été trouvés, environ 50 % étant des couteaux, en plus de poings américains et de matériel lié à la drogue.
M. Musyj indique qu’on observe maintenant à Windsor une baisse de la prévalence des armes, les détections quotidiennes passant de 17 à environ 7 depuis l’installation. Il reconnaît que le détecteur à lui seul ne préviendra pas tous les incidents violents, mais il s’agit d’un outil supplémentaire pour réduire les risques.
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Les syndicats d’infirmières du pays réclament depuis des années des mesures de sécurité renforcées. L’appel s’est intensifié à la suite d’incidents récents, notamment une infirmière étranglée jusqu’à l’inconscience à l’Hôpital général de Vancouver le mois dernier, et deux travailleurs de la santé poignardés à l’Hôpital infirmier d’Halifax en janvier.
Les défenseurs soulignent que ces violences ont un lourd impact mental et physique sur les travailleurs de première ligne, mais que les employeurs et le gouvernement n’en font pas assez pour enrayer la crise. Le personnel des urgences est particulièrement vulnérable en raison de la surpopulation, du manque de personnel et de la complexité croissante des patients, dont un nombre croissant se présentent pour des problèmes de santé mentale ou de toxicomanie.
Linda Silas, présidente de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et d’infirmiers, rappelle que la première campagne de l’organisation pour éliminer la violence dans le secteur de la santé remonte à 1991. Pourtant, il a fallu attendre des décennies avant que le Code criminel ne soit modifié, en 2022, pour renforcer la protection des travailleurs de la santé. Les progrès, dit-elle, sont lents.
« Un hôpital devrait être un lieu où l’on reçoit des soins, où famille et amis sont les bienvenus. Et maintenant, on en est rendus à ce que les syndicats d’infirmières discutent avec les gouvernements et les employeurs pour demander une protection équivalente à celle d’un bâtiment gouvernemental », explique Mme Silas.
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En Colombie-Britannique, la violence au travail est l’une des principales causes de blessures chez les infirmières. Adriane Gear, présidente du syndicat des infirmières de la Colombie-Britannique, précise qu’en moyenne, les infirmières soumettent environ 46 demandes d’indemnisation par mois à WorkSafeBC en raison de violences nécessitant un congé pour blessures physiques ou troubles mentaux. Ce chiffre était d’environ 26 en 2018.
« Les infirmières ont une très grande tolérance envers les comportements irrespectueux ou abusifs, mais le problème, c’est que c’est devenu la norme », dit Mme Gear. « Ce que les gens ne comprennent pas, c’est que si ce n’est pas sécuritaire pour les infirmières ou les autres travailleurs de la santé, ce n’est pas sécuritaire non plus pour les patients. »