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Développement économique : le Québec dans un cul-de-sac

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Parfois, à force de lancer des signaux d’alarme qui restent sans suite, on finit par réaliser que le problème est déjà là, qu’il s’est concrétisé et est désormais une réalité. C’est un peu l’impression que donnent les nouvelles en lien avec l’économie et l’énergie en ce moment au Québec. Entre 2019 et aujourd’hui, nous sommes passés d’une société historiquement prospère d’un point de vue énergétique, et qui pouvait stimuler fortement son développement, à une société de déficits et de rationnement énergétique où le développement économique est étouffé. Ce nouveau contexte aura nécessairement des répercussions négatives sur notre prospérité dans les prochaines décennies.

Un développement étouffé par le manque d’énergie

En effet, on apprenait la semaine dernière dans un article du Journal de Montréal que selon un sondage, en ce moment même, 35% des entreprises québécoises n’auraient pas accès à assez d’électricité. Cela veut dire que beaucoup d’entre elles doivent mettre leur développement et leurs investissements sur pause.

En d’autre mot, le développement économique du Québec tourne déjà au ralenti en raison du déficit énergétique d’Hydro-Québec.

Face à ce constat, le ministre de l’Énergie et du développement, Pierre Fitzgibbon veut se faire rassurant afin de ne pas ruiner complètement l’attractivité du Québec pour les investisseurs : « J’ai 130 projets, 13000 mégawatts… C’est un avantage d’avoir tous ces projets-là. Il faut juste être transparent et s’assurer de dire quand l’énergie sera disponible. Ça va se régler, il y a beaucoup de projets qui peuvent se faire plus tard. »

Bien qu’il soit légitime de vouloir calmer le jeu, le problème demeure entier : dans le meilleur des mondes, ce ne serait pas au gouvernement de décider de manière arbitraire quel projet devrait avoir priorité sur l’autre. Le fait que ce soit le cas aujourd’hui, et que Fitzgibbon puisse déterminer que certains projets « peuvent se faire plus tard » indique clairement une faillite du gouvernement à assurer un contexte économique en santé pour les entreprises. On a complètement politisé notre développement économique, ce qui nous rend nettement moins compétitifs.

Les PME sacrifiées

Dans un autre article pour TVA Nouvelles, le même journaliste nous apprenait quelques jours auparavant que la facture d’électricité des petites et moyennes entreprises allait exploser. En effet, selon la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), la facture des PME devrait augmenter de 247% ; une catastrophe annoncée pour le Québec : «Ça va faire mal aux PME, mais aussi aux citoyens. Parce qu’ultimement, la PME, quand elle a une augmentation de coûts, sa réaction première est d’augmenter le coût de ses produits».

Avec des investissements prévus de 155 à 185 milliards d’ici 2035, Hydro-Québec n’aura pas le choix d’augmenter ses tarifs pour tous les consommateurs. Mais en raison de la limitation des augmentations du tarif résidentiel à 3% et de certains arrangements particulier pour les grands industriels, on craint que les PME se retrouvent avec le gros de la facture.

Bref, c’est bien beau les grands projets et jeter des milliards dans la filière des batteries, mais au même moment, on est en train de sacrifier la compétitivité de nos petites et moyennes entreprises, qui stimulent nos économies régionales et locales, et d’ouvrir grand la porte à leur remplacement par des multinationales étrangères.

«Les industries font face à une concurrence intense à l’échelle planétaire. Des factures d’électricité prévisibles et équitables sont donc essentielles pour maintenir la compétitivité des industries du Québec», souligne pour sa part Jocelyn B. Allard, président de l’Association québécoise des consommateurs industriels d’électricité (l’AQCIE), qui a collaboré au sondage. »

Or s’il y a bien un secteur économique qu’on veut protéger, c’est bien celui-là. Mais ce n’est pas le cas en ce moment.

En conséquence, la FCEI souhaiterait que les augmentations de tarifs soient plus équitables entre les clients résidentiels, les PME et les grands industriels. Selon elle, le récent changement de rôle de la Régie de l’énergie aurait « ouvert la voie à des augmentations tarifaires significatives pour les propriétaires de PME et surtout à la politisation des tarifs d’électricité »‘.

Et c’est sans compter, aussi, l’augmentation drastique des tarifs d’Énergir pour le gaz naturel qui, encore une fois, tombe complètement sur le dos des entreprises et des industriels qui en dépendent. Autrement dit ; même les alternatives deviendront hors de prix en même temps que l’électricité d’Hydro-Québec.

L’obstination québécoise

Les constats sont assez clairs au Québec : si on maintient le cap d’une transition énergétique radicale comme on le fait en ce moment, on va manquer d’électricité et sérieusement affecter notre développement économique et notre prospérité. Ce qui n’est pas clair, c’est comment s’entendre sur une solution.

Le Québec semble s’accrocher au passé : il ne veut pas remettre en question le monopole d’Hydro-Québec sur la vente d’électricité, il ne veut pas remettre en question le gel des hausses de tarifs aux clients résidentiels, il ne veut pas développer d’autres sources d’énergies pour pallier ses déficits, il ne veut pas remettre en question son État providence obèse… Donc, apparemment, il ne fait rien et attend l’inévitable.

Dans le contexte inflationniste actuel, nous sommes pourtant déjà dans une situation économique précaire ; il ne fait aucun sens qu’on continue de se diriger tête première vers une paralysie de notre développement économique.

82% des entreprises se montrent favorables à ce que les entreprises produisent et revendent elles-mêmes de l’électricité pour combler le déficit énergétique, mais la chose est présentée de manière alarmiste dans les médias comme une « privatisation d’Hydro-Québec ». Les québécois se ferment donc comme des huîtres et refusent obstinément de considérer l’idée.

Hausser les tarifs résidentiels d’Hydro-Québec reçoit à peu près le même niveau d’hostilité : ça va contre le principe du « fleuron qui appartient aux Québécois en priorité ».

Pour ce qui est de nos objectifs de transition verte, même obstination irrationnelle. Malgré des sacrifices complètement disproportionnés par rapport à notre contribution tout à fait marginale aux émissions globales de gaz à effet de serre, on continue de se faire champion de l’environnement en étant le seul État nord-américain à bannir complètement l’exploration et le développement des hydrocarbures.

On préfère donc sacrifier complètement notre économie pour très peu d’impact sur les GES globaux par simple signalement de vertu, alors que notre problème serait entièrement réglé si on ouvrait la porte au gaz naturel ou au nucléaire, entre autres exemples.

Avec les réserves en gaz que nous avons, nous pourrions être riches comme la Norvège et faire diminuer les gaz à effet de serre beaucoup plus drastiquement ailleurs dans le monde en remplaçant le charbon… Mais non. Le Québec est trop tête de cochon et reste planté là à ne rien faire pendant que son économie est en train de couler.

Quelques perles d’honnêteté

Le style de Pierre Fitzgibbon demeure intéressant : on sent clairement qu’il tente de tenir la ligne de la décarbonation et de la transition du mieux qu’il peut, en bon politicien, et de rassurer les investisseurs, mais une fois de temps en temps, il sort des petites perles d’honnêteté qui ramènent l’espoir d’un minimum de réalisme au sein du gouvernement Legault. On sent bien que lui et Michael Sabia ne sont pas aussi fermés qu’on le pense aux diverses alternatives qui se présentent à nous.

Par exemple, il y a un mois, le ministre de l’Énergie et du développement s’échappait un peu en déclarant qu’il préférait retarder l’électrification des autobus : «Conséquemment, la question de savoir [si] on va trop vite dans l’électrification est très valable. Et moi, je préfère retarder l’adoption des véhicules électriques au lieu de subventionner. L’État providence, il y a des limites. On n’ira pas mettre de l’argent partout.» Il poursuivit alors d’une manière un peu floue : « Si on travaille comme il faut, avoir les voitures, les industries, peut-être qu’on va… je ne dis pas qu’on va le faire… mais peut-être qu’on va retarder ».

Ces quelques moments de transparence et d’honnêteté donnent l’espoir que, peut-être, le gouvernement pourrait changer d’idée. Derrière toutes ces lignes de presse et ces slogans convaincus, on a droit de rêver un peu qu’ultimement, le gouvernement Legault fera la bonne décision en freinant la transition plutôt que le développement économique du Québec.

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