Récemment, une manifestation de citoyens voulant empêcher une séance de lecture de contes pour enfants ayant pour lecteur la drag queen Barbada a ravivé le débat sur la question des drag queens auprès des enfants, alors parlons-en. Parlons de la tendance qui se répand dans plusieurs pays d’Occident à organiser des événements impliquant des drag queens et s’adressant à un public composé d’enfants. Les parents et, en fait, tous les adultes, devraient pouvoir poser des questions et émettre des réserves, mais il est impossible de le faire sans qu’une certaine frange de gauche, les wokes, pour reprendre l’appellation à la mode, les taxent d’intolérance, de fermeture à la diversité, d’homophobie et de transphobie.
Plusieurs ont fait la comparaison entre le Québec et les États-Unis, certains déplorant l’intolérance des conservateurs états-uniens et vantant la tolérance dont font preuve les Canadiens et les Québécois, qui n’adoptent pas de loi anti-drag queens, EUX. D’aucuns reprochent aux conservateurs d’instaurer une cancel culture en voulant empêcher les activités impliquant des drag queens d’avoir lieu en présence d’enfants. Cette comparaison avec la cancel culture néglige pourtant une différence de taille : il y a une grande différence entre contrôler ce qui est exprimé devant des enfants (a fortiori dans un cadre censé être éducatif) et empêcher des adultes de donner ou d’écouter des conférences dans les universités, par exemple. La cancel culture qui est reprochée à la gauche woke consiste à interdire ou à empêcher d’exposer des étudiants aux études supérieures, ainsi que d’autres adultes, à certaines idées, à certains points de vue, à certains faits ; si les wokes voulaient démontrer que la droite fait la même chose qu’eux, ils ont choisi un mauvais exemple (sans oublier qu’une attitude déplorable ne devient pas justifiée parce qu’on est plusieurs à l’adopter).
Ceci dit, même quand on veut contrôler ce qui est exprimé devant des enfants, on n’est pas exempté de donner des arguments pour justifier d’interdire ou d’éviter certaines formes d’expression. Aussi, il faut regarder le contexte dans lequel les gens réagissent afin de mieux comprendre les réactions : les activités destinées aux enfants qui impliquent des drag queens sont présentées comme une manière de susciter la tolérance et l’ouverture à la différence chez les enfants alors qu’en réalité, ce n’est pas que ça. En fait, certains pourraient arguer que ce n’est pas ça du tout.
Sous couvert de promouvoir l’ouverture à la diversité, de promouvoir la tolérance, il est devenu commun de promouvoir l’idéologie queer. En d’autres termes, il est notamment devenu commun de présenter à des publics de tous âges un discours selon lequel l’homme et la femme sont des constructions sociales, ou encore qu’être un homme ou une femme est une question de ressenti. On dit que chacun peut être homme, femme ou ni l’un ni l’autre indépendamment de la réalité biologique qui le caractérise. Endosser un tel discours n’est pas de l’ouverture à la diversité ni de la tolérance. Rejeter ce discours n’est en rien de la fermeture ou de l’intolérance parce que c’est un discours hautement critiquable, et puisqu’il est hautement critiquable, on a des bonnes raisons de s’opposer à ce qu’il soit inculqué à des enfants.
Prétendre qu’il n’y a que deux possibilités : soit endosser l’entièreté du discours sur les « LGBTQIA2S+[1]» promu par ceux qui s’autoproclament inclusifs, soit être intolérant, fermé à la diversité, homophobe et transphobe est pour le moins simplet. C’est un sophisme de faux dilemme. On peut tout à fait être favorable aux droits des homosexuels et des personnes trans-identifiées sans endosser l’idéologie queer.
Dans les faits, au moins une partie des drag queens qui animent des activités pour enfants participent à promouvoir auprès d’eux l’idéologie queer. Dans ce contexte, il est compréhensible que les parents, et n’importe quel adulte, soit perplexe quant à la pertinence, voire à la légitimité de ces activités.
Certains disent que les parents qui n’ont jamais assisté à des activités impliquant des drag queens ne devraient pas être méfiants a priori et leur reprochent d’avoir des préjugés. On peut pourtant voir ça autrement : au lieu de voir des parents qui posent des questions AVANT que leurs enfants soient exposés à quelque chose comme des parents ayant des préjugés, on pourrait les voir comme des parents responsables. Les parents sont justifiés de ne pas vouloir attendre que le mal ait été fait et de chercher à vérifier d’avance ce qu’on dit ou fait à leurs enfants.
Il y a aussi, entre les États-Unis et le Québec, des différence qui expliquent peut-être en partie qu’il y ait eu des réactions plus radicales aux États-Unis qu’ici, par exemple, l’adoption, dans certains États, de lois interdisant les performances de drag queens devant des enfants et de lois interdisant d’aborder les sujets liés aux « LGBTQIA2S+» dans les écoles primaires. Aux yeux de beaucoup, ces solutions paraissent radicales et motivées par un rejet pur et simple des personnes homosexuelles, bisexuelles, trans-identifiées, etc. Si on ne peut pas nier que, parmi les conservateurs états-uniens, certains sont tout bonnement homophobes, il faut éviter de mettre toute la faute sur les conservateurs et regarder dans quel contexte ils ont fait passer les lois mentionnées précédemment.
Parlons d’abord des lois qui concernent les activités de drag queens impliquant des enfants : bien que Barbada semble promouvoir l’idéologie queer auprès des enfants, notamment en leur parlant d’identité de genre (l’identité de genre serait ce qui fait de quelqu’un un homme, une femme ou ni l’un ni l’autre indépendamment de la réalité empirique, de la biologie), ce personnage semble passablement inoffensif – ou du moins il serait hautement exagéré de voir en Sébastien Potvin, qui le personnifie, quelqu’un de mal intentionné envers les enfants. On aurait cependant tort de juger les réactions des conservateurs aux États-Unis en fonction de Barbada, parce que là-bas, ils n’ont pas affaire seulement à des Barbada : des vidéos ont circulé montrant que des spectacles de drag queens impliquant des poses suggestives, des tenues sexualisées et du remuage de fesses ont eu lieu devant des enfants. Face à cela, il n’est pas étonnant que des parents, des citoyens et des gens impliqués en politique aient voulu agir pour mettre des barrières à de telles dérives.
En ce qui concerne les lois interdisant d’aborder des sujets liés aux « LGBTQIA2S+ » dans les écoles primaires : tel que mentionné plus haut, il est devenu commun de prétendre qu’on ne fait qu’inviter les enfants à s’ouvrir aux différences alors qu’en réalité, on leur présente un discours idéologique hautement critiquable, un discours qui ne devrait pas être présenté à l’école (surtout pas à l’école primaire). Mais en ce qui concerne les États-Unis, il faut ajouter l’élément suivant : là-bas, il existe une pratique qui consiste à faire transitionner socialement un enfant se disant trans lorsqu’il est à l’école, sans en informer ses parents. Une « transition sociale » consiste notamment en un changement de prénom et de pronoms : par exemple, quelqu’un qui est biologiquement un garçon mais s’identifie comme une fille adopte un prénom féminin, et ses camarades et le personnel de l’école le désignent avec le prénom qu’il a choisi et avec des pronoms féminins comme « she, her ». Dans un contexte où, sous prétexte d’ouverture à la différence, on maintient des parents dans l’ignorance de quelque chose d’important qui concerne leurs enfants, on peut comprendre que certains jugent nécessaire de prendre des mesures radicales pour réagir à cela.
La méfiance des gens est d’autant plus compréhensible étant donné que le mouvement « LGBTQIA2S+» d’aujourd’hui se caractérise par une certaine violence : les adeptes de ce mouvement sont nombreux à envoyer le message aux gens qu’ils doivent obtempérer sur toute la ligne, que sinon on les classe dans la catégorie des intolérants, et qu’une fois qu’on les a classés comme ça, on peut se permettre n’importe quoi avec eux. De nombreux exemples permettent de constater la violence décomplexée de ce mouvement.
On peut penser à la violence verbale et aux menaces qui ont ciblé la célèbre JK Rowling. L’auteure de Harry Potter est devenue une cible après qu’elle ait simplement rappelé que les personnes qui ont des menstruations sont des femmes. Et ce n’est qu’un exemple, que nous choisissons de mentionner parce que Rowling est sans doute l’une des personnes les plus connues à avoir été ciblées par la violence du mouvement « LGBTQIA2S+», de sorte que n’importe quel lecteur peut s’informer facilement sur le traitement qu’elle a reçu. De nombreux individus ont subi le même type de traitement que Rowling.
Certains actes de violence dans un passé récent peuvent aussi être mentionnés pour illustrer la violence dont nous parlons ici. Bien entendu, il y a la tuerie dans une école de Nashville, au Tennessee. La tueuse de Nashville visait une catégorie de gens à qui elle en voulait de ne pas endosser l’idéologie queer. On peut également penser à la violence envers la militante pour les droits des femmes Posie Parker et envers d’autres femmes lors de l’événement Let Women Speak en Nouvelle-Zélande, vers la fin du mois de mars. Chris Elston, un militant pacifique s’opposant notamment à ce que l’on donne des bloqueurs de puberté à des enfants se disant trans, a été agressé le 31 mars dernier à Vancouver, alors qu’il manifestait de façon pacifique (et ce n’était pas la première fois que cet homme était agressé physiquement par des défenseurs de l’idéologie queer). Récemment, Riley Gaines, une athlète qui défend le droit des femmes à des compétitions sportives équitables – et maintient avec raison qu’à cette fin, les compétitions féminines doivent être réservées aux vraies femmes, c’est-à-dire les humains de SEXE féminin – a été agressée.
On assiste présentement à une polarisation des débats sociaux et à une escalade de violence en Occident, et en dépit de la violence verbale ET physique que l’on peut constater du côté de la gauche woke, cette dernière blâme continuellement les conservateurs, en faisant comme si c’était strictement la faute de ces derniers. Il serait temps que cette frange de gauche réalise qu’elle contribue de manière significative à une escalade de violence que tout le monde aurait intérêt à stopper.
[1] Je mets cet acronyme entre guillemets, car je ne l’utilise que de façon autonymique : il amalgame des choses qui n’ont rien à voir ensemble.