Le Professeur David Morin de l’Université de Sherbrooke, dans un article publié sur La Presse, exprime des préoccupations légitimes concernant les problèmes sociaux et économiques auxquels sont confrontés certains quartiers en France. Dans un contexte difficile de violences urbaines dans le pays des Lumières, plusieurs experts et commentateurs prennent position sur les plateaux télé et les médias en général. Cependant, nous voyons ici la présentation d’une perspective biaisée et une analyse peu réaliste des causes profondes de la situation.
Ma première critique concerne l’affirmation selon laquelle la haine envers la police serait principalement due à une relation historiquement tendue entre les cités et les forces de l’ordre. Bien qu’il y ait certainement eu des tensions, on note que la police est tout de même essentielle pour maintenir l’ordre et garantir la sécurité publique, ça va de soi. Certains voudraient defund the police, mais à l’heure actuelle, c’est assez irréaliste.
D’ailleurs, rappelons aussi, dans la réponse du professeur Romain Gagné à l’article de M. Morin, un petit clin d’œil à Thomas Hobbes, philosophe anglais, qui évoquait la violence légitime de l’État afin d’assurer la sécurité publique. Dans un État de droit, la protection de la propriété privée est un critère essentiel de la liberté individuelle.
L’hostilité envers la police peut découler de plusieurs facteurs, tels que la présence de délinquance et de criminalité élevées dans certains quartiers. Un rapport de force s’établit dans les ghettos entre des zones de non-droit et des fonctionnaires de police. Essentiellement il faut aborder ces problèmes spécifiques plutôt que de blâmer les flics. Ça serait autant monocausal que de blâmer l’immigration comme seule source de chaos social en France.
Il est à noter que le ratio pour les morts lors d’opération policière en France en l’espace de 18 ans est de 0,26. Ça nous donne l’impression que des populistes comme Mélenchon et le groupe La France Insoumise dopent les chiffres et la représentation de la situation. L’IGPN (Inspection générale de la police nationale ; en résumé, la police de la police) dénote une augmentation des violences policières, notamment en raison des manifestations des Gilets jaunes. Pour paraphraser le texte de M. Morin, avec les tensions politiques de la 5e république, des épisodes de Mai 68 aux mouvements contre les réformes des retraites en passant par les manifestations contre le projet de loi Devaquet en 1986, ces événements plus récents nous font sentir un air de déjà-vu.
De plus, la rubrique souligne l’échec de la politique de la ville et de l’État dans les quartiers populaires. Bien qu’il soit vrai que des problèmes persistent, il convient de voir que des efforts considérables ont été déployés pour investir dans ces quartiers, notamment à travers des subventions et des initiatives visant à promouvoir l’éducation et l’emploi. Malgré tout, les milliards d’euros investis en 40 ans pour réformer l’infrastructure des cités ont trop souvent été vains. Par exemple, un tramway brisé la veille et réparé avec l’argent des contribuables se retrouvera dans la même position dans les semaines suivantes. Il est donc souvent inutile d’investir massivement à tout vent en réparant les pots cassés quand il tempête. Les échecs doivent être examinés de manière critique et les solutions doivent être basées sur une évaluation objective des politiques précédentes, plutôt que de rejeter toute l’approche dont l’État français fait preuve depuis des décennies.
Par ailleurs, la chronique du Professeur Morin mentionne aussi l’importance de s’attaquer aux inégalités, aux discriminations et au sentiment d’exclusion. Ces difficultés sont en effet réelles et doivent être approchées un peu plus en profondeur, oui. Cependant, la solution ne réside pas uniquement dans la responsabilité de l’État. Les communautés locales, les organisations de la société civile et les individus eux-mêmes ont également un rôle à jouer dans la promotion de l’égalité des chances et de l’intégration sociale. On n’occulte pas non plus l’aspect culturel et le clash civilisationnel sous forme de ghettoïsation que nous pouvons voir depuis un certain temps.
Enfin, l’article suggère que la répression généralisée nourrit le cercle vicieux de la violence. Bien que celle-ci ne soit pas la seule réponse appropriée à la violence, il faut effectivement maintenir l’ordre public et garantir la sécurité des citoyens, notamment en sécurisant et en encadrant le travail de la Gendarmerie et des forces policières en général. Des mesures fermes doivent être prises pour réprimer les actes de violence, tout en s’attaquant aux causes sous-jacentes de la criminalité et en offrant des opportunités de réhabilitation aux délinquants. Réhabilitation ou renforcement des peines, quoique soit la solution, nous n’essayons pas de prévenir, mais de guérir d’une maladie républicaine qui rouvre sans cesse ses plaies et nous empêche de les panser.
La réponse fournie par M. Gagné contient des éléments de critique valables. Nonobstant, elle semble prendre un ton accusatoire et généraliser les comportements violents à l’ensemble des personnes vivant dans les quartiers concernés. On peut ainsi voir la trame un peu plus sentimentale comparativement à l’article de David Morin. Il est important de souligner que la violence est le fait d’une minorité et ne représente pas l’ensemble de la population résidant dans ces zones. On y revient toujours : tous les pauvres ne commettent pas des crimes, tous les immigrants ne commettent pas des exactions, etc.
Il faut reconnaître que les problèmes sociaux et familiaux mentionnés dans la réponse sont des facteurs contributifs, absolument, mais ils ne peuvent pas exclusivement expliquer à eux seuls la situation complexe des émeutes et des troubles urbains. Nuançons, nous avons aussi deux articles de 500 à 800 mots et non une thèse universitaire basée sur des recherches. Ce sont de simples résumés.
Il faudrait aussi une approche plus nuancée et de considérer également d’autres facteurs tels que les inégalités socio-économiques, les discriminations, le manque d’opportunités et le déficit de services publics dans ces quartiers qui n’avantagent pas du tout la situation actuelle.
Il y a tellement de causes en amont d’un pays qui a connu une monarchie de plus ou moins 4 dynasties, deux empires de Bonapartes, 5 républiques, un État occupé… De multiples causes historiques viennent enraciner et presque fataliser un pays qui est aux prises avec des difficultés grandissantes. Balançant la Fenêtre d’Overton entre le populisme d’extrême-droite du Rassemblement national, un centre-(droite) incertain et qui gouverne à la semaine et une gauche prise entre les progressistes et les syndicalistes.
En ce qui concerne la sécurité, il est vrai que l’État a pour responsabilité de garantir la sécurité de tous ses citoyens, c’est l’une des missions constitutionnelles et centrales du pouvoir exécutif. Malgré tout, une réponse uniquement sécuritaire ne suffit pas à résoudre les conditions problématiques sous-jacentes. Peu de partis politiques, analystes, journalistes évoquent des politiques de prévention, de réhabilitation et de développement social qui s’attaquent aux causes profondes des troubles civiques et qui visent à améliorer les conditions de vie des Français (de papier, de souche, de descendance, peu importe) des quartiers concernés.
La réponse de Romain Gagné met l’accent sur l’importance de l’éducation nationale et de l’accompagnement des parents. Tout compte fait, l’éducation familiale est souvent le tertre fertile pour qu’un jeune citoyen puisse trouver son émancipation et sa liberté. Une famille compréhensive, constructive, empathique fera très certainement l’humain qui passe à l’âge adulte. Tout ceci est tout à fait pertinent, mais il faut aussi reconnaître que des investissements significatifs dans les opportunités économiques, par exemple, sont nécessaires pour briser le cycle de la violence et favoriser l’intégration sociale.
Les politiques, cependant, surferont toujours sur la vague du fan service des militants et des électeurs inquiets. Les partis prendront parti davantage pour les policiers, les autres excuseront ou expliqueront (dépendamment des vocables qu’on utilise) les crimes posés et le saccage.
Une approche plus complète et holistique est indispensable pour comprendre et résoudre les problèmes complexes rencontrés en France. Oui, il y a des débordements faits par des policiers écœurés et stressés, oui des manifestants n’ont pour seule réponse que la grogne ou l’émeute. L’un peut nourrir l’autre.
Une république fatiguée, aux prises avec un exécutif opaque voir impérial, une absence de transparences des autorités locales et gouvernementales. Une population apeurée et cynique face aux politiques. Tout ceci ne peut conduire qu’à la faillite politique de la république française.
Que l’État cesse de faire payer les citoyens victimes de ce capharnaüm public, que celui-ci prenne ses responsabilités et qu’il augmente les conditions économiques, augmentant de surcroît les chances de survie de la classe moyenne française.