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François Legault ; le « cancelleur » en chef?

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Depuis déjà quelques années, le phénomène de la « cancel culture » fait beaucoup jaser. En partie une conséquence des réseaux sociaux qui rendent les controverses virales au point d’être invivables pour les concernés, mais aussi une expression du dogmatisme moral d’une certaine forme de « wokisme » qui veut expurger la société de ses « comportements toxiques », il semble difficile d’échapper aux dynamiques « d’annulation » des personnalités publiques.

Dans tout ça, malgré une attitude qui cherche à faire croire le contraire, la CAQ, qui gouverne aux sondages et à l’interprétation arbitraire des sensibilités populaires, semble y succomber très facilement.

En effet, malgré de nombreuses fois où il a tenté de se distancier du wokisme, comme par exemple lors de sa prise de bec avec GND ou dans de nombreuses publications vantant les mérites argumentaires de MBC sur le sujet, on a eu de nombreux exemples où Legault a tranché de manière très expéditive des controverses, succombant de facto à cette « tyrannie » des tribunaux populaires des réseaux sociaux.

On pourrait évidemment parler de la cancellation des opposants des mesures sanitaires, qualifiés de « coucous » complotistes et de menace pour la société, mais accordons au gouvernement le bénéfice du doute en raison du caractère exceptionnel de cet état d’urgence.

On se rappelle cependant cette controverse autour de l’annulation d’un évènement anti-avortement au Centre des Congrès de Québec cet été, qui avait été appuyé par Legault ainsi qu’une bonne partie de la classe politique. Malgré tout ce qu’on peut penser en mal du mouvement pro-vie, aucune loi n’empêche de militer contre l’avortement et cette réaction expéditive de censure était profondément troublante.

François Legault, Caroline Proulx et de nombreux politiciens québécois ont supposé de manière tout à fait arbitraire que « ce genre de discours ne passe pas au Québec », et puisqu’il est effectivement très minoritaire dans l’opinion publique, ils ont eu le champ libre pour l’interdire complètement des institutions publiques.

Une dérive très inquiétante qui démontre bien comment la force électorale de la CAQ et l’unanimisme ambiant au Québec peut se transformer en abus de pouvoir et en tentative de faire taire les débats.

Défendre les « cancellés » ne revient pas nécessairement à être d’accord avec eux ; mais simplement à reconnaître qu’ils ont droit de se défendre et/ou de s’exprimer. Pas besoin d’être contre l’avortement pour reconnaître que dans une société libre, les gens qui sont contre ont le droit de se rassembler et d’en discuter.

Plus près de nous, on a vu le gouvernement Legault retirer sans hésitation l’Ordre national du Québec à Gérard Depardieu, ce « monstre sacré » du cinéma français, en raison des révélations choc du reportage « La chute de l’ogre ».

Les propos de l’acteur dans ce reportage sont évidemment choquants, et personne ne chercherait à les défendre. Néanmoins, son comportement grossier ne date pas d’hier, et cette soudaine vague de cancellation s’est faite si rapidement qu’on n’a même pas cherché à faire la lumière sur la situation. Un seul reportage, et l’ensemble de la carrière monumentale de cette légende du cinéma devrait être effacée des mémoires…

Notons les origines nébuleuses de ce reportage. D’abord un film qu’on avait demandé à Yann Moix de réaliser sur la vie de l’acteur et qui n’avait jamais abouti – Moix demandant à plusieurs reprises de récupérer les 18h de rush à son producteur sans succès – qui a été complètement détourné de son objectif originel et envoyé à l’équipe de Complément d’enquête, qui en a fait un montage choc.

D’un point de vue déontologique, disons que ce n’est pas la production la plus honnête qui soit… et Yann Moix a déjà déclaré qu’il engagerait des poursuites contre son producteur, qui l’a manifestement trompé en détournant l’objectif du projet.

À cela s’ajoute le fait que selon de nombreux observateurs, dont l’avocat Julius Grey, Legault aurait potentiellement enfreint la loi en retirant l’Ordre national du Québec à Depardieu de manière aussi arbitraire. En effet, les règlements de l’Ordre prévoient que seul une condamnation au criminel peuvent justifier un retrait de cette distinction.

Évidemment, Depardieu fait l’objet d’accusation de viols et de harcèlement sexuel, il faudra donc voir le résultat de ces poursuites, mais était-il vraiment justifié de la part du gouvernement de trancher prématurément la question en lui retirant l’Ordre national? Le gouvernement fait-il office de tribunal, maintenant?

Cette propension à réagir aussi rapidement à ce genre de controverses prend les airs de signalements de vertu un peu lâches de la part d’un gouvernement essentiellement réactif et qui ne base ses décisions que sur les aléas de l’opinion publique. Legault veut paraître comme un bon père de famille qui agit prestement… au risque de tomber dans une bien-pensance moralisatrice qui donne raison aux tribunaux populaires.

Il s’agit évidemment d’un phénomène particulièrement délicat, puisque dans bien des cas, les gens ont raison d’être choqués par les allégations, mais l’habeas corpus veut qu’on soit « innocent jusqu’à preuve du contraire ». Autrement dit, ce n’est pas pour défendre les comportements criminels ou toxiques qu’on doit s’opposer à la cancel culture, mais pour défendre le principe que chacun a droit de se défendre devant les institutions appropriées.

Si on permet aux tueurs en série d’être défendus et bien traités dans le processus juridique, ce serait la moindre des choses de permettre aux personnalités publiques de se défendre avant d’être « cancellés » sur toutes les plateformes… Le gouvernement, plus que quiconque, devrait garder une saine distance avec ces controverses et ces tentations malsaines pour le lynchage.

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