Vous l’avez vu passer : François Legault est passé de premier ministre le plus populaire au Canada au plus impopulaire. En effet, sa cote de popularité n’est maintenant que de 32%. Le Journal de Montréal a fait un dossier sur la question ce mercredi. Ses politiques erratiques, ses contradictions, son opportunisme, tout est étudié pour tenter de répondre à la question : pourquoi un tel déclin en si peu de temps? Essayons d’aller au-delà de cette enquête pour voir les raisons profondes du rejet de la CAQ par la population.
Tout le monde y va de son analyse. Mario Dumont et Luc Lavoie affirment qu’ils n’ont jamais vu une telle chute de popularité en si peu de temps pour un politicien. Mathieu Bock-Côté espère voir un regain nationaliste chez François Legault. Mais est-ce possible que cela soit plus complexe que seulement le troisième lien ou la venue des Kings de Los Angeles à Québec? Notre premier ministre tente en effet de gouverner selon les sondages. Mais il arrive en fait qu’à force de vouloir satisfaire tout le monde, on finit par tous se les mettre à dos.
Regardez par exemple le troisième lien. En campagne électorale, Legault affirme que le projet ira de l’avant, que ce n’est qu’une question de temps pour que Québec ait son troisième lien. Dans un contexte ou le pont Pierre Laporte est vieillissant, le gouvernement doit effectivement penser à des solutions si le pont devait fermer ou réduire la circulation. Mais lorsque la campagne fut terminée, Legault est revenu sur ses propos en affirmant que c’était un projet trop coûteux, trop ci, trop ça. On aurait pu s’attendre qu’un tel revirement satisfasse les partisans de Québec Solidaire?
Mais non. Il a réussi à se mettre l’ensemble de la région de Québec à dos. Ce n’est pas raison si le Parti Québécois a pu faire élire son nouveau député lors d’une élection partielle dans ce qui était jusqu’à récemment la chasse gardée de la CAQ. De même, s’il y avait des élections aujourd’hui, les conservateurs d’Éric Duhaime gagneraient des sièges en Beauce et dans la grande région de Québec. Mais ce ne sera pas la seule bourde de François Legault.
Les Kings de Los Angeles, une équipe ayant peu de liens avec Québec, viendront jouer des matchs préparatoires au centre Vidéotron. La CAQ a promis de 5 à 7 millions pour leur venue. Alors que le Canadien de Montréal a affirmé qu’ils étaient prêts à venir jouer gratuitement dans la vieille capitale. Ce n’est pas tant le montant le problème, mais le fait qu’après, le gouvernement affirme qu’il n’y plus d’argent pour les services publics dans un contexte de grève des employés de l’État.
Et bien sûr la filière batterie avec le financement de la Suédoise Northvolt. C’est quelque chose qui n’a été demandé par personne, et c’est bien là une des spécificités de la CAQ. C’est-à-dire d’offrir des « patentes » que personne n’a demandées. Vous vous souvenez des maternelles 4 ans? Des maisons des aînés? Vous avez déjà oublié? On ne saurait vous en tenir rigueur. C’était hier, mais pourtant, ce sont des choses que personne n’a vraiment demandées, ni même souhaitées.
En gros, ce que la population reproche à François Legault et à son gouvernement, ce sont les promesses brisées avec le troisième lien, son incapacité à maintenir une cohérence sur les questions identitaires, mais aussi ces « patentes » que personne n’a vraiment demandées. Qui souhaitait vraiment la venue des Kings? Personne. Et l’usine Northvolt? Elle n’est pas encore construite qu’il y a déjà plein de controverses sur la gestion de ce dossier. Langue française, utilisation massive de main-d’œuvre étrangère, enrichissement soudain des propriétaires du terrain…
On sent que les trois prochaines années seront longues. Et difficiles pour François Legault. Celui-ci a déjà affirmé qu’il ne resterait pas le temps complet d’un deuxième mandat. En plus, il a déjà atteint l’âge de la retraite. Est-ce possible qu’il se retire pour céder la place à du sang neuf? Rien ne semble l’indiquer pour le moment. Mais nous pourrions comprendre une telle décision si elle venait à être prise. Tout le monde est fatigué des années de pandémie, et on le sent aussi chez notre premier ministre. Surtout que rien n’indique qu’il saura remonter la pente après une chute aussi dramatique.