Voilà maintenant trois fois que nous vivons une drôle de fête nationale – Ou Saint-Jean-Baptiste si vous êtes traditionnel. Plusieurs villes ont annulé leurs célébrations à la dernière minute, tandis que sur les plaines, le spectacle est loin d’avoir fait l’unanimité. Mara Tremblay, dans un cri du cœur sur Facebook, se dit blessée par les commentaires sur les réseaux sociaux. En soi, elle a raison ; c’est beaucoup de travail qui a été mis là-dedans. Mais on devrait aussi se poser une question : la fête nationale doit-elle obligatoirement être « inclusive »? Inclusive au sens progressiste du terme? Voyons voir ça.
Parmi les principales critiques adressées au spectacle, il y a la présence très forte d’artistes issus des communautés culturelles. Personne n’a remis ce principe en question. Mais comme on dit souvent, c’est qu’à force de vouloir plaire à tout le monde, on finit par ne plaire à personne. C’est le cas de ces jeunes artistes qui vont sur scène, sans trop savoir pourquoi. On ne sait pas trop qui ils sont, ni pourquoi ils sont là. C’est probable qu’eux également ne savent pas plus.
Loin de moi l’idée de vouloir critiquer des genres musicaux, mais est-ce possible qu’à force de s’adresser à des niches de plus en plus restreintes, cela finit par gâcher le « fun »? Dans notre époque postmoderne, il n’y a plus d’artistes fédérateurs pour rassembler tout le monde autour de la nation. Tout le monde a ses propres intérêts. Votre fille aime la K-Pop? Votre ex aime le rap autochtone? Tellement de choix tue le sentiment de partager une culture commune.
YouTube, Spotify et compagnie offrent une telle quantité d’artistes étrangers, émergents ou méconnus que cela est impossible pour les jeunes de s’approprier des figures communes. Il n’y a pas si longtemps que ça, nos parents aimaient Beau Dommage, Harmonium, tandis que nos grands-parents écoutaient Félix Leclerc ou Gilles Vigneault. On n’a qu’à regarder le spectacle de la Saint-Jean-Baptiste de 1990 à Montréal pour voir que les artistes de l’époque faisaient à peu près consensus. De nos jours, écoutez-vous les mêmes artistes que vos amis, si vous faites partie de la génération Z ?
Le mouvement national des Québécois, qui organise la fête, est confronté au même dilemme que les producteurs du Bye Bye à Radio-Canada. Il faut maintenant parler à toutes les tranches d’âge de la population, mais aussi aux différentes communautés culturelles. Cela n’en vient-il pas à diluer le sentiment d’appartenance que ce spectacle devrait tous nous faire vivre ?
L’inclusion, au sens « woke » ou progressiste du terme, est l’un des critères les plus importants désormais pour l’organisation d’un festival ou d’une fête nationale. Pourtant, il n’y a pas si longtemps que ça, « l’inclusion » se faisait naturellement, sans que l’on ait besoin de forcer la main de qui que ce soit. Vous vous souvenez des Colocs? Ils ont mis du wolof (langue du Sénégal) dans leurs chansons. Quelqu’un s’en est-il déjà plaint? Jamais.
Tout comme personne ne s’est plaint de la présence d’animateurs noirs comme Normand Brathwaite ou Grégory Charles. Non, jamais. C’est lorsque les organisateurs d’un événement se sentent obligés de constamment rappeler « l’inclusion » et la « diversité » que cela accroche. De peur de paraître raciste ou réactionnaire, on en fait plus que le client en demande. Cela se manifeste par la quantité de personnages issus de la diversité de genre dans les émissions de télévision québécoises ou bien sur Netflix.
Pourtant, combien de gens issus des communautés culturelles vont réellement regarder les émissions les mettant en vedette à Radio-Canada? Et combien de jeunes en bas de 40 ans regardent de toute façon la télévision de nos jours? La télé est un médium vieillissant. Une étude a estimé que l’âge moyen d’un téléspectateur au Québec était en moyenne de 50 ans pour Noovo, 57 ans pour TVA et 58 ans pour Radio-Canada? Il s’agit possiblement de la même tranche d’âge qui écoute le spectacle sur les Plaines à la télévision.
Mais tout ça pour en venir à une conclusion : la fête nationale du Québec devrait se concentrer davantage sur les spectacles de quartiers. Et arrêter de constamment devoir rappeler ses « devoirs » quant à « l’inclusion » et à la « diversité ». Ces deux valeurs, tellement mises de l’avant de nos jours, se faisaient sans heurts à une époque où l’on n’avait pas besoin de les crier sur tous les toits. Personne n’y croit. Ni les « racisés », ni les autres qui voient dans ça un discours propagandiste pour se donner bonne conscience.