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Le Bloc québécois est-il encore pertinent aujourd’hui? Entrevue avec le politologue André Lamoureux

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En juin 1990, l’Accord du Lac Meech a été rejeté par deux provinces canadiennes. Ce fut un retentissement échec de Brian Mulroney qui tentait de ramener le Québec dans le giron constitutionnel canadien avec honneur et enthousiasme. Lucien Bouchard, qui était ministre dans le Cabinet Mulroney, fut très déçu de la tournure des événements. Selon le politologue André Lamoureux, M. Bouchard a quitté les conservateurs après le dépôt du rapport Charest : «M. Bouchard a rejeté le rapport Charest, car les revendications proposées par Jean Charest étaient moins importantes que les celles du Lac Meech. Cela a mené à la création du Bloc québécois avec Gilles Duceppe, Jean Lapierre et d’autres élus québécois», explique André Lamoureux en entrevue à Québec Nouvelles. 

Par la suite, le gouvernement Mulroney a proposé une autre entente constitutionnelle. Les demandes du Québec dans l’entente de Charlottetown étaient moins d’envergure que celles du Lac Meech. On a organisé un référendum pancanadien sur cette entente et elle fut rejetée par le Québec et le reste du Canada. «À mes yeux, l’échec de cette entente représentait le divorce entre le Québec et le reste du Canada. En quelque sorte, l’échec de Meech représentait déjà une séparation entre le Québec et le ROC», estime-t-il. 

Après cela, le sentiment national des Québécois était devenu très fort. Le politologue nous explique que les Québécois ont appuyé massivement le Bloc québécois lors des élections de 1993. Le BQ a fait élire 54 députés (avec 49,30% de voix) et forma l’Opposition officielle à Ottawa. 

Après la défaite du camp du OUI lors du référendum sur la souveraineté du Québec, Jacques Parizeau a démissionné de son poste de premier ministre. C’est Lucien Bouchard qui l’a remplacé. 

André Lamoureux nous raconte qu’à la fin des années 90, le gouvernement Lucien Bouchard a mis en place deux politiques controversées, les fusions municipales et des mesures d’austérité budgétaire afin de lutter contre le déficit. «Le Bloc québécois n’a pas dénoncé ces deux mesures du gouvernement du PQ, car les deux partis étaient des alliés naturels. Le silence et l’inaction du Bloc dans ce dossier a entraîné la perte de 10 sièges lors de l’élection de 1997 (37,9% des voix) et de six autres en l’an 2000, avec 38 députés élus (39,8% des voix). Ce furent des pertes significatives», nous indique M. Lamoureux. 

Au début des années 2000, le Bloc québécois était en perdre de vitesse. Cependant, selon M. Lamoureux, c’est le scandale des commandites qui a permis au Bloc de revenir en force. «Cet événement a rallumé la flamme souverainiste des Québécois. Lors des élections de juin 2004, le Bloc a fait élire 54 députés (avec 48,8% des voix), 16 de plus qu’en 2000», raconte-t-il. 

Sous le leadership de Gilles Duceppe, de 1997 à 2011, le Bloc était un parti indépendantiste. Selon le politologue, c’était aussi le lieu de rassemblement pour tous les nationalistes québécois. C’était une formation politique de centre-gauche sur le plan idéologique. Sous Gilles Duceppe, le Bloc a défendu les intérêts du Québec dans une multitude d’enjeux : le pouvoir fédéral de dépenser, la défense du Français, la lutte contre la loi sur la clarté référendaire, etc. 

Selon M. Lamoureux, Gilles Duceppe fut un redoutable chef du Bloc québécois. Il a bien défendu le Québec à Ottawa pendant toutes ses années. Par contre, à partir de 2009, son leadership a perdu son mordant d’antan. «À partir de 2009, dans les rangs du Bloc, on pensait que Gilles Duceppe quitterait le leadership de son parti, car il semblait manquer de détermination», explique-t-il. 

Lors des élections de mai 2011, André Lamoureux estime que le Bloc québécois a fait une campagne désastreuse. Son slogan Parlons Québec n’était pas très efficace. Le Bloc aurait dû faire campagne sur quelques propositions claires pour le Québec. «Gilles Duceppe a fait une campagne très défensive et pas très inspirante. À cette époque, le PLC était en chute libre et les Québécois rejetaient fermement le Parti conservateur de Stephen Harper. Se cherchant une alternative, ils ont été séduits par le discours d’ouverture et positif de Jack Layton, le chef du NPD», estime-t-il. Ce dernier s’était engagé à défendre les intérêts du Québec à Ottawa. Cela a permis au NPD de faire élire 59 députés au Québec lors des élections du 2 mai 2011. Le Bloc fut presque anéanti et il a fait élire seulement quatre députés. 

Sous le leadership de Martine Ouellet, le Bloc québécois a vécu une longue traversée du désert. 

Ce parti a repris des forces sous le leadership d’Yves-François Blanchet. Lors des élections de 2019, le Bloc a fait élire 32 députés. Selon M. Lamoureux, le Bloc est redevenu une force politique imposante grâce à la direction du nouveau chef. Le discours de ce dernier s’est centré sur la défense des intérêts du Québec à Ottawa. L’idée de l’indépendance est également toujours présente dans le discours du Bloc, mais il n’en parle pas tous les jours. «Le Bloc québécois défend le Québec à Ottawa dans les dossiers de l’immigration, de la langue française et de la laïcité. Il a mené des batailles et le Bloc a été très convaincant sur ces enjeux », souligne-t-il. 

Par contre, André Lamoureux estime que le Bloc québécois veut parfois être trop conciliant et l’échappe sur certains dossiers. « Concernant la taxe sur le carbone, le Bloc québécois ne semble pas comprendre la rancœur des Canadiens anglais sur cet enjeu». Selon le politologue, il reste qu’aucune étude scientifique ne démontre que la taxe sur le carbone a eu un effet direct sur les émissions de gaz à effet de serre. «Je voudrais voir cette relation quantitative de cause à effet entre la taxe et son efficacité sur le terrain. Ce qui inciterait les citoyens à y adhérer positivement. Or, depuis l’entrée en vigueur de cette taxe, les émissions de gaz à effet de serre n’ont pas baissé, elles ont plutôt monté» explique-t-il. À son avis, si on avait fait une démonstration claire quant à l’efficacité de cette taxe à faire baisser les émissions de gaz à effet de serre, les gens auraient été plus enclins à l’accepter. Mais ce n’est pas le cas.  Le Bloc veut-il séduire le vote de gauche? Je ne suis pas convaincu de l’efficacité de la stratégie du Bloc québécois. Je pense que cela pourrait même aider les conservateurs au Québec», dit-il.  

Récemment, il y a une motion sur conflit israélo-palestinien qui a causé de vifs débats à la Chambre des communes. M. Lamoureux a lu la motion qui a été adoptée au Parlement canadien, mais il trouve qu’elle n’est pas balancée, car elle s’avère trop complaisante envers le Hamas. Formellement, aucune obligation ne lui est imposée. Ce mouvement, prônant l’instauration d’un califat islamiste en Palestine, a quand même préparé sa guerre depuis plus de dix ans grâce au financement de l’Iran et du Qatar. Il a construit des kilomètres de tunnels blindés, effectué l’abominable massacre du 7 octobre, bombardé le territoire israélien avec des milliers et des milliers d’obus et de roquettes. Il a sciemment préparé une guerre d’agression. Il a également utilisé la population civile palestinienne comme bouclier humain. « Le Hamas, dit-il, ce mouvement islamiste et terroriste, n’a plus donc rien à voir avec la revendication d’une « Palestine libre et indépendant », et même laïque, au sens où cela se posait au cours des années 1970 et 1980.

En revanche, le politologue estime qu’une trêve ou des trêves humanitaires sont nécessaires. De même que l’entrée de nourriture, de médicaments et d’équipement médicaux. C’est une urgence capitale. Par contre, explique-t-il, il s’avère « qu’actuellement, un véritable cessez-le-feu n’est pas réalisable, tant et aussi longtemps que les otages israéliens ne seront pas libérés et que le Hamas n’aura déposé les armes». D’autre part, pour envisager une solution politique (s’il en reste une!), le politologue soutient qu’Israël doit se retirer de la Cisjordanie qu’elle occupe illégalement depuis des décennies. Sans cette sortie, il n’y aucune possibilité de d’envisager la création d’un État palestinien.  

La motion présentée au Parlement était très biaisée, conclut M. Lamoureux. Il ne l’aurait pas appuyé, parce que tout le fardeau est sur Israël et le Hamas s’en tire à bon compte. Il n’y avait pas de juste milieu dans cette résolution, selon M. Lamoureux. Ce dernier ne comprend pas pourquoi le Bloc québécois a appuyé cette motion. «J’ai vu les reportages à propos de Denis Trudel et je ne comprends pas sa position ». Le Hamas a une immense responsabilité dans ce terrible drame. « On ne parle pas de cela dans la motion», martèle-il. 

Selon M. Lamoureux, ce n’est pas la première fois que le Bloc québécois demande un cessez-le-feu sans combattre comme il le devrait pour la libération des otages et l’obligation du désarmement du Hamas. «Israël a été attaquée et a quand même le droit de se défendre. Donc, je ne comprends pas pourquoi le Bloc québécois a appuyé une telle motion», conclut-il. En espérant que cette prise de position ne lui nuise pas trop.

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