Une entrevue de Patrick Lagacé avec Mélanie Joly diffusée sur les ondes de 98.5 la semaine dernière est très révélatrice de la posture « bien-pensante » Libérale et des manœuvres médiatiques qui la soutiennent face à l’opinion publique.
Quand Lagacé évoque la « montée des forces d’extrême-droite qui ne croient pas à la démocratie » aux États-Unis et la menace d’un penchant « vers l’autoritarisme, que semble prôner Mr. Trump », Mélanie Joly en profite pour dire que la croissance de l’extrême droite s’observe également au Canada.
Patrick Lagacé lui demande alors si elle considère que le chef Conservateur Pierre Poilièvre est d’extrême droite. Joly lui répond: « Poilievre est très à l’aise à être sur la ligne, et de lancer des messages à certains membres qui comprennent les codes qu’il utilise (…). Du message codé, par exemple lorsqu’il fait référence au Forum Économique Mondial, qui est une des théories conspirationnistes les plus connues, pas basée sur des faits, il envoie des messages à cette base [la plus extrême de son parti]. »
« Dans le convoi des camionneurs, il y a des gens d’extrême droite qui l’aimaient beaucoup » ajoute Lagacé. À quoi Mélanie Joly répond que, Poilièvre doit « dire clairement haut et fort qu’il est contre ces éléments d’extrême droite. »
Peu de phrases, mais tellement d’éléments à décrypter et de pendules à remettre à l’heure. Comme en Europe et aux États-Unis, on voit que le spectre d’une extrême droite anti-démocratique fantasmée sert d’épouvantail aux tenants d’un régime politique en perte de vitesse.
L’extrême droite ne désigne pas exclusivement le fascisme ou le nazisme, mais une catégorie politique plus large qui englobe un ensemble de mouvements et d’idéologies. Les définitions peuvent varier, mais il est généralement question de conservatisme social et de nationalisme exacerbés, doublés d’une volonté autoritariste. Souvent, le terme sous-entend de la xénophobie et du racisme. Selon le Larousse, c’est « l’ensemble des mouvements qui se rattachent à l’idéologie contre-révolutionnaire et qui récusent aussi bien le libéralisme que le marxisme. (Considérant comme légitime l’emploi de la violence, ils réclament un régime fort. L’antiparlementarisme et l’anticommunisme sont les deux thèmes essentiels de l’extrême droite). »
Il est clair que l’étiquette est employée péjorativement dans cette entrevue. Autrement, Mélanie Joly n’appellerait pas à ce que Pierre Poilievre désavoue explicitement ces « éléments ». Connaissant les déclarations passées de Mélanie Joly et les positions du PLC, on comprend que la désignation « d’extrême droite » peut facilement s’appliquer à tous ceux qui sont contre l’immigration massive et illégale ou qui s’opposent à un activisme LGBTQ+ ciblant désormais les mineurs.
Ce qui est sidérant, c’est que le courant spécifiquement qualifié d’extrême droite dans l’entrevue est le convoi des camionneurs, un mouvement de protestation contre les mesures liberticides imposées pendant la pandémie. En essence, il s’agissait d’un mouvement libertaire [et plutôt « libertarien »] qui décriait l’autoritarisme du gouvernement canadien. De plus, la composition multiethnique du convoi des camionneurs rend impossible de l’associer à un quelconque ultranationalisme ethnique. L’entrevue nous propose une totale inversion du réel.
La désignation du Forum Économique Mondial comme une théorie complotiste constitue une autre subversion de la réalité. D’abord, Poilievre n’a fait guère plus que de s’opposer au FEM en soi, en interdisant à ses futurs ministres d’assister aux conférences de Davos. Sur le site du Parti Conservateur, on peut lire que « les politiques du FEM ne correspondent pas à celles des familles canadiennes » et que « les fonds publics dépensés pour ces luxueux voyages à Davos seraient mieux utilisés pour soutenir [celles-ci] ». Il suffit de s’intéresser le moindrement au site web du FEM pour comprendre sa forte volonté coordinatrice [centralisatrice], qu’on appelle autrement le globalisme. L’ingérence de firmes de conseil apparentées au FEM [comme McKinsey] dans la gouvernance d’États souverains le confirme [les contrats octroyés à McKinsey sous l’administration Trudeau dépassent 100 millions de dollars]. Pourquoi Mélanie Joly parle-t-elle de conspirationnisme? Ça donne l’impression que les tenants du globalisme sont honteux de leur propre option.
La proximité idéologique du Parti Libéral et du FEM est indéniable, autant sur les accords de commerce globaux et sur les questions environnementales que sur la « diversité et l’inclusion ». La vice première-ministre Chrystia Freeland avait d’ailleurs été honorée en tant que Jeune Leader Mondial par le Forum économique mondial en 2001. Elle a pris part à la réunion de Davos aussi récemment qu’en 2023.
Le caractère supposément anti-démocratique de cette « extrême droite » constitue une autre distorsion. C’est parce qu’ils définissent le régime diversitaire [lire: woke] et sa volonté mondialiste comme étant « la Démocratie ». Du coup, toute mouvance politique qui en déroge est forcément [et faussement] décriée comme une menace envers la démocratie. C’est le cas du populisme de droite, qui est désireux de se défaire de l’emprise d’une élite politico-médiatique corrompue et de ses valeurs néo-progressistes.
Pour peindre ce populisme comme une menace pour la démocratie, on pointe Donald Trump et le mouvement MAGA. Pourtant, bien qu’il estime que l’élection de 2020 a été frauduleuse, Trump ne s’est pas cramponné au pouvoir. Il a quitté la Maison-Blanche de plein gré, bien qu’il ne reconnaisse pas la légitimité du résultat. Qu’est-ce qui est plus dangereux pour le processus démocratique: émettre des doutes sur l’authenticité de centaines de milliers de bulletins de vote par correspondance dont les signatures n’ont pas été dûment vérifiées ou balayer ces préoccupations pourtant légitimes sous le tapis en dénigrant et culpabilisant ceux qui les expriment? À noter que le camp Démocrate, celui qui a interdit qu’on doute du résultat de l’élection présidentielle de 2020, avait remis en cause l’issue de celle de 2016 pendant 4 ans, à coups d’accusations d’ingérence russe. À la différence que ces allégations farfelues des Démocrates ont été déboutées, alors que les irrégularités du vote en 2020 sont avérées. Leur ampleur et l’impact sur le résultat demeurent inconnus, notamment en raison du refus politique de faire la lumière.
Avec la désignation d’extrême droite, Patrick Lagacé et Mélanie Joly ont recours à une tactique de diabolisation, qui permet d’éviter les discussions sur le fond. Ils avancent « l’extrême droite » et la menace pour la démocratie comme des prémisses auxquelles il faut souscrire, alors qu’elles sont non seulement subjectives, mais infondées. Rien n’est éclairci ni remis en question, même quand Mélanie Joly associe le FEM à une thèse conspirationniste – d’où la médiocrité objective de l’entrevue, qui s’apparente davantage à une publicité politique partisane.
Les détracteurs diront que l’étiquette « d’extrême droite » assignée aux individus conservateurs, populistes ou libertariens vaut bien celle de « woke » à l’endroit des Libéraux et autres gauchistes. Toutefois, de faire remarquer que les personnes qui appuient des positions néo-progressistes [wokes] adhèrent au wokisme reste factuel. L’accusation « d’extrême droite » vise à dénigrer, à invalider et même parfois à exclure par voie de « cancel culture », même si, plus souvent qu’autrement, il n’est pas question d’opinions d’extrême droite objectivement parlant.